Qu'est-ce
que la philosophie, la philosophie qui, si l'on en croit
Kant, "n'existe pas encore?"
Comment
définir une discipline et préciser son domaine si
"elle n'existe pas encore?" et pourquoi
"n'existe-t-elle pas encore?"
C'est
parce qu'elle est à faire, elle est un acte, elle est "démarche"
de l'esprit, mouvement de l'esprit vers le monde, vers lui-même
(Sartre), vers ce qui le dépasse, dont l'origine, nous dit
Aristote, fut "l'étonnement". C'est une démarche
personnelle certes, mais qui tend vers l'universel.
Nous
poserons donc ainsi la question: qu'est-ce que philosopher?
Philosopher
... c'est nous éveiller au monde qui nous entoure, c'est nous
interroger sur notre situation dans ce monde, sur ce que nous
sommes, c'est: Penser... oui... mais pas n'importe comment!
Philosopher
c'est:
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retrouver "l'homme intérieur", "se replier
sur soi-même, au dedans de soi" (cf. Husserl),
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dire "non" aux apparences pour découvrir ce qui
est derrière le monde sensible, c'est tenter de renverser
toutes les sciences admises, tous les systèmes, mettre en
doute", dire " non" dans un premier temps,
pour pouvoir asseoir sa pensée sur des bases inébranlables;
c'est "mettre de l'ordre dans ses pensées"
(Descartes>,
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rencontrer les limites de notre raison et alors "
prendre conscience de l'absence" (F. Alquié),
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adhérer à un principe supérieur.
Philosopher
c'est renaître et adhérer à un étrange savoir puisque c'est
pouvoir redire avec Socrate "Tout ce que je sais c'est que je
ne sais rien"; et cela parce que c'est essayer de comprendre
jusqu'aux "causes suprêmes" (Aristote). Philosopher
c'est accepter d'être "bouleversé" (Jaspers).
Ainsi
la Philosophie est un cheminement vers la connaissance vraie. C'est
la vie même de l'esprit; démarche nécessairement personnelle
elle présente aussi une valeur universelle puisque l'homme
cherche à établir un contact avec l'être, fondement de toute
chose.
Elle
nous aide à vivre "en homme c'est-à-dire en être vivant et
pensant aux prises avec des difficultés, posant des problèmes
qu'il peut résoudre et d'autres qu'il ne peut pas résoudre et
qu'il ne peut pourtant pas s'empêcher de se poser.
La
philosophie nous éveille au mystère de notre existence.
Aurions-nous
accès à une Vérité qui seule pourrait combler notre désir de
connaissance, à une Vérité qui ne serait pas le fruit d'une
pensée élaborée par la raison, qui nous serait révélée et
que nous aurions à accueillir ? Est-il légitime de croire quand
on ne sait plus?
Le
désir de vérité fait partie de la nature même de la raison, or
notre connaissance est déficiente et pourtant ce désir tend vers
la connaissance absolue. Il est alimenté par "cette
conscience de l'absence", ce vide, cette incapacité à
saisir ce que l'on cherche. Seule la plénitude de l'Être peut
combler ce désir infini. Emmanuel Mounier tente une explication
rationnelle de ce comportement humain et conclut " le néant
devient révélation négative de l'absolu". Notre néant est
rempli de la plénitude de l'appel".
Peut-on découvrir un chemin qui serait au-delà de la
raison?
TEXTES: Aristote - Kant - Husserl
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