Propédeutique
pour mieux comprendre => Le parcours => Citations comme
autant d'ouvertures pour une problématique.
A
- Propédeutique pour mieux comprendre
On dit
volontiers : Le soleil cause la photosynthèse et la
vie sur terre
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Comme
si on avait :
Une cause: le soleil; un
effet: la photosynthèse; la vie, effet de l'effet.
Il semble que le soleil est bien ce qui produit un
effet, ce qui par son action se prolonge dans l'effet:
poser la cause c'est poser l'effet (si soleil alors,
vie); d'ailleurs supprimer la cause c'est supprimer
l'effet (pas de soleil, pas de vie).
Mais ce bel enchaînement est-il expression d'une réalité
ou est-il "introduit" par la raison dans la
réalité?
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A y
regarder de plus près ...
- Le soleil
n'est pas "une" cause mais un
processus, un ensemble de phénomènes qui semblent organisés
pour aboutir à une fin: la photosynthèse n'est pas "un"
effet mais un ensemble de phénomènes organisés: ce n'est pas
la cause de la vie mais une condition de la vie.
Comprendre
que:
1- La
soi-disant cause vient d'éclater: il y avait en réalité une
synthèse immédiate, une multiplicité mal définie et confuse
que la langue désignait pas un terme: le
soleil.
La science, par l'abstraction, par théorie et expérimentation,
isolera des éléments, et par analyse et synthèse justifiées
reconstituera des processus: saisira un ordre et des rapports. A
la cause comme synthèse première et provisoire, indistincte et
confuse, la science substituera des enchaînements de succession
déterminés dont elle pourra faire varier les effets.
A la notion vulgaire (= propre à la foule, à l'opinion) on préfèrera
toujours le concept de processus antécédent qui détermine un
autre processus en le précédant: rapport numérisable par une
loi:
processus solaire => processus de la photosynthèse.
2- La cause est
pensée, elle n'est jamais connue.
Ce que nous connaissons ce n'est pas la réalité mais des phénomènes
reliés par des lois: la loi nous donne un rapport constant
entre un antécédent et un conséquent.
Pleine d'impatience,
refusant la contingence, l'opinion qui transforme ses besoins ou
désirs en connaissance ne peut s'empêcher de prendre la loi
pour un chemin vers le nécessaire, ce qui ne peut pas ne pas être,
ce qui est fondé. Elle substitue alors à l'ordre de succession
constante que lui donne la loi l'ordre nécessaire que lui donne
la cause. A travers la loi qui numérise ce qui est contingent,
l'opinion aimerait bien atteindre la sécurité de ce qui doit
être, de ce qui est fondé, de ce qui est nécessaire: ce
faisant, elle pense, fait de la métaphysique et confond le
point de vue avec la réalité.
En fait, la formulation de relations constantes entre des phénomènes
pour exacte qu'elle soit dans la détermination de leur
succession, ne saurait mener à la mise à jour de causes.
On connaît des lois, on parle de causes que l'on déduit des
lois de manière tout à fait injustifiée, par un pari
hasardeux qui confond déterminisme des lois et nécessité des
causes.
C'est que, inconsciemment, nous identifions le soleil à un dieu
qui se lèvera toujours pour nous éclairer et nous réchauffer:
un dieu qui sait tout (il est lumière) et qui aime (il est
chaleur), sur qui on peut compter comme sur une cause qui
"tiendrait" tous les paris que nous pouvons faire grâce
à elle (la cause).
B
- Le parcours
On
appelle cause ce qui
produit un effet et se prolonge en lui: cause désigne donc au
moins une succession et au plus un engendrement.
L'empirisme,
pour qui l'expérience est la source de toutes nos impressions
et idées, réduit la cause à la succession des phénomènes
dans l'expérience: l'engendrement serait une croyance ajoutée
par l'habitude: on ne voit jamais, on ne constate jamais le
passage d'une cause dans un effet! Lorsque deux boules de
billard se choquent je ne vois qu'une succession de mouvements.
L'habitude finit par me faire croire à un enchaînement nécessaire.
La cause est donc toujours pensée comme efficiente et antécédente,
mais elle n'est jamais connue comme efficiente.
La
fin: Celui qui
organise ses révisions le fait dans un but: ne pas faire
d'impasse pour être prêt. Comme être pensant, il se représente
une fin, ce pour quoi il réalise des moyens: suivre son plan de
révision. Fin est ici le corrélatif de moyen, ce qui est
premier dans l'intention (= révision à effectuer) et ce qui
est dernier dans l'exécution (= réalisation à la fin du
travail).
La fin est pensée dans l'avenir, d'une certaine manière elle
n'existe pas dans la réalité; pourtant c'est elle qui détermine
les moyens employés, qui d'une certaine manière les cause (si
je n'avais pas cette fin, je ne réviserais pas). On peut donc
parler à juste titre d'une cause finale! Alors que, il semblait
plus haut que toute cause était antécédente. L'intention
d'arriver à être prêt dans l'avenir, le jour du bac, détermine
bien le moyen que je suis en train d'employer.
Fin signifie donc d'abord, au sens propre, ce vers quoi tend un
être pensant qui a en vue une idée à réaliser.
Mais, dans l'organisation des êtres naturels, dépourvus de
conscience et donc d'intention, on parle encore de fin par
analogie, par vague ressemblance: des organisations naturelles
apparaissent qui manifestent une fin non intentionnelle qu'il
faut bien prendre en considération. L'explication par processus
causal antécédent ne saurait donc suffire: pour connaître il
faut comprendre et pour comprendre, il faut tenir compte de leur
finalité.
Ainsi le foie a bien une fin et l'explication par cause antécédente
est insuffisante. L'estomac a pour fin évidente de digérer les
aliments et tout se passe comme si cette fin déterminait les
moyens!
La prise en considération de la finalité naturelle ne détourne
évidemment jamais de la question fondamentale pour la science:
comment ça fonctionne, et donc du mécanisme, de l'enchaînement
des causes antécédentes et des effets.
C
- Citations
"Un phénomène
qui en détermine un autre en le précédant est ce qu'on a
appelé de tout temps une cause efficiente."
Lachelier, oeuvres, I, page 27.
"Un
ouvrier, cause efficiente, dans un certain but,
cause finale, se met devant les yeux du corps
ou de l'imagination un modèle, cause exemplaire;
puis il prend de l'or, de l'argent, du fer ou du bois, cause
matérielle, et il modifie cette matière pour lui
donner une forme, cause formelle." De
Régnon, Métaphysique des causes, page 125
"Si
l'on définit une cause, ce par quoi quelque chose existe,
qu'entend-on par ces mots par quoi? Si l'on
avait dit une cause est ce après quoi une
chose existe constamment, nous aurions compris les
termes de cette définition." Hume, Enquête sur
l'entendement humain, VIII, 1, Note.
"La
cause étant l'antécédent constant, on ne peut savoir si un
antécédent est cause sans savoir d'abord s'il est constant: il
faut connaître la loi pour pouvoir parler de cause." Goblot.
"Les
âmes agissent selon les lois des causes finales, par appétitions,
fins et moyens. Les corps agissent selon les lois des causes
efficientes ou des mouvements." Leibniz, Monadologie,
§36.
"Il
n'est pas vrai que la recherche expérimentale nous fasse découvrir
des causes dont nous induisons des lois. Elle nous fait découvrir
des lois dont nous déduisons des causes.." Goblot, Traité
de logique, page 292.
Quelques problèmes
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Jacques Monod, essai de philosophie naturelle:
Sur l'évolution
et Les frontières de la biologie moderne
Le déterminisme
Et la matière
devint vivante par André Brack
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