Notions
de philosophie pour le BAC
Notions
de PHILOSOPHIE Par
J. Llapasset
Préparer
son oral - Philosophie
Machiavel
(1469-1527)
Discours sur la première décade de Tite-Live
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Questions
que pourrait vous poser votre examinateur
MACHIAVEL
Explication de ce texte
Tous les écrivains qui se sont occupés de politique (et
l'histoire est remplie d'exemples qui les appuient) s'accordent
à dire que quiconque veut fonder un Etat et lui donner des lois
doit supposer d'avance les hommes
méchants, et toujours prêts à montrer leur méchanceté
toutes les fois qu'ils en s trouveront l'occasion. Si ce
penchant demeure caché pour un temps, il faut l'attribuer à
quelque raison qu'on ne connaît point, et croire qu'il n'a pas
eu l'occasion de se montrer ; mais le temps qui, comme on dit,
est le père de toute vérité, le met ensuite au grand jour.
Après l'expulsion des Tarquins, la plus grande union paraissait
régner entre le Sénat et le peuple. Les nobles semblaient
avoir déposé tout leur orgueil et pris des manières
populaires, qui les rendaient supportables même aux derniers
des citoyens. ils jouèrent ce rôle et on n'en devina pas le
motif tant que vécurent les Tarquins. La noblesse, qui
redoutait ceux-ci, et qui craignait également que le peuple
maltraité ne se rangeât de leur parti, se comportait envers
lui avec humanité. Mais quand la mort des Tarquins les eut délivrés
de cette crainte, ils gardèrent d'autant moins de mesure avec
le peuple qu'ils s'étaient plus longtemps contenus, et ils ne
laissèrent échapper aucune occasion de le frapper. C'est une
preuve de ce que nous avons avancé: que les hommes ne font le
bien que forcément; mais que dès qu'ils ont le choix et la
liberté de commettre le mal avec impunité, ils ne manquent de
porter partout la turbulence et le désordre.
C'est ce qui a fait dire que la pauvreté et le besoin rendent
les hommes industrieux et que les lois font les gens de bien. Là
où le bien vient à régner naturellement et sans la loi, on
peut se passer de loi, mais dès que viennent à expirer les
moeurs de l'âge d'or, la loi devient nécessaire. Ainsi les
grands, après la mort des Tarquins, n'éprouvant plus cette
crainte qui les retenait, il fallut chercher une nouvelle
institution qui produisît sur eux le même effet que
produisaient les Tarquins quand ils existaient. C'est pour cela
qu'après bien des troubles, des tumultes et des périls
occasionnés par les excès auxquels se portèrent les deux
ordres, on en vint, pour la sûreté du dernier, à la création
des tribuns, et on leur accorda tant de prérogatives, on les
entoura de tant de respects, qu'ils formèrent entre le Sénat
et le peuple une barrière qui s'opposa à l'insolence des
premiers.
(Vous trouverez la suite de ce texte, dans l'excellent travail
d'équipe, sous la direction de Montenot/Ducat :
Philosophie, Terminale L. chez Bordas, page 522 et suivantes.)
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Questions
que pourrait vous poser votre examinateur:
=
Dans la deuxième partie, il y a l'expulsion des Tarquins et donc
la disparition de leur joug. Pourtant, après cette expulsion le sénat
semble uni avec le peuple, comme si les nobles étaient devenus une
partie du peuple, allant même jusqu'à prendre des manières populaires
pour se faire supporter écrit Machiavel. Selon sa théorie: si le joug
a disparu le Sénat ne devrait-il pas redevenir méchant. Comment
comprenez-vous cela?
(Votre explication n'a
pas assez souligné un point: le Sénat continue à composer parce qu'il
a peur du retour des Tarquins. Machiavel se souvient que l'exil des Médicis
hors de Florence a été provisoire et qu'ils sont revenus... C'est donc
la peur d'une alliance entre les Tarquins et une plèbe excédée par
les persécutions du Sénat qui contraignent le Sénat à composer
hypocritement en attendant la mort de Tarquins qui fera disparaître définitivement
toute menace de rétablissement de leur pouvoir dans Rome).
-
Réponse possible:
Le Sénat a peur de persécuter le peuple et d'en faire le soutien
d'un retour des Tarquins... De réelle la domination est devenue
possible et la simple possibilité d'un châtiment suffit à faire,
pour ainsi dire, rentrer la méchanceté.
