Si
les sciences se distinguent par leur objet, leur domaine, elles
trouvent leur unité dans un effort commun pour conquérir non pas
un simple savoir mais une connaissance justifiée, ce qui les
distingue radicalement de l'opinion et de l'expérience simplement
acquise qui transforme le sensible en connaissances.
Toute méthode scientifique
est ordonnée par une visée de l'objectivité: exclure tout ce
qui serait appréciation subjective. Cette visée de l'objectivité,
ce devenir fruit d'une conquête par une suite de rectifications
d'erreurs, implique un double effort:
- Un effort pour
assurer la validité du discours, sa cohérence, comme vérité
formelle, condition de possibilité de toute vérité.
- Un effort pour
assurer la vérité matérielle du discours ou vérité du contenu
par théorie et expérimentation
(* lien en nouvelle fenêtre).
Un tel effort
implique le recours aux principes de la raison et singulièrement
au principe de non-contradiction: d'où le rapport nécessaire à
la logique et aux mathématiques pour toute forme de science
puisqu'elle recherche la non-contradiction de son discours sans
laquelle il ne peut y avoir de vérité et la non-contradiction du
même discours avec l'objet qu'elle étudie. Un
discours vrai doit être bien ajusté à son objet.
Si la science
existe comme science par sa visée essentielle de l'objectivité,
comme rigueur déductive et fécondité inventive, elle s'oriente
vers trois sortes d'objets ce qui amène à distinguer trois types
de sciences.
1 => Les
sciences qui ont pour objet leurs propres constructions:
logique et mathématiques.
2 => Les
sciences qui ont pour objet ce dans quoi la nature est impliquée,
avec la méthode expérimentale qui s'est imposée comme facteur
essentiel de progrès:
On les appelle improprement sciences de la
nature. (Physique, chimie, biologie...)
3 => Les
sciences morales qui ont pour objet ce dans quoi l'homme est
impliqué comme être conscient et être social: les activités
humaines. Les objets sont divers mais tous sont en relation avec
une activité humaine: derrière les objets divers, la
langue, l'inconscient, le mode de production, la parenté, il y a
l'homme; autant d'écarts par rapport à l'homme qui permettent de
produire un savoir sur l'homme.
On peut aussi les appeler sciences humaines.
(Histoire, psychologie, sociologie...)
C'est dire que ce
qui se présente c'est dans tous les cas une multiplicité de
sciences dont la réflexion peut dégager une intention et une
exigence. Dans ces conditions on parlera plutôt des
sciences que de la science.
En effet, pour
ramener les sciences à un modèle unique, il faudrait que préside
à leur naissance la définition d'un objet ou la décision de se
plier à une méthode. Mais on ne trouve rien de cela dans le
processus réel qui instaure une science et la fameuse méthode de
Descartes n'a peut-être jamais amené une découverte.
Un objet
scientifique n'est jamais que ce que produit une problématique
scientifique. "Une science naît de la constitution d'un
corps de concepts avec leurs règles de production"
(Fichant, Maspero, Sur l'histoire des sciences, page
100). C'est dire que les sciences diffèrent dès leur
constitution par leur forme et puis, par leur devenir, ce qui
exclut de les réduire à un modèle unique et simplificateur: la
science. En ce sens on parlera d'un chercheur plutôt que d'un
savant.