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PHILOSOPHIE - CLASSES PREPAS par J. Llapasset

La recherche du bonheur

 La voie studieuse des cours:  De la recherche 

  • Le chercheur d’or (Jean Marie Le Clézio) 
    La vie heureuse suivie de La brièveté de la vie (Sénèque) - (Traduction de François Rosso - Editions Arléa).
    Oncle Vania (Anton Tchékhov) (Traduction d’André Markowicz et Françoise Morvan - Editions Actes Sud Babel).

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De la recherche

=> C'est l'action de pousser vers, dans la même direction, continûment, avec application. Une action raisonnable, intelligente, orientée vers une fin que l'on veut obtenir.
Ne confondons pas: le chercheur d'or (Le Clézio) , il cherche un trésor sans savoir si l'or peut apporter le bonheur, si cela vaut le coup, si cela importe vraiment ou même si le trésor existe là où on le cherche! Mais dans la recherche du bonheur, on s'interroge sur se conditions, sur sa possibilité, sur les moyens pour obtenir ce bonheur que l'on prend pour fin. Le chercheur d'or sera déçu.

La recherche implique donc une enquête sur ce que cela pourrait être que le bonheur, sur ce que devraient être ses caractères essentiels pour que ce soit un bonheur: plénitude, par exemple. Le bonheur sera-t-il donné comme le trésor caché dans l'extériorité ou est-il à conquérir au fond de soi? S'agit-il de la recherche de son propre bonheur qui devient la fin suprême, ce qui transforme l'autre en obstacle ou en simple moyen et fait éclater la morale, ou s'agit-il de la recherche d'un bonheur partagé comme dans l'amour? Ou encore s'agit-il d'un bonheur d'exercer une liberté totale pour peu qu'on la limite à ce qui dépend vraiment de nous? (=> Stoïcisme de Sénèque)

Peut-on déterminer un concept du bonheur? Le déclarer indéterminable reviendrait à lui refuser un contenu universel et nous interdirait de savoir ce que cela est que le bonheur: ce ne serait plus qu'un idéal de l'imagination... Si la recherche exige une enquête, un raisonnement vigilant qui unit étroitement la raison et l'observation,sur quoi s'exercera ce raisonnement vigilant?

=> Tout un chacun aspire au bonheur et le cherche. Ce faisant chacun met sous le terme bonheur ce qu'il imagine et c'est bien l'imagination qui étend la mesure du possible et affole le désir. Chercher le bonheur revient donc ici à chercher ce qui n'est pas possible et chercher ce qui n'est pas possible c'est courir à l'échec et perdre son temps. Ainsi les personnages de Tchékhov sont bien vite repris par l'ordre du monde et par l'ennui ou par cette solitude qu'ils voulaient briser. Ainsi chercher le bonheur c'est se condamner à l'errance car, selon l'affirmation de Rimbaud, la vraie vie est ailleurs.
Mais cet ailleurs ce peut être dans un paradis imaginé, (=> La fin de oncle Vania) ce peut être en soi et par soi  comme raison et intelligence (=> Stoïcisme, Sénèque) ou au fond de soi dans l'absolu du sentiment, dans l'amour (Le Clézio). Le paradis, on ne peut ni le chercher ni le rechercher sur terre.

=> Peut seule prétendre tenter d'obtenir une fin sans perdre son temps, une recherche consciente de soi:
- éclairée par: la raison (c'est possible comme non contradictoire), l'intelligence comme pouvoir d'utiliser des moyens (ou de les inventer s'ils ne sont pas disponibles) pour obtenir une fin.
- mue par la volonté, qui reprend un désir grâce au pouvoir d'attention par quoi se mesure effectivement notre degré de liberté.
Au prix de la mobilisation "en synergie" de
ces trois facultés, (raison , intelligence, volonté) chercher  se trouve transfiguré en rechercher: une recherche pleinement humaine.
Cela suppose la foi en l'acte de philosopher, ce retour sur ce qui est simplement vécu qui élève la simple existence au rang d'existence pleinement humaine- par la pensée. Dans les trois oeuvres il faudra donc aussi étudier le degré de mobilisation de ces trois facultés sans lesquelles on est semblable à l'homme égaré qui ne sait où il va ,parce qu'il cherche et ne recherche pas.

Cela ne doit pas nous conduire à ignorer les contestations de la philosophie qui fusent jusque dans Sénèque mais aussi dans l'ironie de Tchékhov qui fait proférer des paroles de philosophes aux personnages qui pensent le moins. Cependant à  ignorer la philosophie on risque d'échouer avant même de commencer ou au moment où on commence ce qui est le lot des personnages de Tchékhov. on risque le ridicule de vouloir une harmonie entre le stoïcisme et l'épicurisme pour jouer sur les deux tableaux et ce ridicule guette Sénèque. On risque parfois le tragique (=> Le Clézio) de parier sur la parole et le chant pour donner l'existence à une non-existence.