1 - Propédeutique pour mieux comprendre
X
.... roule sur une autoroute. Personne en vue. La tentation est
grande de dépasser un tout petit peu la vitesse autorisée pour
"doubler" ce lambin qui roule et s'entête à rouler,
à 125 km/h. D'ailleurs, il a de bonnes raisons pour cela: un
argument d'autorité: il y a longtemps, l'inspecteur qui lui a
fait passer le permis avait été catégorique: "Un peu de
bon sens! ne regardez pas le compteur en dépassant. Regardez
devant vous: accélérez, dépassez, et, en vous assurant que le
retour à droite ne gène pas le véhicule dépassé, revenez
sur la file de droite."
X...
sait bien que la loi lui fait obligation de ne pas dépasser le
130 km/h et ... il commence par lui obéir: certes sa liberté
naturelle disparaît mais en s'obligeant il marque sa liberté
d'être raisonnable. Il agit par devoir, par respect de la loi
et par respect de lui même comme personne libre.
Même
scénario, mais plusieurs gendarmes armés sont en vue. Là X...
n'hésite même pas, il reste derrière le véhicule qui le précède.
Certes, il agit conformément à la loi, mais, il y est
contraint pas une force extérieure, par un corps de
militaires. Il n'exerce ni sa liberté naturelle ni sa liberté
morale: en fait ce n'est pas lui qui agit mais sa nature
sensible qui réagit à la vue de ses uniformes qui présentent
une menace en puissance.
L'obligation s'adresse à un être raisonnable
sensiblement affecté capable d'exercer une contrainte sur ses
impulsions, capable d'autonomie, de s'obliger lui même.
La contrainte comme force qui s'exerce de l'extérieur,
qui fait violence, qui se contente d'une apparence de
soumission, fait disparaître la liberté et condamne à
l'hypocrisie. Voilà des maîtres et des esclaves.
"Qu'un
brigand me surprenne au coin d'un bois: non seulement il faut
par force donner la bourse, mais quand je pourrais la soustraire
suis-je en conscience obligé de la donner? Car enfin le
pistolet qu'il tient est aussi une puissance.
Convenons donc que la force ne fait le droit, et qu'on n'est
obligé d'obéir qu'aux puissances légitimes." Rousseau,
Le contrat social I, 3 , pléiades, tome III, page 357
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