° Rubrique philo-prepas > La croyance

La croyance prise à la lettre 
Par Jean Louis Blaquier, enseignant en philosophie, Doctorant en psychanalyse. 

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L’affaire du foulard ... la célébration de l’Un, de Dieu contre toute figure du Tiers...

          Et, l’affaire du foulard n’est rien d’autre que le retour prophétisé par Lacan de la religion sous le trait rebelle de l’hystérie dont la quête est plutôt la célébration de l’Un, de Dieu contre toute figure du Tiers. Hystérie de la religion qui met, au nom de l’Autre, tous les Créon au défi de rendre compte d’une cité des hommes plus Juste.

Si Abraham, figure de père réel des trois religions monothéistes est né en Chaldée, l’actuel Irak, à Ur, dans la perspective de la théorie des nœuds borroméens, l’Islam, se situerait en place de troisième rond, celui qui donne consistance symbolique, non pas au Père comme mythe supposé savoir la Loi divine, mais comme mise en « fonction » scripturale (la Loi s’incarne dans le Texte coranique lequel récapitule les précédents : Bible paléo et néo testamentaire) et du coup, légitime les conséquences des deux tabous « laïques » constitutifs de toute société, le meurtre du Père, l’inceste par un lien social politiquement fondé sur la solidarité des frères.

 Le Coran est une théorie du lien social (religieux) qui ordonne, met en place et à sa place chaque intervention divine : la révolution mosaïque (interdit de la représentation), la révolution christique voire paulinienne (universalité de l’impératif de la Loi dont le Père est une variable imaginaire intégrée par le droit coranique (Charia/Fiq) et dans le fond, ouvre en droit, virtuellement un espace d’universalité qui situe la sphère du divin définitivement hors de la logique patriarcale. Cette remarque vraie sur le plan doctrinal celui de la dogmatique théologique s’avère faux selon le contexte historique des régimes politiques où l’Islam a poursuivit la tradition patriarcale monothéiste, aliénants en ce qui concerne la condition féminine, interdite de visibilité sociale, politique, absente de tout magistère. Une heureuse exception qui se propagera avec l’extension de l’éducation, en Chine, des femmes imams!

            Seconde aporie peu commentée, Raul Hilberg permet de penser l’intensité de la culpabilité de la politique occidentale entre juifs et chrétiens, musulmans lorsque dans La Destruction des juifs d’Europe l’une des références historiques à Hitler est assortie de l’exposé du fait suivant : « La conférence anglo-américaine des Bermudes fut un forum de débats inutiles… Au cours des mois qui suivirent , deux plans de sauvetages avortés furent examinés à Londres et à Washington. Le gouvernement britannique, par l’entremise de la délégation suisse de Berlin, proposa de laisser entrer en Palestine 5000 enfants juifs en provenance du Gouvernement général et des territoires de l’Est occupés. Le ministère allemand des Affaires étrangères accepta de remettre les enfants à la Grande Bretagne en échange des prisonniers allemands. Les Britanniques refusèrent de libérer des Allemands en arguant que les enfants en question n’étaient pas des ressortissants de l’empire britannique. »

 Sans foi ni loi, autre que celle de l’exception devenue la règle (Carl Schmitt), les nazis ont risqué le passage à l’acte de l’inhumain au cœur de l’humain. Le crime nazi d’avoir visé le principe de la filiation, «les fils d’Israel en tant que fils », a tenté la destruction de la limite absolue entre l’humain et l’animal : l’homo religiosus. Au-delà du juif, ce crime rend l’humanité étrangère à elle-même. Ce que A. Arendt expose comme la banalité du Mal concerne la base de la croyance dès lors qu’elle stigmatise un pôle phobique du Mal comme peur de l’Autre (communauté) qui vient… Du coup, ce qui définit d’emblée l’obscénité réelle, la pornographie virtuelle à la racine de toute croyance, c’est la stupeur, version primitive de la stupidité, de l’impératif territorial de l’animal « pauvre en monde ». (Heidegger), véritable degré zéro de la croyance. Traiter l’autre, l’autre homme en animal reste obscène pour l’humain, pour l’animal, tant la confusion des genres ouvre politiquement la voie à toutes le traitements zoologiques de domestication des hommes. Il est indécent que l’instrumentalisation politique de l’antisémitisme ou de la Shoah, puisse cautionner, le maintien de l’un des plus grands camps où la « vie nue » devient l’exemple de l’extrême « prolétarisation subjective » (Legendre) à Gaza ou en Cisjordanie (encore nommée par la métahistoire : Judée).

Remarque préalable, dans le vocabulaire anthropologique, l’holocauste est un sacrifice dont le sens est partagé par le bourreau, la victime, le public. La croyance s'y trouve sollicitée. La « Shoah » (en hébreux signifie « catastrophe insensée, imprévisible) est un sacrifice fou, absurde qui n'ayant aucun sens met en acte un nihilisme de masse pur... un "crime généalogique" (Legendre),  un "abîme insondable" (Agamben), un Réel au-delà de lui-même (Lacan) . Dans le délire révisionniste, a fortiori, du négationnisme, même la trace du déchet, du reste, les nazis ont tenté de l'effacer!  La racine généalogique de ce crime de masse a visé la "solution finale" du peuple juif comme Peuple de Moïse, « ce grand homme » selon Freud, ce juif athée. L'œuvre noire, exterminatrice des meutes nazies, forte de son intégrisme païen devenu religion du Pire, faute du Père (le « sang », le « sol »), était de liquider, de zigouiller toutes manifestations de foi au nom de l'Autre, jusqu'au "musulman".

Le "musulman" n'est pas l'aporie centrale d'Auschwitz mais son aporie terminale. Ce qui nous reste à faire depuis Auschwitz, depuis ce qui reste d'Auschwitz, c'est de reconnaître en Jérusalem, ville qui n’appartient à aucune Nation, la capitale définitive du nouage théologique des trois Textes, des trois grands prophètes, des trois grandes multitudes qui irriguent, unifient la mondialité géopolitique, l’éthique géophilosophique des étrangers.

 Jérusalem, après Thèbes, Athènes, Rome, la Mecque, est la grande « ville-monde » qui en reliant les Trois Livres, les trois Peuples du Livre, les trois feuillets d’Abraham, est non seulement le lieu saint, sacré qui noue le "Saint des Saints"  en ce qui concerne  la mémoire juive mais cette incroyable « ville-monde », icône vivante des religions du Livre.

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