A
prendre pour thème les passions, on s'oriente
en fait vers le mécanisme, le déterminisme puisqu'on évacue
avec la conscience tout ce qu'il y a d'humain
au profit du physico-chimique qui ne tarde pas à apparaître
avec ses explications tonitruantes et toujours remises à
demain.
Vie
et passion sont niées au profit d'une suite de théories et
d'expérimentations à l'infini. Se tourner vers les objets
c'est en effet se tourner vers une absence, une ombre projetée
à la place de l'être. Comment un objet méconnu permettra-t-il
jamais de définir un autre objet?.
Parce
que l'existence est passion, parce que la passion est ce qui se
supporte, la passion a sa raison d'être en soi tout comme
l'absolu.
Dire que la passion est un attachement exacerbé qui oriente la
personnalité et le comportement d'un sujet, c'est mettre la
charrue avant les boeufs et se préparer à rendre les armes
devant une biologie des passions (celle de l'époque ...) ou
devant la dernière mouture d'une philosophie de l'histoire,
d'un grand vent métaphysique, au gré de l'explication réductrice
ou de l'interprétation infinie.
Reconnaître
à la passion une forme spécifique, c'est au contraire lui
reconnaître la subjectivité qui est vérité et liberté.
C'est du même coup accorder qu'une existence authentiquement
humaine est passion d'un individu : cela
revient à faire place à l'individu, le soi qui ne peut échapper
à soi, qui agit à la mesure de ce qu'il souffre, à sa mesure.
La
passion serait la forme subjective de l'absolu, au fondement de
la puissance sans laquelle il n'y aurait ni volonté ni activité
humaine. C''est dans la donation originelle que s'origine toute
donation, comme un rapport se rapportant à lui même, seul et
unique.
Parce
que l'existence est toujours en avant d'elle même selon
un axe de transcendance ouvert par la conscience désirante,
parce que cet acte ne peut exister que par une passion
fondamentale, le soi, sans lequel il serait impossible d'être
en avant de soi, parce que le soi ne peut être que présence à
soi de ce qui se supporte soi même.
La
forme pure de la passion sera la forme de la subjectivité en
qui l'existence est passion, dans la plénitude de l'être |