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Un vivant ne se réduit pas à un carrefour d'influences 

Georges Canguilhem

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- Un centre ne se résout pas dans son environnement ...
 

La prétention de la science à dissoudre dans l'anonymat de l'environnement mécanique, physique et chimique ces centres d'organisation, d'adaptation et d'invention que sont les êtres vivants doit être intégrale, c'est-à-dire qu'elle doit englober le vivant humain lui-même. Et l'on sait bien que ce projet n'a pas paru trop audacieux à beaucoup de savants. Mais il faut alors se demander, d'un point de vue philosophique, si l'origine de la science ne révèle pas mieux son sens que les prétentions de quelques savants. Car la naissance, le devenir et les progrès de la science dans une humanité à laquelle on refuse à juste titre, d'un point de vue scientiste et même matérialiste, la science infuse, doivent être compris comme une sorte d'entreprise assez aventureuse de la vie. Sinon il faudrait admettre cette absurdité que la réalité contient d'avance la science de la réalité comme une partie d'elle-même. Et l'on devrait alors se demander à quel besoin de la réalité pourrait bien correspondre l'ambition d'une détermination scientifique de cette même réalité.
Mais si la science est l'œuvre d'une humanité enracinée dans la vie avant d'être éclairée par la connaissance, si elle est un fait dans le monde en même temps qu'une vision du monde, elle soutient avec la perception une relation permanente et obligée. Et donc le milieu propre des hommes n'est pas situé dans le milieu universel comme un contenu dans son conte- nant. Un centre ne se résout pas dans son environnement. Un vivant ne se réduit pas à un carrefour d'influences. D'où l'insuffisance de toute biologie qui, par soumission complète à l'esprit des sciences physico-chimiques, voudrait éliminer de son domaine toute considération de sens. Un sens, du point de vue biologique et psychologique, c'est une appréciation de valeurs en rapport avec un besoin. Et un besoin c'est pour qui l'éprouve et le vit un système de référence irréductible et par là absolu.

Georges Canguilhem, La Connaissance de la vie, Vrin, 1971, p. 153

 

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