° Rubrique philo-fac http://www.philagora.net/philo-fac/ Michel FOUCAULT, Les Mots et les Choses Archéologie des sciences humaines, Gallimard, NRF, 1966. Exposé: La classification dans Les mots et les choses. Index
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droits réservés © Contribution de Olivier DELOBEL (étudiant en maîtrise de philosophie à l'UPMF de Grenoble) 1. Voyons maintenant en détail les deux modes de classification des êtres à l'âge classique ainsi que leurs conséquences. Nous avons vu que la structure, d'une part, comme le dit Foucault, "c'est cette désignation du visible qui, par une sorte de tri prélinguistique, lui permet de se transcrire dans le langage" (p. 150) et, d'autre part, que celle-ci constitue une condition sine qua non de la classification dans l'histoire naturelle. Toutefois, il faut préciser que la structure en tant que telle désigne en quelque sorte un nom propre, elle n'indique pas encore, sous cette forme, de voisinage ni de tableau comparatif, c'est-à-dire de nom commun. Il faut pour se faire qu'elle devienne caractère. Comme le résume clairement Tournefort (Éléments de Botanique): "Connaître les plantes c'est savoir précisément les noms qu'on leur a donnés par rapport à la structure de quelques unes de leurs parties... L'idée du caractère qui distingue essentiellement les plantes les unes des autres, doit être invariablement unie au nom de chaque plante". Ainsi, lorsque la structure est utilisée comme référent pour l établissement des identités et des différences entre les êtres se nomme caractère. Pourquoi ce changement de vocable? Parce que, en fait, un problème inévitable apparaît avec la notion de structure lorsqu'on désire l'utiliser pour construire le tableau des identités et des différences entre les êtres vivants. Il faudrait, en effet dans ce cas, tenir compte de tous les traits qui ont pu être mentionné dans chaque description. La tâche de classification serait infinie, inachevable dans son principe même. L'âge classique livre deux réponses à cette difficulté, c'est-à-dire deux protocoles de classification: premièrement le système et surtout, deuxièmement la méthode.
Les conséquences de ces deux types de classification sont multiples:
2)
Il faut maintenant reprendre une conséquence majeure de la classification
(qu'elle soit systémique ou méthodique) que nous d'entre apercevoir et qui constitue une
de ses conditions fondamentales. Je veux parler de la continuité. Car, en
réalité, le problème du passage de la structure au caractère, du nom propre au nom
commun demeure. Il se pourrait, en effet, que sa transformation ne puisse jamais
s'effectuer car "qui peut assurer que chaque structure n'est pas rigoureusement
isolée de toute autre et qu'elle ne fonctionne pas comme une marque individuelle?"
(p. 158). Or, nous devons nous rappeler que pour qu'il y ait caractère, il faut qu'un
élément au moins de la structure se répète dans une autre. Il était donc nécessaire
que l'histoire naturelle postule une continuité entre les êtres, qu'il n'y ait pas de
saut, de rupture entre eux. Cela aurait pour conséquence, encore une fois, d'isoler les
structures, de les rendre incomparables, incommensurables et donc insaisissables (du moins
dans un tableau général, objet principal de l'histoire naturelle). Aussi conçoit-on à
l'âge classique que la nature forme une grande trame où les êtres vivants se
ressemblent de proche en proche. C'est ce qu'explique clairement Bonnet (Contemplation de
la nature): "Si entre deux êtres quelconques, il existait un vide, quelle serait la
raison du passage de l'un à l'autre? Il n'est donc point d'être au-dessus et au-dessous
il n'y en ait pas qui s'en rapprochent par quelque caractère." Pour conclure brièvement, nous pouvons dire que Foucault a entrepris dans Les mots et les choses une investigation archéologique visant à dégager ce qui constituait la spécificité de l'épistémè de la représentation. Nous nous sommes limités aujourd'hui à l'étude de la classification à l'œuvre dans l'histoire naturelle et constituant son fondement pour découvrir, un exemple particulièrement fort de ce qui a conditionné l'âge classique, à savoir la recherche d'une mathesis universelle. Durant cette période, connaître c'était classer et donc ordonner. Relevons enfin, que comme nous l'avons montré l'âge classique se trouve en rupture épistémologique avec la Renaissance (elle ne raisonne plus en terme de similitudes) mais aussi avec la Modernité qui va lui succéder au moins sur deux points en rapport avec la science des êtres vivants: d'abord celle-ci n'est pas une biologie, une science de la vie mais des êtres. La vie n'est qu'une catégorie de classement parmi d'autre et non un seuil. Et d'autre part, on ne peut plus considérer l'histoire naturelle comme un précurseur de l'évolutionnisme car, à l'âge classique, le devenir inscrit dans le monde ne peut en aucun cas instaurer une discontinuité dans l'ordre des êtres, il lui est extérieur et conditionné par l'instance que constitue la taxinomie des êtres. Retour au sommaire Foucault, La classification ° Rubrique philo-fac http://www.philagora.net/philo-fac/ |