Pratiques
matérielles, pratiques spirituelles des hommes.
Ce processus d’unification ne peut se confondre avec ce que l’on redoute
tant, et que Henri Corbin inscrit au cœur du paradoxe du monothéisme : la
pente entropique du totalitarisme, la volonté encore nihiliste d’écraser,
d’uniformiser, sous l’Un infigurable et transcendant le multiple, les
multitudes, ces communautés quelconques qui viennent et que personne
n’attend. Legendre dans tout son enseignement étudie la fonction, la nature,
le champ, le dispositif, les montages "dogmatiques" de ce qui
s’institue dans l’humain dans ce qui s’agence du rapport du Désir à la
Loi. Cela éclaire autant les pratiques matérielles que les pratiques
spirituelles des hommes. Le désir s’en remet le plus souvent à l'ordre
inconscient du symbolique, à la Loi que vectorialise l'imaginaire, au statut de
la condition imaginale des hommes. Tel est l'enjeu, inlassable celui
d'humaniser, sans fin contre deux caps régressifs qui menace par ce qui,
justement de la place de l’autre, de Dieu, est refoulé, dénié, forclos.
L’oubli de cette question immémoriale, celle de la Référence se payera
d’un retour de la Horde, des meutes guerrières.
N’ayons
aucune illusion sous le versant archaïque de la "bête" voici venu le
versant ultramoderne du robot...
Vers
une conclusion en chantier ouvert.
L’ordre
non philosophique, et antiphilosophique de la croyance réside dans cette
dimension, « hors représentation » du réel. Tel est le véritable
opposé structural du «hors temps » fantastique des mythes religieux où
l’immémorial se mire et se réfère comme simple version laïque de
l’Universel. Le miroir de Dieu est double ; autant témoin citoyen de
l’Unique (avec ou sans propriété!) qu’expression authentique de ce qui du
monothéisme en son culte pur est conversion monothéiste. En fait, la débilité
du « croire » peut aussi coïncider avec la myopie politique légendaire
des philosophes : Platon mis en esclavage, Socrate mis à mort par une démocratie
décadente, Heidegger qui n’entend pas rouler les wagons plombés. Par contre,
le délire (révisonnisme ou négationnisme) est un cas de perversion en
politique, tant son ressort sophistique expose autant qu’il creuse le principe
de raison jusqu’à l’au-delà ce qui reste sans raison : la beauté de
la rose des mystiques (Angelus Silecius in Le
Pelerin chérubinique) ou les charniers d’Auschwitz. Impossible
d’oublier que la perfidie des techniciens de la mort de masse a instrumentalisé
l’identité de bourreau et de la victime. »[1].
Ainsi, la pascalienne « folle du logis » déploie-elle des ruses
infinies pour déjouer le sanctuaire de l’« imaginal », la
dimension sacrée du Tiers que constitue l’image à l’échelle sans nom des
institutions dite « internationales » ?
Les
aléas de la croyance qui, de l’angoisse devant l’Autre ou le Rien, témoignent
de toute façon que le sujet confronté au néant qui le divise, nuage
originaire du refoulement, est aussi bien le voyage virtuel de toute conversion
qui, à propos de l’abîme que chaque humain doit habiter vérifie que la
première immigration de l’homme est la subjectivité, le retour à soi
(philosophie) retour à la division signifiante, l’écart de soi à soi
(psychanalyse), à la double division de l’Autre de la Loi, de l’Autre de la
jouissance (psychanalyse). En terme psychanalytique , l’objet de la croyance (« Dieu »)
n’est rien d’autre que la célébration de l’objet perdu (La Mère, donc
le Père, et l’au-delà du genre humain qui ne s’est pas crée lui-même!
Dieu qui n’est pas le père mais le pur invisible de la loi visible.?)
Méditons
un poète, Jabès vérifiant, par d’autres voies, la parole des prophètes :
"la réponse tue, seule la question sauve".
La croyance serait une réponse qui refermerait toute question tandis que
la foi est l'énergie de l'ouverture à
vivre, aux autres, au monde via la Référence invisible, indicible, innommable
dont les trois « feuillets d’Abraham » (Thora, Évangiles,
Coran) ne seraient de l’Universel qu’une traduction, promise à
l’entreprise de la sécularisation désormais mondiale.
Avec
l’inventeur de la psychanalyse, le découvreur de l’inconscient,
l’arpenteur de la science des rêves, Freud, nous sommes au milieu de notre
interrogation sur la croyance : là où se cherche, pour un hypothétique
point d’Archimède, le rêve, là réside, la théorie de la sublimation,
orgue et cœur de toute croyance où se décide la logique du pire et du
meilleur du destin pulsionnel de ce qui fonde l’Appel à l’Autre des
religions.
Freud,
dans son chef d’œuvre testamentaire : Moïse
et le monothéisme, soutient qu’il y a une « part de vérité dans
la religion » : vérité historique bordée d’une dimension immatérielle?
Vérité de la « consistance » du signifiant (Lacan) ? Des « noms
de l’histoire » Deleuze? La logique du (non) sens est aussi une superbe
introduction la question de la Différence et de la Répétition en ce qui
concerne l’Urstaat, Abraham, le Père
confidentiel des trois religions qui ne cesse de structurer la césure laïque
des mille plateaux des multitudes sociales où
et politique se distribue les grandes réserves symboliques, imaginaires
et réelles de ce qui nouent les individus, les procès de subjectivation aux
ficelles des institutions nationales ou internationales.
Vers
la page 13 La
question de l’Être.
|