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ENTRE L’ORAL ET L’ECRIT EN FRANCAIS: LA REFORME ORTHOGRAPHIQUE
DE 1990 Nilgül SÖKMEN* LE SYMPOSIUM DE LA FRANCOPHONIE EN ANATOLIE CENTRALE pages: 1 - 2 - 3 - 4 - 5 - 6 - 0. Observations générales «Pourquoi
le français ne s’écrit-il pas tel qu’il se prononce?»
C’est une question souvent adressée à l’enseignant dans une
classe débutante du français langue étrangère ou langue
seconde. L’enseignant qui trouve utile, voire nécessaire de
donner un bref aperçu de l’évolution de la langue française
se heurte souvent à un sentiment de découragement et une inquiétude
de l’échec chez les nouveaux apprenants qui, paradoxalement, déjà
en possession de quelques mots d’amour et des paroles de
quelques chansons interprétées par Edith Piaf, Mireille Mathieu,
Jacques Brèle ou bien Céline Dion, célèbre chanteuse québécoise
de la chanson du film intitulé Titanic, avaient choisi en émerveillement
le français comme la deuxième langue, cette langue «distinguée»,
«harmonieuse», «excellente». Même dans les classes avancées, il n’est pas
rare de voir un étudiant souffler à l’oreille de son voisin
pour lui demander comment s’écrit un tel mot, avec « ai »
ou « ei », ou bien avec « s » ou « c »,
ou bien encore s’il y a un « s » ou « t »
à la fin d’un tel mot. De pareilles questions sur
l’orthographe des mots difficiles ou même ceux des plus
ordinaires ne cessent jamais de se poser et les difficultés liées
à l’écart entre la prononciation et l’orthographe se font
sentir pendant toute une période de l’apprentissage du français,
aussi bien aux apprenants qu’aux enseignants, qui sont souvent
obligés d’épeler les préfixes, les suffixes, les désinences
ou d’autres parties des mots. A cette fin, il n’est pas sans
raison d’enseigner l’alphabet français aux débutants à
partir des premières leçons. Signalons au passage que ces difficultés ne préoccupent
pas seulement les apprenants étrangers mais aussi les enfants
francophones de naissance qui doivent passer une grande partie de
leur temps à apprendre à lire et écrire correctement. Car, l’écart
entre la prononciation des signes et leur représentation
graphique est si grande que le français écrit et le français
parlé se présentent,
«comme deux langues
partiellement indépendantes» (Lyon, 1970: p.34). 1.
L’écriture En tant que l’un des moyens de communication
entre les hommes ou bien entre l’homme et la machine
(l’ordinateur par exemple) les langues vivantes naturelles se
manifestent, en général, sous
deux systèmes de signaux tout à fait distincts l’un de
l’autre: le système de signifiants phoniques et le système de
signifiants graphiques, l’un et l’autre étant codifiés en
eux-mêmes. C’est selon la relation entre ces deux systèmes
qu’il s’agit d’une écriture ou non. On n’accorde pas, par
exemple, un statut d’écriture aux pictogrammes qui sont les
premières manifestations graphiques remontant à 30 mille ans,
car bien que ces desseins aient de plus en plus un rôle dans
la communication, ils ne se réfèrent pas au langage
humain. Ils racontent une histoire mais c’est «une
histoire sans parole» tandis que l’écriture à proprement
parler exige «une représentation
de la langue parlée au moyen des signes graphiques» (Dubois,
1973). Le vrai système d’écriture commence par l’écriture cunéiforme des Sumers en 3500 av. J.C. et il est suivi par les hiéroglyphes égyptiens et les idéogrammes chinois qui se réfèrent, les uns et les autres, à des unités minimales de sens. L’écriture phonographique apparaît à partir de 1500 av. J.C., avec l’invention du syllabaire consonantique des phéniciens. C’est l’alphabet grec qui note plus tard tous les sons de la langue, d’où viennent le latin et le cyrillique. Dans l’écriture phonographique, le signe graphique dénote ou bien «une unité linguistique non-signifiante», un son (alphabet) ou bien «un groupe de sons» (syllabaire) (Todorov,1972). L’écriture phonétique se fondant sur un alphabet exige un lien entre l’écrit et l’oral qui se limite strictement à associer un symbole à un son. Mais ce symbole est complètement abstrait. Pourtant, c’est cette abstraction qui permet à l’homme de transmettre «une infinité de messages grâce à un minimum de signes» (op.cit.). Toutes ces représentations graphiques (écriture pictographique, idéographique et phonétique) sont aujourd’hui à la disposition de la communication humaine. |