I.
Autour du mot: le désir - l'action
*Comme
le désir la passion est un mouvement de la conscience qui fait
apparaître un objet comme promesse de plénitude, de satisfaction
complète et durable ou comme menace de douleur, de souffrances,
de malheur: C'est l'amour ou la haine.
Mais, dans la
passion, la structure de la conscience se fixe sur un objet en
fonction d'une ressemblance avec un passé heureux ou malheureux
et s'épuise dans une vaine tentative de reflux vers ce qui n'est
plus pour accéder à l'éternité en échappant au temps
puisqu'elle croit retrouver le passé dans le présent.
Le désir est
multiplicité en fonction des relations que la conscience
multiplie avec une diversité de choses dont elle éprouve le
manque, ce qui l'amène à anticiper, à imaginer, à inventer et
à produire par une action.
*L'action
est donc l'opération d'un être conscient, le résultat d'une
prise de conscience de la distance entre la présence décevante
du milieu extérieur et l'absence éprouvée, creusée par le désir:
l'agent transforme le milieu en fonction de son désir.
- Si le désir s'impose à lui, en se fixant sur un objet unique,
en envahissant toute sa conscience et en subordonnant tout le
reste, le sujet subit: c'est la passion.
- S'il a choisi son projet, s'il a consenti intelligemment et
librement le sujet agit: c'est la liberté, rapport entre l'opération
et le moi.
- La passion consiste donc à subir une action: l'action consiste
à produire une passion, à faire subir: dans les deux cas quelque
chose est produit, une transformation apparaît dans la réalité:
on ne peut la mettre en doute.
Révolution
et construction pour le moi, destruction pour les autres selon que
le bouleversement est rapporté à celui qui le produit (agent) ou
à celui qui le subit (patient)
II.
La notion: le parcours
-
On s'accorde pour désigner la passion comme un sentiment -
intense, d'une grande force, vivace, qui ne disparaît pas
facilement - exclusif, qui subordonne les autres intérêts - qui
oriente, ou même transforme la personnalité et en tout cas le
comportement.
a)
Mais, c'est le désaccord sur les causes et les effets de
la passion: l'argumentation rigoureuse étant insuffisante
puisqu'on parle d'une réalité accessible à la seule
introspection, les hypothèses explicatives prolifèrent et
restent juxtaposées car aucune observation réelle mesurable ne
les départage.
-
Pour les causes:
-
Si la passion
consiste à supporter une action, il est tentant de l'imputer
au corps qui agirait sur l'âme: en ce sens la perception
serait une passion.
-
Mais
la passion apparaît aussi comme une structure fixée de la
conscience: en ce sens ce serait une maladie de l'âme.
-
Vouloir
retrouver le passé dans le présent n'est-ce pas un
comportement enraciné dans un désir d'éternité?
-
Pour les effets:
-
On peut répertorier
ceux qui sont observables par expérience directe ou par les
traces laissées... Isolement et solitude, guerres et
conflits, tyrannie, division.
b)
La passion étant mouvement vers un objet indéterminé (ce
peut être la gloire ou l'or etc...), on a tenté de la déterminer
par l'objet ce qui revient à la juger d'après son résultat et
non d'après ce qu'elle est comme si l'utilité était un critère
de vérité: comprenons qu'il y aurait de bonnes passions avec de
bons objets et de mauvaises passions avec de mauvais objets.
Attacher le jugement à l'objet c'est faire varier le jugement à
l'infini et s'interdire tout discours cohérent et tout jugement
pertinent car l'objet particulier ne peut en aucun cas être
confondu avec un critère universel.
-
On commencera
par le dénigrement: aliénation, égoïsme, violence, tragédie,
appauvrissement, inconscience.
-
Puis, on réhabilite
la passion: auxiliaire de la volonté, de l'action, de la vie:
santé, joie de l'affirmation.
c)Pour
arrêter le parcours devenu fou, il suffirait pourtant de bien
tenir ensemble action et passion qui marquent dans tous les cas
l'avènement d'une transformation et donc qui accompagnent nécessairement
cette nouveauté.
Reste que le passionné, qui subit, n'étant pas à l'origine de
la nouveauté ne peut s'en déclarer l'auteur. Qu'il se soit
beaucoup agité ne le rend pas pour cela acteur car seul celui qui
est à l'origine de la nouveauté peut s'en déclarer l'auteur.
Dire que rien de grand ne s'est fait sans passion, ne signifie pas
que ce soit le passionné qui agit au plein sens du terme: il
n'est qu'un intermédiaire aliéné qui écrit un texte dont il
n'est pas l'auteur.
Vouloir définir la passion par l'objet revient donc à mettre en
lumière l'aliénation du passionné à son objet. Voilà
pourquoi, malgré les incendies, les cris et les chuchotements, le
sang versé la passion est toujours un mal, une idée fixe qui
sonne la perte du sens moral, de la possibilité de douter, de
prendre de la distance: la disparition du sujet, de cette
opposition de soi à soi, de cette balance intérieure qui sait
multiplier les perspectives pour annuler ce qu'elles pourraient
avoir de ruineux.
Citations
-Citations:
| La Passion
A- Passion et corps | B - Aliénation | C - Énergie (lien
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"Le
feu des plus nobles passions, comme celui des plus obscures,
produit toujours un peu de fumée, qui offusque notre raison"
Louis
XIV
"Recevoir l'amour passionné d'autrui, c'est savoir que
l'aliénation et la captivité sont inscrites dans le processus même
du don" R. Mehl
"Je
suis toujours dévoré par la passion d'apprendre" Delacroix
Pistes de
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