L’enjeu
est celui de la transmission du phallus son opération est de structure
dite oedipienne. Lire cette structure consiste à donner aux places
inscrites la priorité sur les personnages qui les occupent,
possiblement ou non. Or, ce qu’a mis en évidence Lacan comme épigone
de Freud, c’est qu’il n’y a pas moyen de situer dans la structure la
fonction paternelle sans la distinguer selon trois dimensions symbolique,
imaginaire, réelle.
La
dimension symbolique est à poser en priorité pour la naissance du désir
chez l’enfant; car on n e voit pas, à lire naïvement le mythe d’Œdipe,
en vertu de quelle spontanéité instinctuelle et préétablie l’enfant
aurait en sa mère l’objet primordial et privilégié de son désir
serait-il de nature monogame ? Ni non plus, pourquoi il devrait en changer
pour son père ? Et pour quel profit ?.
Partons
donc d’ailleurs non de l’enfant, mais de cet ailleurs qu’est l’Autre
défini comme lieu des signifiants, structure symbolique, dans laquelle
l’enfant est pris dès avant sa naissance biologique. Or, en ce champ de
l’Autre prend place la Mère. Que
veut-elle ? La question de l’enfant est la voie par laquelle naît
son désir, en tant que celui-ci ne peut s’engendrer que du
désir de l’Autre. Désir inconnu de quoi en l’Autre y a-t-il
manque en effet ? Quel est le signifiant de son désir ?
Ce
n’est pas le lieu ici, en ces quelques pages, de décrire les différents
moments de l’Œdipe, selon lesquels la loi du désir se transmet et détermine
la différenciation sexuelle côté homme et côté femme. Plus important
est de souligner brièvement l’apport de Lacan concernant la paternité.
Dans
la dimension symbolique, il y a de l’Un-père en tant que nommé,
selon ce que la religion nous a appris à invoquer comme le «Nom-du-Père».
Ceci, pour marquer le caractère transbiologique de la paternité le père
ne s’identifie pas avec le géniteur;
il n’y a de père qu’en tant que reconnu comme tel, «adopté», par la Mère pour l’enfant. Ainsi, le récit d’Œdipe, enfant
"adopté", rejoint celui d’Abraham et de Sarah disqualifiés
biologiquement parlant leur boiterie ne fait que mieux ressortir que le sens de la paternité demeure caché; ce sens, nul ne peut le dire. Ceci est décisif ;
en effet, le signifiant phallique qui pourrait le dire est manquant
irréductiblement (originairement et à jamais refoulé, urverdrängt,
dit Freud!). En effet, il est le seul signifiant à pouvoir se
signifier lui-même, le seul à pouvoir être posé sans être différent
de lui-même. Il est donc comme tel indicible, étant le nom qui abolirait
toutes les autres nominations.
Il
ne donne valeur à celles-ci que pour autant qu’il est exclu de leur
ordre symbolique. N’est-il pas frappant que la théologie chrétienne a
parlé pendant des siècles si abondamment du Fils ? Mais quant au Père,
elle a rencontré un impossible au dire. Cet impossible, elle le recouvre
à certains moments par une ontologie de l’amour, où être et amour se
conjoignent; elle substitue
ainsi un «Je suis celui qui est» au « e suis ce que je suis» de la réponse paternelle
» faite à Moïse.
Bref, le Père
comme Nom suffit pur nom à la place vide du signifiant phallique. Il
introduit la loi du signifiant, selon laquelle aucun énoncé ne peut se
porter garant de la vérité sans un acte d’énonciation qui le
soutienne et en appelle à votre crédit et à votre foi. Entendez ici la
parole de la Mère quant au signifiant de son
désir. Fils ou fille, elle vous y assujettit, sous peine d’errer
sous la loi affolante du caprice.
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