La
question de l’Être.
Entre l’imprononçable du Nom et du Verbe au centre de la religion se pose la
question de l’Etre, scène tragique du théâtre de l’énigme de l’Autre
d’où se produit et se distingue le discours philosophique et le discours
psychanalytique.
L’inconscient témoigne d’un « c’est écrit »! Texte échappé,
d’une double scène qui toujours se croise, l’Autre scène rêvée de
l’enfance, l’Autre de la réalité de l’histoire des hommes, autre
« continent noir » indexé par le principe de latence. Phylogenèse
autant que principe psychique ontogénétique, le sujet se trouve déterminé
d’un « ce qui ne s’écrit pas »! le Réel. Ce que Lacan désigne
par la catégorie de réel, de jouissance notons que, dès le Livre 1 de son Séminaire,
le champ de la conscience est homologue au champ du religieux monothéiste alors
que le champ social est exposé à la « théologie de la libre-entreprise ».
C’est bien entre ces deux ordres noués par leurs contraires autant que leurs
contradictoires que l’ordre souverain du Symbolique, du Signifiant, produit
une scène d’écriture, comme au sens religieux et laïque, par ce qui fait
« trou » en elle, ce qui reste insymbolisable, imparlable,
indicible, le Réel. C’est bien de l’ordre du Réel que la source et le
destin du « croire », de la « foi » puise son principe
inventif ou catastrophique. La phobie du penser, à la hantise des discours sur
la sécurité, sur la « jouissance qui servirait à quelques chose »
alors qu’elle ne sert à rien et à personne, exploitent sans vergogne l’énigme
de l’autre, de l’Autre, signe certain de l’angoisse au cœur impensé de
toute forme de croyance. Ce n’est pas un hasard si la naissance de la
philosophie consiste à réveiller la conscience par la pratique de l’étonnement
à l’égard des mythes alors que, depuis la brisure de la Modernité devant
l’incroyable déchaînement du signifiant dans le réel de l’histoire
(Hiroshima), c’est plutôt l’angoisse qui permet désormais au sujet, au
« parlêtre », de faire
retour éthique sur ce qui, selon la logique de la lettre, marque sa présence
au monde, trace du réel sa préscence aux autres, entre être et Etre, entre
Autre qui existe et, Autre qui n’existe pas.
Les
trois impossibles freudiens : gouverner, éduquer, analyser, se refondent
« depuis » Auschwitz, c’est aussi pourquoi le conflit au
Moyen-Orient non entre deux, mais entre trois peuplades fondatrices d’un seul
et même monothéisme est si emblématique de ce que Legendre nomme la Référence,
la guerre, toute guerre n’étant qu’une relance
de la guerre des Textes!
Jérusalem
est justement le Nom de Ce qui reste d’Auschwitz.
Si
les impasses de la civilisation viennent toujours de ce qui de la vérité du Désir
et de la Vie sont occultées, en revanche la Puissance de la croyance et de la
foi monothéiste prises à la lettre ramènent immanquable le doute à ce
qu’il a de plus créatif, actif, là où l’Etre s’émarge de la lettre,
l’absence du signifiant à la certitude du Livre, entre décidable et indécidable,
existence et inexistence de l’Autre.
Philosophie
et psychanalyse dans les deux cas peuvent soumettre la parole au régime
silencieux de la prière, la poésie au régime absent de la prophétie, ce qui
reste du Réel d’Auschwitz à l’imprononçable de «Shoah ».
Entre crainte et doute, croyance et foi, il s’agit d’évaluer
l’occasion qui ne brise aucun rêve, ni celui du murmure inventif de
l’Autre, ni le poème de l’Etre, l’Un et l’Autre, au demeurant toujours
déjà présent ou toujours déjà absent.
Vers
la page 14 Mémoire
généalogique des croyances
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