I- Sur
le premier alinéa: d'où vient le conflit?
De
"Il n'y a donc objectivement (en théorie)
aucun conflit entre la morale et la politique. Par
contre, subjectivement ... ce conflit
subsiste.
Jusqu'à "Il faut
que tout politique plie le genou devant le droit.
mais elle peut en revanche espérer, même si c'est
long parvenir à un niveau où son éclat brillera
de manière durable."
Les
prépas trouveront le texte dans Garnier Flammarion
n°573, texte que nous ne pouvons reproduire pour
respecter les droits des traducteurs J-F Poirier et
F. Proust.
Nous proposons une explication de ce texte très
difficile. Il a été donné à l'agrégation de
philosophie.
Nous avons distingué trois parties dans ce
texte:
-le premier alinéa;
-puis jusqu'à "-Il faut tenir le droit des
hommes pour sacré": Kant donne la parole à
ses adversaires;
-enfin, la pensée de Kant dans les neuf dernières
lignes.
|
= Présentation:
Kant, comme ses contemporains donne un sens limitatif au
politique. Il envisage la politique comme l'art de gouverner:
c'est l'apanage des princes (regent). Cette politique doit se
soumettre aux lois qui sont elle mêmes soumises à la morale.
Pourtant l'histoire témoigne du contraire: si le droit change
avec les régimes c'est qu'il dépend de la politique et non
de la morale. Le philosophe proteste contre cet état de fait
et contre les doctrines qui tentent de le justifier. Dans ce
passage, Kant critique les tentations empiristes et entreprend
de définir la véritable nature de ce conflit millénaire
entre la morale, le droit et la politique. Il affirme la
souveraineté absolue de la loi, morale et, ce faisant, la
validité de sa propre doctrine.
I-
Sur le premier alinéa: d'où vient le conflit?
A
- Le conflit n'a pas de bases objectives car
il n'est pas fondé théoriquement. Est objectif ce qui est
valable pour tous les esprits, "objectivement"
signifie en ce qui concerne les principes pratiques qui
permettent d'éprouver les comportements, qui doivent être
rationnels, universels.
Se rapporter à La Critique de la Raison pratique: les
principes pratiques sont subjectifs quand ce qu'ils stipulent
n'énoncent des maximes que valables pour le sujet dans sa
seule volonté. Ils sont pratiques quand cette stipulation est
reconnue comme objective c'est à dire valable pour la volonté
de tout être rationnel. Du point de vue d'un système,
"objectivement", il n'y a pas de conflit entre la
morale et la politique. Pour Kant, l'objectivité résultant
de l'accord des esprits entre eux, il y a donc une possibilité
d'accord de tous les êtres rationnels.
Cette thèse se rattache à sa doctrine morale. La morale
consiste dans le respect de la loi morale universelle par sa
forme: le commandement n'assigne pas un but à l'action
humaine: agit selon la maxime qui peut en même temps s'ériger
en loi universelle. Par exemple, le vol n'est pas
universalisable. Mais l'accomplissement, l'effectuation n'est
pas impliquée dans l'idée du devoir. pour Kant le résultat
de l'action n'est pas ce qui est important: le devoir doit
commander sans condition. L'accomplissement ne se rattache au
devoir que par un jugement synthétique a priori. Il ne peut
pas y avoir conflit entre morale et politique parce que le
conflit que l'on constate n'a pas comme source une source théorique.
B
- Le conflit se développe subjectivement car
les hommes ne se servent pas des maximes objectives mais de
maximes non universelles, valables pour le sujet dans sa seule
volonté.
Il y a un contresens à éviter: cela ne signifie pas
l'opposition du théorique et du pratique mais de l'objectif
et du subjectif. Ce qui n'a pas de valeur en pratique n'a pas
de valeur en théorie. Si la morale ne s'accorde pas avec la
politique réaliste c'est parce que son objectivité théorique
rencontre un obstacle: le pathologique.
Le devoir,
prescription rationnelle émanée du théorique objectif, est
une obligation parce qu'il rencontre un obstacle, parce qu'il
y a une résistance (penser à la belle âme qui accomplit le
bien sans avoir à le vouloir: le devoir est vécu au
contraire comme effort).
"Regarder au fond des yeux": il s'agit
d'affronter le mal intérieur: le problème politique est un
problème de domination morale de l'individu: tout dépend de
la domination de la raison sur la sensibilité. Ici les
adversaires de Kant sont tous les utilitaristes, Hobbes,
Machiavel. Il y a chez Kant un dualisme complet: un principe
mauvais dans l'homme et le devoir.
Chez Kant, on doit surveiller ce principe mauvais. Cela présuppose
qu'il nous apparaisse toujours et que le devoir soit toujours
clair. Ce que nous avons à faire, nous le savons toujours dit
le début de La critique de la raison pure. (Voir l'opposition
de Hegel selon qui, il y a une complexité de l'âme humaine
et le roman de Marivaux: La vie de Marianne. C'est le
roman d'une existence: au début le personnage est conscience
de soi même, volonté d'être libre, reconnue comme
quelqu'un: elle entre dans l'existence et se manifeste comme
une belle âme, ne fait jamais triompher son égoïsme.
Pourtant dans son existence elle est la réfutation de la
belle âme et se noie dans la satisfaction d'avoir été généreuse.
(Hegel remarque que même Jésus a pu être satisfait de ce
qu'il avait fait et qu'on ne peut pas fonder une morale sur
l'intention).
Kant maintient son point de vue: ce qui est important c'est de
lutter contre la malice: la volonté peut obéir à l'impératif
catégorique; mais le principe mauvais qui est en nous ne se
laisse pas faire, ment, il est traître, il raisonne, il présente
ses arguments. Les inclinations ont une activité interne,
elles se savent argumentées et les empiristes recueillent ces
arguments comme "faiblesse de la nature humaine."
Kant
exige tout. L'homme d'État ne pourra jamais se
justifier avec des arguments fondés sur l'existence des
inclinations, des penchants égoïstes présents dans tous les
hommes; La politique n'est qu'une discipline humaine qui
n'intervient qu'à cause de l'existence des inclinations
subjectives.
C
- Le mouvement de Kant. Il pose des limites
mais dans le domaine des limites, la connaissance est
parfaite. il procède a priori. pour Kant le conflit entre la
morale et la politique est à l'intérieur du sujet humain. Si
le sujet conscient est volontaire, n'agit pas toujours selon
la raison, c'est qu'il relève de deux natures. Pour Kant la
raison qui se trouve en chaque homme est la même chez tous
les hommes: en conséquence, si tous les hommes agissent par
devoir, il n'y aura pas de conflit entre eux.
Kant n'a peut-être pas vu qu'une accumulation quantitative
peut se renverser dans une différence qualitative et que le
mieux est l'ennemi du bien.
"Ratiocinants" = allusion aux cyniques et
aux moralistes despotiques qui justifient le despotisme:
Callicles, Hobbes, Machiavel.
- II- Sur
le deuxieme alinea: grande difficulté du texte
- III- La
pensee de Kant
|