° Rubrique philo-poche 

Cours de  PHILOSOPHIE par J. Llapasset

Philo-poche

La passion 

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I. Autour du mot: le désir -  l'action

*Comme le désir la passion est un mouvement de la conscience qui fait apparaître un objet comme promesse de plénitude, de satisfaction complète et durable ou comme menace de douleur, de souffrances, de malheur: C'est l'amour ou la haine.

Mais, dans la passion, la structure de la conscience se fixe sur un objet en fonction d'une ressemblance avec un passé heureux ou malheureux et s'épuise dans une vaine tentative de reflux vers ce qui n'est plus pour accéder à l'éternité en échappant au temps puisqu'elle croit retrouver le passé dans le présent.

Le désir est multiplicité en fonction des relations que la conscience multiplie avec une diversité de choses dont elle éprouve le manque, ce qui l'amène à anticiper, à imaginer, à inventer et à produire par une action.

*L'action est donc l'opération d'un être conscient, le résultat d'une prise de conscience de la distance entre la présence décevante du milieu extérieur et l'absence éprouvée, creusée par le désir: l'agent transforme le milieu en fonction de son désir.
- Si le désir s'impose à lui, en se fixant sur un objet unique, en envahissant toute sa conscience et en subordonnant tout le reste, le sujet subit: c'est la passion.
- S'il a choisi son projet, s'il a consenti intelligemment et librement le sujet agit: c'est la liberté, rapport entre l'opération et le moi.
- La passion consiste donc à subir une action: l'action consiste à produire une passion, à faire subir: dans les deux cas quelque chose est produit, une transformation apparaît dans la réalité: on ne peut la mettre en doute.

Révolution et construction pour le moi, destruction pour les autres selon que le bouleversement est rapporté à celui qui le produit (agent) ou à celui qui le subit (patient)

II. La notion: le parcours 

- On s'accorde pour désigner la passion comme un sentiment - intense, d'une grande force, vivace, qui ne disparaît pas facilement - exclusif, qui subordonne les autres intérêts - qui oriente, ou même transforme la personnalité et en tout cas le comportement.

a) Mais, c'est le désaccord sur les causes et les effets de la passion: l'argumentation rigoureuse étant insuffisante puisqu'on parle d'une réalité accessible à la seule introspection, les hypothèses explicatives prolifèrent et restent juxtaposées car aucune observation réelle mesurable ne les départage.

- Pour les causes

  • Si la passion consiste à supporter une action, il est tentant de l'imputer au corps qui agirait sur l'âme: en ce sens la perception serait une passion.

  • Mais la passion apparaît aussi comme une structure fixée de la conscience: en ce sens ce serait une maladie de l'âme.

  • Vouloir retrouver le passé dans le présent n'est-ce pas un comportement enraciné dans un désir d'éternité?

- Pour les effets:

  • On peut répertorier ceux qui sont observables par expérience directe ou par les traces laissées... Isolement et solitude, guerres et conflits, tyrannie, division.

b) La passion étant mouvement vers un objet indéterminé (ce peut être la gloire ou l'or etc...), on a tenté de la déterminer par l'objet ce qui revient à la juger d'après son résultat et non d'après ce qu'elle est comme si l'utilité était un critère de vérité: comprenons qu'il y aurait de bonnes passions avec de bons objets et de mauvaises passions avec de mauvais objets. Attacher le jugement à l'objet c'est faire varier le jugement à l'infini et s'interdire tout discours cohérent et tout jugement pertinent car l'objet particulier ne peut en aucun cas être confondu avec un critère universel.

  • On commencera par le dénigrement: aliénation, égoïsme, violence, tragédie, appauvrissement, inconscience.

  • Puis, on réhabilite la passion: auxiliaire de la volonté, de l'action, de la vie: santé, joie de l'affirmation.

c)Pour arrêter le parcours devenu fou, il suffirait pourtant de bien tenir ensemble action et passion qui marquent dans tous les cas l'avènement d'une transformation et donc qui accompagnent nécessairement cette nouveauté.
Reste que le passionné, qui subit, n'étant pas à l'origine de la nouveauté ne peut s'en déclarer l'auteur. Qu'il se soit beaucoup agité ne le rend pas pour cela acteur car seul celui qui est à l'origine de la nouveauté peut s'en déclarer l'auteur. Dire que rien de grand ne s'est fait sans passion, ne signifie pas que ce soit le passionné qui agit au plein sens du terme: il n'est qu'un intermédiaire aliéné qui écrit un texte dont il n'est pas l'auteur.
Vouloir définir la passion par l'objet revient donc à mettre en lumière l'aliénation du passionné à son objet. Voilà pourquoi, malgré les incendies, les cris et les chuchotements, le sang versé la passion est toujours un mal, une idée fixe qui sonne la perte du sens moral, de la possibilité de douter, de prendre de la distance: la disparition du sujet, de cette opposition de soi à soi, de cette balance intérieure qui sait multiplier les perspectives pour annuler ce qu'elles pourraient avoir de ruineux.

Citations

-Citations:  | La Passion A- Passion et corps | B - Aliénation | C - Énergie (lien ouverture nouvelle fenêtre)

"Le feu des plus nobles passions, comme celui des plus obscures, produit toujours un peu de fumée, qui offusque notre raison" Louis XIV
"Recevoir l'amour passionné d'autrui, c'est savoir que l'aliénation et la captivité sont inscrites dans le processus même du don" R. Mehl
"Je suis toujours dévoré par la passion d'apprendre" Delacroix

  Pistes de lecture:

  • Descartes: Les passions de l'âme (incontournable)
    Kant: Anthropologie p.119
    Hegel: La raison dans l'histoire p.108
    Alquié: Le Désir d'éternité (précieux)
    KAMBOUCHNER: L'homme des passions

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