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Jean
COCTEAU
LA
MACHINE INFERNALE
Cet
Oedipe, objet de tant d'amour, auquel une reine sacrifie sa réputation et sa vie,
QUEL EST-IL?
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Écoutons d'abord la Voix du
Prologue, elle nous livre, dans son récit anticipé, quelques éclairages sur le
personnage, au moins pour sa jeunesse:
Sa réaction à la révélation de l'oracle: "il faut fuir... la crainte du parricide et de l'inceste...",
nous donne l'image d'un homme respectueux des dieux et de l'ordre moral. Dans cette
même optique, nous le verrons, au troisième acte , profondément choqué par l'idée de
"tuer!" (cela, il est vrai, d'autant plus qu'il s'agit d'un infanticide
perpétré par la mère)
Mais "il est "jeune,
enthousiaste", "la curiosité, l'ambition le dévorent".
Voici donc un gagneur.
Comment va-t-il concilier ses
désirs et ses principes?
Lorsque, par malchance, il blesse mortellement un voyageur,
"il a vite oublié cet accident", que nous
appellerions volontiers un meurtre!
Après sa réussite et son accession au trône, nous
apprenons que "le peuple aime son roi".
Lorsque l'épidémie de peste oblige à une enquête, il nous est dit que "de recherche en recherche, et comme enivré de malheur, Oedipe arrive
au pied du mur" (qui fait l'enquête? nous le saurons plus tard), et
qu'il se crève les yeux, avec la broche d'or de Jocaste qui elle, s'est pendue. ( ces
renseignements, mise à part sa popularité, ne nous le font pas mieux connaître.)
Au cours de la pièce elle-même, il
nous apparaît en trois circonstances fort différentes: d'abord, lorsqu'il se mesure avec
le Sphinx, puis au cours de sa nuit de noces avec Jocaste, et enfin, dix sept ans plus
tard, lorsque se découvre tout le drame de son destin.
Nous voyons un jeune garçon, puis un homme
mûr. Face au Sphinx, agit-il en héros? Auprès de son épouse, se comporte-t-il en
amant? Quand fond sur lui l'horrible, assume-t-il l'épreuve en homme?
C'est un gagneur, disions-nous, c'est
à dire un orgueilleux et un battant. Nous allons voir comment ce trait dominant de
son caractère marque sa conduite, ses jugements et ses réactions.
La Rencontre d'Oedipe et
du Sphinx
a lieu au Second Acte.
Dès ses premiers mots avec le Sphinx, qui
surgit devant lui sous l'aspect d'une jeune fille, il tient à avoir le dessus:
Non! il n'a pas été effrayé par son
apparition inattendue, bien sûr, il a vite compris qu'il ne s'agissait pas du Sphinx (!!)
, du reste, il n'aurait pas peur de lui. La présence d'une jeune fille dans les parages
du monstre ne peut être motivée, affirme-t-il, que par la curiosité, et comme il ne se
résigne pas à admettre que sa perspicacité fait ici fausse route, il invente à son
erreur des excuses flatteuses: "il
me paraissait si merveilleux de trouver, chez une jeune fille, un émule digne de moi!"
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Ces fanfaronnades de jeune coq sont
bien celles du gamin qu'est encore Oedipe.
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Mais ses ambitions vont bien plus loin,
"je rêvais de gloire", déclare-t-il sans fausse modestie.
La gloire! il essaie de la définir: "j'aime les foules qui piétinent, les
trompettes, les oriflammes qui claquent, les palmes qu'on agite, le soleil, l'or, la
pourpre, le bonheur, la chance, vivre enfin!"
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Le moyen de réaliser ce rêve, il le tient:
"A Thèbes, le peuple cherche
un homme. Si je tue le Sphinx, je serai cet homme. La reine Jocaste est veuve, je
l'épouserai". Et peu importe
l'âge de cette reine.
Il est sûr de lui, "je tenterai ma chance... lorsque j'aurai tué la
bête...". Le Sphinx ne
triomphera pas de lui comme il l'a fait des "garnements de Thèbes", car il est "l'élève des meilleurs lettrés de Corinthe" et il saura répondre à l'interrogatoire de ce "monstre naïf".
Vers la
page suivante: Oedipe Rien ne
l'arrêtera dans sa course vers la réussite.
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