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PHILOSOPHIE - CLASSES PREPAS par J. Llapasset

La recherche du bonheur

Tchekhov 

Oncle Vania

Acte II - "Quelle maudite philosophie vous entrave " (pages 38 à 40)  

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= "Vous c'est à cause de lui; moi à cause de moi-même".
On peut comprendre que Helena peut toujours échapper à Sérébriakhov ne serait-ce qu'en le quittant pour répondre aux pressions de Vania qui n'hésite pas à jouer sur le chantage.
Vania ne peut échapper à soi et trouve la source de son malheur dans sa lucidité, dans la considération de soi: il est fâché avec lui même et son drame vient de ce que le soi ne peut échapper à soi.
Le spectateur est sollicité, il est orienté vers la suite et invité à anticiper: en aimant Vania, Helena le réconciliera avec lui même puisqu'elle lui prouvera qu'il est digne d'être aimé.
"Réconciliez moi d'abord avec moi même..." et je serai l'artisan de paix que vous me demandez d'être. Tant que je serai torturé par ce que mon regard lucide me révèle sur moi même, il est impossible de satisfaire votre désir de paix. Comment pourrais-je communiquer la paix si je ne l'ai pas.
On retrouve ici une caractéristique de Vania: il n'hésite pas à exercer un chantage. Par là il torture Helena en lui promettant ce qu'elle désire à la condition qu'elle devienne infidèle. Elle aura cette paix si elle ne suit pas son devoir!

- "Ma vie est perdue sans retour... ce que j'éprouve se perd pour rien comme un rayon de soleil qui tomberait dans un trou.".
L'amour que Vania porte à Helena pourrait transfigurer sa vie comme un trait de lumière qui éclairerait et réchaufferait, mais il tombe dans un trou tant qu'il n'est pas partagé. Là encore Vania sollicite Helena à être auxiliaire de la lumière au prix d'une infidélité! Le thème de l'amour non partagé apparaît encore: une lumière qui se perd, une autre vie qui se perd.

= Après le chantage que Helena écarte, il reste toujours dans la stratégie de Vania la possibilité de jouer sur cette recherche du bonheur qui ne quitte jamais l'âme et l'imagination.
La belle est en train de perdre,elle aussi, sa vie, entravée, comme une bête qui ne peut avancer, par une morale en laquelle personne ne croit plus. Qu'elle saisisse donc le sens de ce qui se passe et, en se sauvant, en donnant à sa vie le sens de la lumière et de l'amour, elle sauvera aussi Oncle Vania.
Mais celle qu'il désire ne le désire pas et l'estime , ou l'affectueuse amitié, ce n'est pas de l'amour.
Jaillit alors le cri du coeur qui cloue Vania à son malheur tout en lui rappelant l'état dans lequel il se trouve: "Je m'ennuie avec vous." Comment pourrais-je recevoir de vous autre chose que cet ennui qui vous transit.

= La recherche du bonheur se noie dans le désir: ou bien l'amour est partagé et Vania ne désirera plus Helena car son amour est nourrit d'un fantasme et non de la réalité qu'il a en face de lui; ou bien l'amour n'est pas partagé et la misère habite le malheureux. Comment le désir qui affirme l'infini pourrait-il être satisfait par l'avoir de quelqu'un qui se donne? Comment cette dignité de la liberté ne serait-elle pas dégoûtée par le divertissement et singulièrement par cette toute relative amélioration de la vie apportée par l'alcool? Comment la dignité pourrait-elle ne pas être écoeurée par la dépendance, l'aliénation à la boisson?
On comprend mieux que Helena déclare en mettant fin à la rencontre: "C'est dégoûtant à la fin."