° Rubrique littérature http://www.philagora.net/frindex.php

Jean Giraudoux Electre

Rubrique Giraudoux  Electre
 

Electre 

et les anciens

1) De quoi s'agit-il? 
2) Une fille impossible 
3) Sur la piste de la haine
4) Des complications psychanalytiques
5) Championne de la vérité 
6) Vive la vérité?
7) L'oncle Egisthe!  
8) et... tous les autres
9) Electre et les Anciens
10) Clins d'oeil
12) Symbolisme- manifestation du divin
13) Ce qu'on dit d'elle/Ce qu'elle dit                   
14) Qui est Electre?
15) La ménagère de la vérité 
16) Une femme à histoires   

Tout le monde grec connaissait les malheurs d'Agamemnon évoqués dans l'Odyssée vers le Xème siècle avant Jésus-Christ, les Athéniens plus que les autres puisque depuis le VIème siècle av. J.C. les épopées homériques (l'Iliade et L'Odyssée) sont consignées par écrit et servent de base à leur éducation. Au V ème siècle av. J.C. le thème est traité par les trois grands auteurs tragiques athéniens: Eschyle, Sophocle et Euripide. L'intérêt réside dans la façon dont chacun présente la réalisation d'une destinée bien connue.

I . L'ACTION

Eschyle la développe en continu dans une suite de trois pièces -une trilogie- où les spectateurs voient successivement l'assassinat dans Agamemnon, la vengeance dans les Choéphores, la poursuite d'Oreste parricide dans les Euménides.
Voyons la pièce de la vengeance les Choéphores. Le frère rentrant d'exil et la soeur humiliée par les maîtres d'Argos s'y reconnaissent devant le tombeau de leur père. Après l'avoir longuement honoré et supplié il décide de la vengeance. Le jeune homme se présente au palais en étranger, prétendument chargé d'annoncer la mort d'Oreste. Clytemnestre feignant un grand deuil envoie aussitôt chercher Egisthe. Oreste le tue, il frappe ensuite sa mère, qui n'a pas réussi à l'émouvoir. bientôt les Erinyes apparaissent à Oreste épouvanté.

Sophocle a écrit une Electre. Oreste vient au palais d'Argos pour y apporter les restes du jeune prince mort dit-il accidentellement. Il se fait reconnaître par Electre ravalée à l'état de servante qui remâche ses chagrins et ses rancoeurs malgré les conseils de soumission que lui prodigue sa soeur Chrysothémis. D'âpres discussions l'opposent aussi à sa mère. Oreste tue d'abord Clytemnestre puis Egisthe, qu'il a facilement dupés. Ainsi le meurtre est effacé.

Euripide nous a laissé quatre pièces sur les Atrides (dont l'Iphigénie qui inspirera Racine). Son Electre accueille Oreste qu'elle n'a pas reconnu, dans la demeure de son époux, le bouvier que lui a imposé Egisthe. C'est un homme juste qui respecte sa dignité de princesse et l'a laissée vierge. Un vieux serviteur, averti par ses soins, atteste l'identité d'Oreste et lui indique comment tuer Egisthe dans sa maison de campagne, ce qu'il réalise bientôt. Electre attire Clytemnestre chez elle. Malgré sa répugnance Oreste la tue en se couvrant les yeux de son manteau. Le parricide du frère et de la soeur sera pardonné par les dieux après une pénitence.

Nous saisissons ce que Giraudoux a modifié dans la tenue de l'action en accordant le rôle essentiel à Electre et en lui assignant la tâche d'élucider la mort de son père (Il utilise le procédé traditionnel du songe pour la mettre sur la voie). Supposait-il, pour oser la présenter en énigme, que ses spectateurs ignoraient l'histoire? Il a au contraire accepté la gageure de les intéresser malgré ce handicap. Avoir transformé une vendetta en quête de la vérité, ce n'est pas mal!
L'incognito d'Oreste et l'utilisation de la ruse, ressorts essentiels chez nos trois Anciens sont devenus inutiles. Sans s'éterniser sur l'identification d'Oreste, Giraudoux en tirera seulement des effets ambigus à propos du mariage d'Electre.
En faisant d'Egisthe le principal adversaire de la jeune fille, il donne à celui qui n'était que le prince consort une importance nouvelle et riche en développements sur l'art de gouverner. Le coup de théâtre de sa conversion est lui aussi une trouvaille à fort contenu dramatique.

II. LES PERSONNAGES

Sur le plan des caractères les traits d'Electre de sa mère et de son frère sont déjà contenus dans les Tragiques. Soulignons pour la défense de Clytemnestre, ces cris de douleur indignée au souvenir du sacrifice de sa fille Iphigénie (relisez la grande scène de la prière d'Iphigénie chez Racine, une merveille!), sa jalousie devant Cassandre la belle captive qu'Agamemnon amène dans le lit conjugal. Tout cela chez Giraudoux est moins appuyé. La noble figure du Bouvier d'Euripide annonce celle de notre Jardinier, avec plus de détermination et moins de poétique sensibilité.

III. LE CHOEUR

Un choeur accompagnait les acteurs qui dialoguaient sur la scène. Ses membres évoluaient devant eux un peu en contre-bas sur une aire ronde -l'orchestra- en commentant par des chants psalmodiés et des mouvements de danse, leurs faits et gestes et la suite des événements. A eux revenait d'amplifier les grands sentiments de crainte ou d'admiration de douleur ou de joie, de haine ou de tendresse, d'exprimer la sagesse du bon sens populaire et d'évoquer les temps légendaires où la réalité se confondait avec le mystère. Chez nos trois anciens c'est un choeur de femmes, servantes, captives ou paysannes qui amenait auprès d'Electre cet élargissement du drame, cette présence populaire et cet affleurement du surnaturel.
Chez Giraudoux, ce sont les Euménides avec leur franc parler effronté et le Mendiant, avec sa clairvoyance et sa haute sagesse, qui assument cela

IV. LE RELIGIEUX

Toute représentation théâtrale en Grèce antique était un acte religieux. Eschyle et Sophocle accordent dans leurs oeuvres une large place aux relations avec les forces divines. Dans les Choéphores du premier et l'Electre du second le rituel funèbre est longuement développé, le meurtre d'Oreste est légitimé par un oracle d'Apollon, un songe alerte Clytemnestre en lui faisant prévoir la vengeance. Euripide réduira la part du surnaturel au bénéfice de la psychologie. Il gagne en simple humanité ce qu'il perd en grandeur.
La pièce de Giraudoux ,où la psychologie semble suffire à expliquer un monde assez bourgeois et où la présence divine se montre sous les traits irrévérencieux des Euménides et du mendiant, est elle porteuse de religieux? Le songe qui révèle à Electre le meurtre et l'adultère, l'illumination qui permet à Egisthe de se révéler comme roi sont dans la tradition des interventions divines, encore qu'elles puissent s'expliquer humainement.
D'une façon plus profonde quand se font jour impérieusement des sentiments comme le devoir filial, le dévouement, le patriotisme, le culte de l'innocence, qui tirent hors de soi-même, on peut penser qu'ils suggèrent un appel transcendant venu d'ailleurs.

Aller à la page 10 FIN quelques clins d'oeil  

Aller à Giraudoux/index pour lire les autres pages sur Electre

° Rubrique littérature http://www.philagora.net/frindex.php

2010 ©Philagora tous droits réservés Publicité Recherche d'emploi
Contact Francophonie Revue Pôle Internationnal
Pourquoi ce site? A la découverte des langues régionales J'aime l'art
Hébergement matériel: Serveur Express