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PHILOSOPHIE - CLASSES PREPAS par J. Llapasset

La recherche du bonheur

Comprendre Le Clézio.  Une finalité circulaire provisoire si le cadre et la peinture sont minés par la nature et par le temps. (lignes 20 à ... "Je regrette d'être sorti pour entendre la mer.") 

(Perspectives par Joseph Llapasset)

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Une finalité circulaire: de la chambre à la chambre, 
dans une maison au plancher vermoulu, pareille à une épave, aux bardeaux disloqués, à la charpente qui craque...
 

"Je me glisse hors du lit ... Je sais que Laure ... retient son souffle." "Je me glisse sous la moustiquaire ... J'entends Laure qui soupire"

La caractéristique d'une finalité linéaire c'est de s'engager dans le mauvais infini d'une recherche du plaisir-en-mouvement (= qui disparaît dès qu'on l'a), comme si le désir pouvait être réduit au besoin sans renaître sans cesse, comme la soif. Le démenti porté par une soif que rien ne peut étancher exige que soient distingués le plaisir et la joie, le besoin et le désir, l'existence aliénée et l'existence réussie dans la joie.
A une finalité linéaire toujours en fuite, celui qui recherche le bonheur croit possible de substituer une finalité circulaire semblable à une promenade dans l'espace qui, nuit et jour, revient à son point de départ, dans la sécurité de la répétition du même.
C'est bien l'illusion, comme satisfaction imaginaire d'un désir - dont la triple figure, la sécurité, la curiosité, et l'immortalité emplit l'enfant, qui permet de croire à l'existence antérieure d'un paradis où la recherche du bonheur pourrait concilier la curiosité et la sécurité parce que non seulement le promeneur revient à son point de départ mais parce que la promenade semble s'exercer dans un cadre immuable, celui de la nature offerte à la curiosité et celui de la famille qui semble offrir la sécurité. 

Mais l'extrême violence de l'ouragan à venir et du temps menace tout et arrache l'enfant aux racines . Très vite le cadre et la peinture vont être minés par les Éléments et le devenir pour laisser place au grand large de l'aventure transformant l'enfant enraciné en nomade de l'espace et du temps, habité par l'infini: le nomade qui doit toujours briser ce qu'il a formé avant que cela ne se transforme en chaîne aliénante: l'avoir ne fait pas bon ménage avec l'être comme si c'était l'un ou l'autre. "S'en aller" devient aller cette parole de vivant, cette manifestation de l'existence comme liberté.

Le problème que pose la recherche du bonheur est de trouver une forme de finalité circulaire qui puisse accompagner toute une existence: il s'agit que ce ne soit plus une utopie de l'enfance ou de la vieillesse. Qu'elle soit autre chose que ce qui encadre l'existence humaine: une enfance qui prendra nécessairement le goût d'un paradis perdu et une vieillesse, celle d'un promeneur qui rêve, bercé par le rythme au bord d'un lac. Le bonheur et sa recherche ne saurait relever de l'enfance et du retour à l'enfance: serait-il imbécile?
Peut-on réduire la recherche du bonheur à la conquête de l'inutile? Le bonheur consiste-t-il à revenir sur ses pas, à défaire ce qui a été créé, "pour être enfin libre"? (page 373)