"Nous
saurons que la nature de la matière, ou du corps pris en général
ne consiste point en ce qu'il est une chose dure ou pesante, ou
colorée, ou qui touche nos sens de quelque autre façon, mais
seulement en ce qu'elle est une substance étendue en longueur,
largeur et profondeur." Descartes, Principes de la
philosophie,II, Paragraphe 4
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Descartes fonde la science du macroscopique et du mécanisme en répudiant
le qualitatif par lequel je vois la matière tel que je suis et en
prescrivant le quantitatif par lequel je mesure au moins la matière dans
sa réalité, l'étendue.
Par là il opère la mathématisation du réel grâce au calcul et à la
mesure. C'est que les sens ne nous donnent que des qualités secondes et
non les qualités premières, ces invariants que toute science nécessite.
La définition de la matière sera abstraction pure de l'étendue et du
mouvement, des qualités premières. La matière relève du quantitatif
par la masse (= quantité de matière) et du géométrique par la forme.
Ainsi toute la physique de Descartes ne sera selon ce qu'il nous en dit
que géométrie. Il devient dès lors possible de penser la matière
selon des caractéristiques purement géométriques.
La matière est donc la substance des corps ayant pour essence l'étendue.
La difficulté vient de ce que la matière reste un substrat au point
qu'il va falloir tout expliquer par des chocs de ce qui se touche et donc
une infinité d'intermédiaires, puisque dans une telle perspective ce qui
ne se touche pas ne saurait être en interaction. Par exemple la
gravitation, l'aimantation, exigent l'invention de toute une série
d'intermédiaires qui permettraient même d'expliquer le rayonnement par
une suite chocs.
"C'est seulement la théorie qui décide ce qui peut être
observé... C'est seulement la théorie, c'est à dire la connaissance des
lois naturelles qui nous permet de déduire, à partir de l'impression
sensorielle, le phénomène qui se trouve à la base de notre
observation." A. Einstein, in Heisenberg, La partie et le tout,
Albin Michel, 1972, page 94
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