L'Homme est le seul être vivant
qui a juste assez de conscience pour éprouver, désirer,
vouloir et se rendre compte que "tout ce qu'il sait c'est
qu'il ne sait rien", puisque l'essentiel lui échappe. L'Essentiel?
C'est peut-être tout simplement la Vie.
- Il vit,
mais ne sait pas ce qu'est la Vie.
Il pense, mais ne sait pas ce qu'est
l'esprit.
Il existe dans le monde, mais n'en connaît
ni l'origine ni la fin.
Il naît et meurt sans l'avoir voulu.
Il ne lui reste, tout compte fait, que le "Hic et
nunc", c'est à dire l'"Ici et
le maintenant".
A première vue, en ce qui
concerne ce "Hic et nunc", tout paraît clair.
Tout paraît toujours clair à première vue et pourtant qui ne
s'est jamais posé la question avec Musset:
"Qu'est-ce
donc que ce monde
Et qu'y venons nous faire?"
Et voilà que
l'homme, partie infime de ce grand Tout, dans sa soif et sa faim
de nourritures pas seulement terrestres, se retrouve seul: seul
sujet au milieu d'un monde d'objets. Lui, l'unique spectateur...
et il s'élève alors en lui une passion à la mesure de ses
questions, une passion de la connaissance, sans cesse avivée par
la difficulté, voire l'impossibilité, à trouver des réponses.
Le voilà "embarqué", pour reprendre le terme
de Pascal, dès sa naissance, dans une aventure à courir, au
risque de se perdre. Mais peut-on se perdre dans cet infini qui
m'apporte, qui m'emporte mais de toutes façons me porte?...
Je ne sais pas d'où je viens, mais je suis là, je ne sais pas où
je vais mais j'y cours!
Nous comprenons que, méditant cette pensée inscrite sur le
fronton du temple de Delphes: "Connais- toi toi-même et
tu connaîtras l'univers et les dieux", Socrate ait préféré
centrer sa réflexion sur notre intériorité: "Connais-toi
toi-même" puisque c'est en nous que se fait le contact
avec le monde, puisque c'est dans notre corps, notre cœur
et
notre esprit, que s'éveille, se nourrit et se fortifie l'espoir
de donner un sens à notre existence, de découvrir une présence.
- "Il est absurde que
tout soit absurde"
écrivait E. Mounier dans L'Introduction aux
Existentialismes
Peut-être le néant
n'est-il qu'apparence puisque la misérable poussière que je suis
se trouve là, au cœur
du monde et désespère. Je ne suis peut-être
qu'un "rien du tout", mais ne vaut-il pas mieux n'être
qu'un "rien du tout" que ne pas être du tout puisque ce
rien désespère mais trouve, on ne sait où, la force d'espérer,
car il pressent, au delà de ses limites, le mystère qui le fait
être.
Cette poussière qui désespère mais qui s'éprouve comme vivant
et qui cherche à comprendre, avec les moyens du bord: c'est
l'Homme! Gardons-nous cependant de crier victoire, nous serions déçus
car nous transformerions nos maigres connaissances en prison. Le
sujet pensant que nous sommes échappera toujours à la maîtrise
de la raison. Comment entrer dans une définition alors que nous
la produisons? Nous sommes source, acte. Une source, un acte ne
s'"attrapent" pas! La source jaillit en un perpétuel
renouvellement, l'acte se fait, au présent, l'homme vit, pense et
transforme le monde mais il ne peut se penser lui-même, sa
transcendance ne va pas jusque là. Il s'éprouve lui-même comme
être pensant:
Reprenons les
questions que posait Kant dans sa Logique
:
- que puis-je savoir?
- que dois-je faire?
- que m'est-il permis d'espérer?
- qu'est-ce que l'homme?
Quels sont donc ses moyens de connaissance, quel est son désir, y
a t-il une route, jusqu'où mène-t-elle? vers quels rivages?
Nous essayerons de nous situer face à ces questions
==> Aller à la page
2 (1ère partie: difficultés) |