II-
Sur la nature
et sur l'homme:
il est impossible que ce soit des objets scientifiques.
Parler de la
science, de la nature comme
objet scientifique, de l'homme comme
objet scientifique c'est croire naïvement qu'un concept peut
saisir une totalité, c'est confondre le concept (ce avec quoi je
prends une diversité) et l'idée (principe régulateur qui me
permet de penser à une totalité).
La nature
est une idée, ce à quoi rien de sensible ne correspond, tout
comme l'homme: c'est pourquoi les sciences de la nature n'ont pas
la nature pour objet mais ce que des problématiques diverses ont
constitué en objet scientifique. De même les sciences de l'homme
n'ont pas l'homme pour objet car l'homme ne peut être un objet
scientifique puisque l'homme est le résultat d'une pensée. Voilà
pourquoi toutes les sciences de l'homme sont nées d'un déplacement
conceptuel: elles ne pouvaient constituer un savoir qu'à la
condition de produire un objet scientifique et donc de parler
d'autre chose que de l'homme:
-la langue pour la linguistique,
-l'inconscient pour la psychanalyse et l'ethnologie,
-la folie pour la psychiatrie,
-le comportement pour la psychologie,
-le Français moyen pour la sociologie...
Autant dire que
l'homme est le résultat d'une pensée qui apparaît en fonction
d'un champ de croyances propres à un groupe social, à ses intérêts
mais aussi aux aspirations d'une époque.
Si
être c'est se faire, si l'existence précède l'essence, l'homme
se constitue par ses projets.
Les sciences de l'homme devaient donc se détourner de l'homme
pour constituer un savoir sur lui puisqu'il ne peut y avoir de
connaissance de ce qui devient: un acte libre
ne se définit pas il s'accomplit.
Il serait donc préférable
de parler des sciences morales ou sciences humaines, sciences des
conduites qui impliquent l'homme comme être conscient et être
social.
Peut être
suffirait-il de revenir sur une conception a priori de l'homme,
fruit d'une idéologie qui ne peut que fausser la recherche et
faire croire à la mort de l'homme alors que, il
est simplement devenu?
On peut
souscrire pleinement à ce texte de M. Foucault dans Les mots
et les choses (page 391): "Non seulement elles (ethnologie,
psychanalyse) peuvent se passer du concept d'homme, mais elles
ne peuvent pas passer par lui, car elles s'adressent toujours à
ce qui en constitue les limites extérieures."
Peut-on
souscrire à la suite?
"On peut dire ... qu'elles dissolvent
l'homme.", car réduire l'homme à des limites extérieures
ce n'est pas parler de la manière dont il s'accommode de ses
limites, de sa réaction personnelle (Voir Sartre, La
condition humaine *ouverture nouvelle fenêtre). De
plus, derrière le texte de Foucault, à son origine il y a bien
quelqu'un: ce texte à pour origine un homme. Puis-je dire par la
considération de ce texte que cet homme n'existe pas?
"L'homme
est objet pour l'homme, il ne peut pas ne pas l'être. N'est-il
que cela? Le problème est de savoir si nous épuisons dans
l'objectivité sa réalité."
Sartre, Cahiers de philosophie, UNEF-FGEL, N°2-3, Février
1966. Il veut par là signifier que le
morcellement des sciences humaines appelle un dépassement:
il reprend le projet de Platon dans La République, la
dialectique. (Voir Platon,
Le soleil la ligne la caverne *ouverture nouvelle fenêtre) |