I.
Autour du mot. Déontologie, éthique, morale.
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La déontologie
désigne l'ensemble
des exigences et des règles morales propres à un domaine
particulier, qui s'imposent à tous ceux qui pratiquent une
profession: comprenons que chaque membre s'engage à les respecter
par un serment explicite (pour les médecins: le serment
d'Hippocrate) ou un engagement implicite, le professeur se doit de
donner un corrigé des dissertations.
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L'éthique
s'attache à la détermination de ce qu'il convient de faire ou de
ne pas faire, dans des circonstances sociales déterminées, pour
ne pas aller à l'encontre des valeurs reconnues par une société
et par l'ensemble de l'humanité. C'est dire que l'éthique
implique un effort d'ajustement des pratiques dont le mouvement
est infini puisque les valeurs ne sauraient être pleinement réalisées
sous peine de devenir des "idées reines" et de faire
disparaître toute forme de liberté. L'éthique ne s'appuie donc
pas sur des prescriptions absolues, définitives, a priori, mais
au contraire se meut dans le relatif, dans l'expérimental, dans
le provisoire qui mérite toujours d'être dépassé vers un
ajustement meilleur.
Cela implique une recherche pour ne pas dire une conquête de
l'esprit et du coeur.
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Morale a été longtemps synonyme d'éthique comme ensemble
de règles universellement valides mais, sous l'influence de
Rousseau, Kierkegaard, Bergson, Sartre, et du temps de malheur des
guerres mondiales, le sens s'est restreint à l'individu, au moi
qui exige de lui-même, qui s'adresse une parole intérieure dans
la sphère de sa responsabilité, qui obéit au meilleur de lui-même:
à la raison pratique qui commande absolument indépendamment des
circonstances de temps et de lieu.
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On distinguera donc morale, comme autonomie du sujet ou
liberté, et éthique qui garde évidemment
son point de vue universel, tourné vers le tout, du fait que la
menace de certaines pratiques porte sur toute forme de vie. L'éthique
rejoint la morale, l'impératif catégorique, dans la mesure où
elle met au dessus de tout le respect de la personne qui ne doit
jamais n'être qu'une simple moyen.
La bioéthique n'est pas la déontologie médicale car elle nous
concerne tous (elle est pour tous), elle appelle donc l'accord de
tous dans une loi née de la concertation éclairante,
animée par le coeur et la raison. L'origine de l'éthique ne
saurait donc être la simplicité ou la gnose des simples, par
l'effort de vérité et de justice qu'elle exige.
Parce que nous
nous sentons menacés dans notre intégrité par le pouvoir que la
technique donne au désir, nous sommes tous concernés. Vers 1960
le terme bioéthique apparaît pour désigner une
discipline, à constituer, qui réfléchirait sur les problèmes
que les progrès de la biologie posent à la médecine: il ne
s'agit pas tant de problèmes théoriques (savoir) mais pratiques:
que doit-on faire, et donc laisser faire...? Que doit-on ne pas
faire, et donc interdire par des lois, ne pas laisser faire...? |