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PHILOSOPHIE - CLASSES PREPAS par J. Llapasset

La recherche du bonheur

Comprendre Le Clézio.   

La menace et le recours. Le paradis des amours enfantines . (pages 20 et 21) 

(Perspectives par Joseph Llapasset sur Le chercheur d'or)

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Je regarde. La vieille maison, revêtue d'un habit de lumière, auréolée par le soleil, prend toute sa dimension (grande) et se trouve parée d'une couleur inoubliable qui accompagne encore le narrateur jusque dans son "aujourd'hui" d'où il raconte le paradis des amours enfantines et le sauve de la disparition.
Autre rémanence pour Alexis, cette fois, l'impression de chaleur par ses pieds (terre) et par son visage (fournaise), de haut en bas qu'il a ressenti dans la première scène.
Je secoue. Premier rite purificateur qui débarrasse ses vêtements des souillures de la terre et de la fournaise (noter "recouvrent" qui marque l'étendue de la souillure) 
Quand j'approche: il entend avec piété la voix douce de sa mère qui, en transmettant les paroles qui s'élèvent vers Dieu, apprend et fait réciter des prières à Laure. Ce sont les deux femmes qu'il aime et en les entendant, il voit la confiance et l'amour qui unit sa mère et sa soeur.
Quelle douceur que de les entendre! A les entendre il voit clairement, il comprend: ici, pas d'ambiguïté ou de réticences! Les larmes qui glissent alors des yeux de l'enfant sont bien différentes de celles qui tombaient devant l'agitation et la fournaise, les cris et les chuchotements: ce sont des larmes de soulagement et de joie, devant les coeurs purs.
Pieds nus, en toute confiance, comme un bienheureux immortel: il est libre Alex.
Je vais, je puise ... Comme il prend son temps, comme il s'applique à purifier son corps en suivant un ordre intelligent (d'abord les mains): du même coup il retrouve la fraîcheur.

A la surface. Passage très important pour comprendre Le Clézio.
Émerveillement de l'enfant, du narrateur, de l'auteur créateur, devant les choses mêmes avec le parti pris des choses, avec ce respect devant ce qui semble insignifiant qui animait Francis Ponge, comme si l'insignifiant était la porte du mystère. Quel bonheur extraordinaire de regarder ce qui apparaît dans l'ordinaire, de "jouer le jeu de l'être" avec ce qu'il y a de plus humble (=> Ponge, La bougie), comme si cette humilité se mettait à parler. Le sens est donné dans le bonheur d'une contemplation pour ainsi dire portée par le monde. Là est l'enlacement, source du bonheur. C'est là qu'il faut le chercher: que ce soit sur la mer, que ce soit à Rodriguez ... 
Entendre le bruit doux des oiseaux, sentir l'odeur de la fumée, "voir" l'arrivée de la nuit dans sa tête. C'est l'heure où Alexis se transforme en sentinelle, il va au grand arbre du bien et du mal pour attendre... Attendre quoi? Mais une révélation: le Sens.

 Le Sens, ce n'est pas l'éternel, ce n'est pas l'avoir, vers quoi tout cela semble pointer ... puisque tout va disparaître: sous les coups de l'oncle, de la banqueroute, et même de la nature (l'ouragan). Le Sens n'a-t-il pas été donné par la femme indienne? Dignité, liberté, refus de s'engluer dans l'avoir d'un remerciement ou d'une récompense et par dessus tout la marche: s'en aller pour revenir?
Homme libre toujours tu chériras la mer. (=> Baudelaire)