Appelons
racines ce de quoi une oeuvre se nourrit et ailes
la parole et le chant.
Que
d'excellents professeurs de prépas conseillent à leurs étudiants
de s'en tenir au thème, La recherche du bonheur et à
chaque oeuvre du programme dans sa reliance avec les deux
autres, témoigne simplement de leur souci, de leur projet: les
aider à réussir leur concours en centrant leurs efforts sur le
simplement utile. Mais, ne faut-il pas d'abord prendre en considération
ce qui vraiment utile, ce qui importe: il est impossible de
couper une oeuvre de ses racines. Comment comprendre le parcours
de l'auteur qui apparaît singulièrement dans l'originalité de
l'oeuvre pouvant aller jusqu'à la rupture, comment cerner
l'originalité de "Le chercheur d'or", sans avoir
saisi les racines et les radicelles qui le nourrissent?
Comment
saisir Le Clézio qui joue le jeu de l'être avec une boîte
d'allumettes (La Fièvre, page 117), sans connaître ce
parti pris des choses qui animait Francis Ponge? Ne s'agit-il
pas chez les deux auteurs de sauver le réel de sa profonde
inexistence par la parole et le chant? Comment y arriver si
notre regard est aveugle, fermé par une taie? (Le Désert,
page 293, 295)
Même
en science on constate que plus la recherche semble gratuite,
plus elle s'élargit aux dimensions d'un monde et plus sa fécondité
est grande: c'est dire que le simplement utile, la simple
recherche d'une application est un appauvrissement a priori.
Voilà
pourquoi nous allons essayer de repérer quelques unes de ces
racines qui nous seront bien utiles d'abord pour comprendre
l'expression La recherche du bonheur, pour épouser le
mouvement et le sens de l'oeuvre au programme et même pour
relier les trois oeuvres du programme.
Au prix de cet effort d'élargissement, de culture générale
qui semble toujours inutile aux gens pressés, nous obtiendrons
non seulement l'efficacité mais aussi et surtout l'activation
en nous de l'existence spirituelle, ce qui
n'est pas peu, on en conviendra, activation par un effort pour
suivre Le Clézio qui cherche à dire -dans une ambition qui le
rapproche de Mallarmé et de Ponge- ce qui par nature est
indicible: le concret.
Courage ! Ne s'agit-il pas de vivre avec le monde dans la
jubilation d'un bonheur digne des îles fortunées?
Comment? En dénommant à jamais ce qu'on a arraché au présent
qui s'enfuit. (L'Extase matérielle, page 194). |