° Rubrique Aide aux dissertations de philosophie

Thèmes: L’individu / Le droit / La morale

FAUT-IL RESPECTER LES LOIS ?
 

Une dissertation rédigée, par Charles Pépin, professeur agrégé de philosophie


Copyright, Flammarion 2006, chapitre extrait du livre «une semaine de philosophie»
 

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Introduction (analyses initiales et problématisation

accroche C’est parce que le mal existe que les lois sont nécessaires. La référence à la bonté naturelle des hommes – que la société aurait pervertie – est d’ailleurs le seul argument sérieux des anarchistes qui défendent l’absence totale de lois. Si, en revanche, nous pensons que le mal est une réalité humaine, qu’il existera toujours des individus menaçant la vie des autres ou l’équilibre de la société, alors il faut des lois pour dire les règles communes, ce qu’encourent ceux qui les violent. = définition de la loi : une règle organisant la vie ensemble + la sanction prévue en cas de désobéissance, où l’on voit donc déjà qu’une loi au sens juridique n’est pas une loi au sens moral, la loi au sens moral étant universelle et non simplement générale comme la loi au sens juridique, la loi au sens moral ne s’accompagnant pas d’un pouvoir de sanction puisque c’est ma volonté seule qui doit être à l’origine de l’action morale, non la crainte de la sanction Et il faut un pouvoir pour leur imposer ces sanctions. 

Mais ce n’est pas simplement parce que le mal existe qu’il faut des lois. C’est aussi, et peut-être surtout, parce que la vengeance est la réaction naturelle de l’homme au mal qui lui est fait. 
Dans le monde d’avant les lois, hypothétique mais parfois nommé « état de nature », les hommes s’affrontaient sans relâche pour imposer leur « loi » : la « loi » du plus fort. Mais le plus fort n’était jamais assuré de rester le plus fort, jamais à l’abri de la vengeance d’un « faible » ; il avait peur lui aussi. Une vengeance en appelait une autre, sans aucun souci de proportion, sans espoir d’apaisement. 
Les lois, en prévoyant la sanction que la société réserve au criminel, ont vocation à mettre un terme au cycle inépuisable de la vengeance . Le respect des lois serait donc la preuve de la civilisation de nos pulsions, et plus particulièrement de notre arrachement à cette logique de la vengeance qui est notre triste privilège – a-t-on jamais vu, en effet, un animal se venger? Il faudrait alors, pour s’arracher à cette violence primitive, respecter les lois.
Pourtant, nombreux furent en Allemagne les nazis, ou en France les collaborateurs, qui invoquèrent le respect des lois pour justifier leurs actes. Ils n’ont fait « qu’obéir aux lois » : telle fut souvent, à l’heure de leurs procès, leur seule défense. Si le respect, ou en tout cas l’obéissance aux lois, [ distinction conceptuelle respecter les lois / obéir aux lois, que vous devez expliciter en intro, cf note 2] peut être le moyen de s’arracher à la violence primitive, il peut donc être aussi le prétexte d’une collaboration à la barbarie moderne.
Tout aussi ambiguë, la désobéissance aux lois peut exprimer parfois un comportement citoyen. En 1968, Martin Luther King a été emprisonné pour avoir manifesté contre des lois racistes. Depuis, les rebelles d'Amérique ou d'ailleurs se réclament souvent de lui pour justifier une désobéissance aux lois qui, parfois, n’exprime rien d’autre que leur incivisme. Probablement n'ont-ils pas lu sa " Lettre de la geôle de Birmingham" : " je ne recommande en aucune façon d'enfreindre ou de défier la loi ( … ). Cela conduirait à l'anarchie. Celui qui viole une loi injuste doit agir ouvertement, avec amour (…) et accepter volontairement le châtiment qu'il encourt. Je soutiens que quiconque enfreint une loi parce que sa conscience la tient pour injuste, puis accepte volontairement une peine de prison afin de soulever la conscience sociale contre cette injustice, affiche en réalité un respect supérieur pour le droit ". 
Voilà qui ne facilite pas notre réflexion. 

Énoncé d’un paradoxe, visant à montrer que la question se pose: D'un côté, l'obéissance aux lois peut nous rendre complice de crime contre l'humanité.
De l'autre, la désobéissance peut révéler un amour supérieur du droit, et donc de la société.
Faut-il alors respecter les lois ? Suffirait-il, pour répondre, de distinguer les bonnes lois de celles que nous devons combattre ? 
Lorsque nous estimons que la loi de Vichy enjoignant les juifs à porter l’étoile jaune est une loi mauvaise, c’est au nom de la morale que nous la refusons. Mais la morale peut elle vraiment nous dire ce qu’est une « bonne loi » ? La loi française imposant de raccompagner à la frontière des clandestins vivant en France depuis des années et n’ayant pas d’attache dans leur pays d’origine est-elle une « bonne loi » ? Qu’est-ce même qu’une «bonne loi»? Celle qui, en Californie, condamne l’auteur d’un crime de sang à la peine de mort ou celle qui, en France, le condamne à une peine de seize ans, rendant possible son rachat mais aussi sa récidive ? Ces exemples le montrent déjà: la morale peut nous souffler parfois qu’une loi est mauvaise, mais elle est impuissante à dire qu’une loi est bonne. Parfois aussi, elle semble congédiée, balayée par l’obéissance aux lois. Les allemands, qui étaient loin d’être tous antisémites et respectaient les excellentes lois humanistes de la République de Weimar, ont respecté tout autant les lois nazies qui les ont remplacées. Pourquoi ? 

C’est peut-être qu’il n’y a pas que les lois qui sont bonnes ou mauvaises, mais aussi notre façon de les respecter ou de les refuser… Peut-être ces allemands avaient-ils une mauvaise façon d’obéir aux lois de Weimar, expliquant qu’ils n’aient pas su, ensuite, désobéir … Si, donc, c’est une question de manière, ou d’attitude, la question devient alors : comment devons nous respecter les lois ? Automatiquement, en « bon citoyen » qui applique les lois démocratiques de son pays ? Mais alors qu’est-ce qui nous distinguera de ces allemands qui ont obéi, dans un même « réflexe citoyen », aux lois de Weimar puis à celles du nazisme ? Explicitation de la problématique, ici simplement suggérée, mais qui doit être posée clairement au concours : faut-il simplement obéir aux lois, les appliquer automatiquement ou au contraire toujours essayer d’y réfléchir pour savoir si elles sont ou non respectables ? Autrement dit (problématique justifiée, assise sur une distinction conceptuelle) : faut-il simplement appliquer les lois ou véritablement les respecter, ce qui pourrait alors impliquer que nous sachions aussi parfois désobéir ?

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