Rappelons
que nous vous proposons des pistes: vous avez à
choisir, à reprendre tel ou tel aspect, en pensant par vous même,
sous le regard de tous, en vous détournant de l'opinion
particulière pour vous tourner vers une pensée universelle que
vous aurez produite. L'opinion est de l'ordre du contingent, du
devenir, la pensée est de l'ordre du nécessaire, ou du moins
de l'universel qu'elle vise.
=
La philosophie
n'existe pas, il n'y a que des philosophies. L'histoire de la
philosophie peut-être vue comme un champ de batailles, les
philosophies se réfutant à qui mieux mieux:
Kant réfute le cartésianisme , Hegel a réfuté Kant. Mais on
continue d'étudier ces philosophes et on ne pourrait penser par
soi même sans la lecture de Kant et de Hegel ...
D'ailleurs, je vous renvoie à la lecture de Kant à la suite du
Projet de paix perpétuelle: peut-il y avoir une paix
entre les philosophies?
Je vous renvoie à Hegel, à l'Introduction des Leçons sur
l'Histoire de la philosophie. S'ils avaient été réfutés au
sens absolu du terme, je n'aurais pas l'audace de vous les
conseiller.
La réfutation se présente comme la condamnation radicale d'une
thèse: on la rejette en prouvant sa fausseté.
Une
philosophie apparaît:
-
Une philosophie est d'abord nouvelle et elle se
fait gloire de réfuter celles qui précèdent. Mais cette réfutation
n'est pas absolue: Bergson, par exemple a du d'abord sympathiser
avec Plotin, avec Rousseau, en reconnaître les mérites pour
enfin, en marquer les limites: ce n'est pas une réfutation au
sens strict du terme. La philosophie de Plotin et celle de
Rousseau vont l'accompagner jusqu'à sa mort et, souhaitait-il,
après sa mort. Il semble bien que Bergson porte ces deux
philosophies en lui ou plutôt qu'il soit porté par elle comme on
porte un enfant sur un chemin qu'il va continuer. Avant de "Réfuter"
Spencer, Bergson l'a porté en lui. C'est vrai de Descartes qui réfute
Aristote mais qui ne le perd jamais de vue. Kant admire Rousseau
et Hegel admire Kant. Une philosophie reste toujours vivante, même
après sa réfutation ce qui semble nous indiquer qu'elle ne peut
être réfutée, abandonnée.
Parce
qu'elle était nécessaire à son époque, une philosophie échappe à
sa réfutation.
Une
nouvelle philosophie pourra tout au plus la situer dans son époque,
ce qui n'est pas une réfutation. On ne peut donc réfuter une
philosophie au sens absolu du terme: on la renvoie à un moment de
l'histoire, mais cette philosophie reste valable. On a cru réfuter
le stoïcisme, et voilà que Spinoza "accomplit" le stoïcisme.
Une escouade de religieux thomistes ont eu pour mission de réfuter
L'Éthique
de Spinoza, mais ils n'ont pu que la faire disparaître et
la revoilà qui réapparaît par l'admiration que lui portent
Hegel et Bergson. Hegel est allé jusqu'à dire que tout
philosophe a aussi la philosophie de Spinoza. Et Bergson a retrouvé
l'intuition de Spinoza.
Plus près de nous, le philosophe Michel Henry m'a confié qu'il
avait passé une année d'études à lire l'Éthique. Et qui
croira que le spinozisme a été réfuté définitivement?
Si on entend par réfuter, renvoyer à un moment du devenir passé,
subordonner, alors une philosophie peut être réfutée.
D'ailleurs si une philosophie pouvait être réfutée, elle
laisserait définitivement la place à une autre
philosophie. Ce ne serait pas un champ de bataille mais une
succession qui apparaîtrait.
On peut donc aussi bien dire: on peut réfuter une philosophie que
on ne peut pas réfuter une philosophie. Ajoutons qu'il est plus
facile de réfuter quelqu'un qui a disparu.
Piste
de lecture
Vous pouvez aussi lire
dans De la philosophie, tome I, Hachette Supérieur, de Michel
Gourina, pages 206 à 213.Tout y est, pour votre devoir.
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Bonne continuation |