=
Vous parlez d'un postulat dans la première partie en vous
vous appuyant sur "Supposer" et "d'avance": pourtant
dans la deuxième partie, ne croyez-vous pas que Machiavel essaie de le
démontrer? Or vous définissez à juste titre le postulat comme ce qui
doit être admis sans démonstration. Comment accorder cela?
-
Réponse possible:
(Vous commencez par réfléchir et surtout, vous ne revenez jamais
immédiatement sur ce que vous avez déjà dit dans l'explication.
Puisqu'on vous demande d'accorder les deux parties, de montrer
qu'elles ne sont pas contradictoires, vous allez vous appuyer sur la
distinction entre démontrer et prouver.)
Effectivement, il est impossible de démontrer un principe car démontrer
c'est déduire d'une définition antérieure et un principe est
toujours premier: il n'y a rien avant lui. Un principe ne peut donc
être démontré. Mais un principe permet de prévoir; par exemple
si les hommes sont méchants, dès que la contrainte disparaît, la
méchanceté apparaîtra.
A partir du moment où l'auteur déduit une prévision du principe,
il peut toujours observer dans l'existence que son calcul se réalise
effectivement: par exemple dans le texte la disparition de la
dictature et de l'ordre qu'elle impose amène un comportement plein
de méchanceté du Sénat.
Ainsi, la deuxième partie ne contredit pas la première: Machiavel
ne cherche pas à démontrer le principe mais à le prouver en le
mettant en relation avec l'expérience. Prouver c'est toujours
ramener à une expérience. Par exemple Descartes met en évidence
la première des vérités, l'existence qui s'éprouve elle-même:
je suis, j'existe.
Machiavel est tout simplement pragmatique: si un principe permet de
prévoir ce qui se passera, et d'échapper à la mort, ce principe
est "vrai" pour la vie d'un Prince. L'utilité suffit.
(réponse élaborée en fonction du corrigé de votre professeur).
=
Le temps est le père de toute vérité, qu'est-ce que cela peut
signifier?
-
Réponse possible:
ou bien que le changement fait apparaître la réalité en faisant
disparaître les raisons de la dissimuler. Ou bien, on peut aussi
comprendre de façon complémentaire que le temps permet la
multiplication des expériences et une certaine "marche"
vers la vérité.
(réponse possible d'un candidat).
Vous pouvez ajouter un exemple comme celui de l'amitié que le temps
"révèle" parfois en la réduisant à un simple intérêt
...
Pour instaurer un
dialogue avec votre examinateur, vous devez quitter le ton de
l'affirmation: lui poser une question ou mieux vous interroger vous-même
à voix haute devant lui: par exemple:
A la fin de votre oral:
je me demande si cette séparation radicale de la politique et de la
morale peut vraiment s'accompagner d'un réel progrès?
Ou encore: N'est-ce pas à l'origine de la démocratie dans cette
invention de tribuns élus, gardiens de la liberté que je viens
d'assister?
(S'il le souhaite,
votre examinateur saisira l'occasion d'engager un dialogue dans lequel
vous essaierez ensemble de former des idées: dans tous les cas, vous
chercherez à terminer par les intérêts philosophiques du textes, à
les insérer dans le dialogue: rappelons que l'intérêt philosophique
d'un texte, c'est ce qu'il apporte à la recherche de la vérité et/ou
de la justice)
Ce qui vous amène au
problème: est-ce le mal que nous prêche Machiavel? ou au
contraire, n'a t-il pas le souci de l'efficacité et de la paix sans
lesquels le bien apparaît et disparaît aussitôt? ..
-
Note
importante: quelle importance accorder à
la biographie de l'auteur?
Seuls des éléments qui permettraient de mieux comprendre le texte
sont intéressants dans un oral. Il est bon de savoir que Machiavel,
après l'expulsion des Médicis s'est mis au service de la république
que cette expulsion a permis de rétablir (à partir de 1494 à
Florence). Un peu avant la rédaction de ce texte, en 1512, la République
disparaît et Machiavel doit s'exiler. Il écrit alors des oeuvres
politiques. De retour, les Médicis règnent jusqu'en 1526 . Après
Machiavel retrouve son poste au service de la République. C'est
donc quelqu'un qui sait bien de quoi il parle, un grand serviteur de
la République et de la liberté!
Bonne réussite à
tous. Joseph Llapasset
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3 Votre oral pas à pas
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