3) L'identité
refondée
Cet horizon
de l'homme parfait ou à parfaire ne nous rend pas seulement
le progrès, ce progrès en lequel nous n'avions plus
confiance depuis les années soixante-dix. Il nous rend aussi
l'identité, car la purification se fait dans nos gènes.
Impurs ils font de nous des êtres incomplets, imparfaits,
incapables. Améliorés et purifiés nous devenons complets,
parfaits et capables. Notre réalité est dans nos gènes.
Notre identité aussi.
Cette
esquisse d'ange, de surhomme, est également développée
par les écologistes de Biosphère II. Le biosphérien -
c'est-à-dire celui qui habite Biosphère II - est le modèle
de l'homme futur. Il doit savoir tout faire. Toutes les tâches
intellectuelles et toutes les tâches manuelles. Il doit être
jardinier et botaniste, cuisinier et chercheur, analyste des
systèmes écologiques et orateur ou écrivain; informaticien
et gestionnaire. Et on en passe (22). « Idéalement, dit un
biosphérien,
je suis prêt à
n'importe quoi, j' espère» (23). Biosphère II est donc «
l'ultime expérience humaine» (24). C'est le nouveau
paradigme de l'humanité (2S) qui parviendra, par ses voyages
sidéraux, à l'immortalité génétique des espèces
vivantes, puisque nous sommes tous enfants du soleil, comme le
rappellent les anciennes religions.
Identité
réassurée par le bond en avant de l'utopie, d'une utopie mâtinée
de science-fiction. Où l'on voit comment aux questions
essentielles que se posent, troublés, les humains de notre
temps, il est alors répondu par les utopies concrètes du
projet Génome et de Biosphère II, comme de l'Artificial
life. Et Villiers de L'Isle-Adam, le prophète, n'avait
pas dit autre chose. Là où Hadaly, la belle, mystérieuse et
séduisante sirène, nous parle encore en un murmure venu du
fond des eaux: «Je suis en toi, tu es en moi. Nous sommes
toi et moi enlacés, fusionnés en un horizon indépassable où
technique et nature ne font plus jamais qu'un».
Lucien SFEZ
Professeur de Science politique Université Paris l - Panthéon-Sorbonne
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(22)
Voir Vladimir Vemadski, The Biosphere, op. cit., chapitre
X.
(23)Il se nomme Bernard Zabel, voir Ibid, p. 144
(24) Ibid., p. 153.
(25) Voir la préface de John Allen et Mark Nelson, Space
Biospheres, Santa Fe, Synergetic Press, 1986.
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Bibliographie
Problèmes de la réforme de l'État en France
depuis 1934 (en collaboration avec Jean Gicquel), Paris,
PUF, 1965. Essai sur la contribution du doyen Hauriou au
droit administratif français, Paris, Librairie Générale
de Droit et de Jurisprudence, 1966.
L'Administration prospective, Paris, Armand Colin,
1970.
Institutions politiques et droit constitutionnel (en
collaboration avec André Hauriou), Paris, Montchrestien,
1970. Critique de la décision, Paris, Presses de la
Fondation Nationale des Sciences Politiques, 1973.
L'Enfer et le paradis. Critique de la théologie politique,
Paris, PUF, 1978 (réédité sous le titre La Politique
symbolique, Paris, PUF, 1993).
Je reviendrai des terres nouvelles. L'État, la fête et la
violence, Paris, Hachette, 1980.
La Décision, Paris, PUF, « Que sais-je? », 1984.
Leçons sur l'égalité, Paris, Presses de la Fondation
Nationale des Sciences Politiques, 1984.
La Symbolique politique, Paris, PUF, « Que sais-je?
», 1988.
L'Égalité, Paris, PUF, « Que sais-je? »,1989.
Critique de la communication, Paris, Seuil, 1990.
La Communication, Paris, PUF, (, Que sais-je? »,1991.
Le Message du simple (en collaboration avec Pierre
Christin et Annie Gœtzinger), Paris, Seuil, 1994.
La Santé parfaite. Critique d'une nouvelle utopie, Paris,
Seuil, 1995.
Le Rêve biotechnologique, Paris, PUF, « Que sais-je?
», 2001.
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