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Ne jamais
perdre de vue que Oncle Vania (1899) vient dix ans après
Le Génie des bois (1889) et que c'est Oncle Vania qui
permet, par comparaison de ce à quoi il a dit non et de ce à
quoi il a dit oui, de saisir le mouvement de l'auteur, d'une
part de ce que Tchékhov a refusé de reprendre parce qu'il le
considérait comme des erreurs ou des impasses - (le vaudeville,
le bavardage ridicule, la prolixité, la démesure pour tout
dire) - et ce vers quoi il s'est orienté: un classicisme qui
culminera dans La Cerisae et grâce auquel son art se
manifestera. Ainsi Le Génie des bois, Oncle Vania,
La Cerisae nous permettent de comprendre le
mouvement par lequel Tchékhov devient l'auteur que nous
admirons: Oncle Vania est sur le chemin qui aboutira à La
Cerisae, à l'apologue d'une pétrification tragique et
progressive, d'un désespoir absolu brodé d'une résignation
qui se fait de plus en plus discrète et pourtant de plus en
plus pesante.
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A partir de
Oncle Vania, Tchékhov saisit que le texte ne peut pas tout
dire et en particulier dire l'indicible du sentiment, exprimer
le monde de l'ennui étouffant progressivement toutes les
tentatives pour l'exorciser; le tout est rythmé par la balançoire
ou si l'on préfère le balancier, et englué dans l'éternel
retour du même, dans des figures parodiques du destin: il en
conclut alors qu'il faut mettre des portes et des fenêtres
ouvertes dans le texte: des silences, des points
de suspension, le poids du non-dit, l'ouverture sur l'insondable
et inquiétant inconscient.
Il s'agit de faire signe vers l'essentiel d'un sentiment que
seul peut ressentir le spectateur qui fait alors plus que la
moitié du chemin vers l'effroi devant ce qui fait apparaître
et fait disparaître, ce qui défie toute tentative de
construction d'un bonheur, comme un ordre fatal que les
personnages ne peuvent quitter, comme un texte écrit que les
personnages ne peuvent écrire: des personnages condamnés à être
dévorés vivants sur place par le temps destructeur.
On est
loin du Génie des bois et si, dans Oncle Vania, des passages ou
des répliques sont reprises, l'ensemble est déplacé et plongé
dans un autre contexte qui en change le sens.
Conséquences
pour un prépas scientifiques:
Dans les références que vous seriez amenés à faire au Génie
des bois pour vos dissertations, il ne faudra surtout pas
confondre, par exemple ce que dit tel personnage du Génie des
bois et la même réplique qui est attribuée à un autre
personnage dans Oncle Vania. Plus généralement, vous ne
l'utiliserez qu'exceptionnellement pour montrer la spécificité
de Oncle Vania, puisque de toutes manières, on vous demande de
vous en tenir au thème et à l'oeuvre.
Approfondissez Oncle Vania, c'est de bonne méthode que de viser
le but et rien que lui.
Nous
allons maintenant donner quelques perspectives sur l'Acte II.
Celui qui s'intéresse aux personnages, sera satisfait de les
retrouver. Peut-être faudrait-il les aimer? Peut-être les
aimons-nous déjà? |