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Aides à la dissertation sous forme d'esquisses 

Niveau classes prépas - Colles et Dissertations par J. Llapasset

L'erreur est-elle de notre faute ?

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Rappelons que nous vous proposons des pistes: vous avez à choisir, à reprendre tel ou tel aspect, en pensant par vous même, sous le regard de tous, en vous détournant de l'opinion particulière pour vous tourner vers une pensée universelle que vous aurez produite. L'opinion est de l'ordre du contingent, du devenir, la pensée est de l'ordre du nécessaire, ou du moins de l'universel qu'elle vise.

= Exercez-vous à rechercher la problématique grâce à ce texte de Descartes, Principes de la philosophie, paragraphe 42.

"Mais, pour ce que nous savons que l'erreur dépend de notre volonté, et que personne n'a la volonté de se tromper, on s'étonnera peut-être qu'il y ait de l'erreur en nos jugements. Mais il faut remarquer qu'il y a bien de la différence entre vouloir être trompé et vouloir donner son consentement à des opinions qui sont cause que nous nous trompons quelquefois."

Étonnez-vous, cela vous mettra sur le chemin de la problématique.
Si on me signale une erreur en pointant simplement le doigt sur mon devoir de mathématiques, je corrige tout de suite et je ferai attention de ne pas recommencer. Si on relève une faute, je sais bien que je ferai souvent semblant de réparer mais ... que je recommencerai.
Je m'entends dire: c'est de ta faute ! Cela signifie, objectivement, que je n'ai pas fait ou pensé ce que je devais faire ou penser. Mais, du point de vue subjectif, c'est moins clair. Cela a-t-il été fait ou pensé avec advertance, en toute conscience: alors c'est bien une faute comme lorsqu'on fait le mal alors qu'on connaît le bien, consciemment et volontairement. 

Mais si nous n'avons pas fait exprès, si je me suis trompé, j'ai confondu le vrai et le faux, cette erreur involontaire  peut-elle être considérée comme une faute. Si je peux vouloir le mal en toute conscience, avec appétit (=> faute), je ne peux jamais vouloir me tromper et en ce sens, je fuis l'erreur.
Voilà de quoi vous étonner devant le sujet. Comment serions-nous responsable (c'est de ma faute) d'une erreur que nous n'avons pas voulu faire en toute conscience et en toute liberté? La responsabilité exige en effet la conscience de ce que l'on fait, la connaissance du bien et la liberté dans l'action accomplie: 

la volonté éclairée par la conscience et par l'intelligence. Maintenant que la volonté affirme plus que ce que l'intelligence permet d'affirmer, voilà une erreur: est-ce une faute? Ce qui n'est pas voulu consciemment peut-il être de notre faute? 
L'homme, être raisonnable sensiblement affecté, a-t-il le devoir de se méfier de l'opinion et de s'informer?
 

L'erreur

C'est une affirmation (= un jugement) qui donne pour vrai ce qui n'est pas dans la réalité ou qui ne lui est pas conforme. Si on affirme comme vrai ce qui est faux, cela signifie que l'erreur est dans un jugement. C'est l'entendement qui juge.

Faute

Violation  volontaire d'une règle morale, avec advertance, liberté et responsabilité.

Pour la recherche des idées.
-
Je vois le bien et je fais le mal ! J'ai des remords , dans le meilleur des cas.
- Je me trompe, j'ai des regrets.

Pour la recherche du plan. 
Vous avez donc à scruter les origines de la faute et à voir si elle relève de la liberté et de la responsabilité. Alors l'erreur serait de notre faute. Dans le cas contraire, l'erreur ne serait pas de notre faute, notre devoir étant seulement de la rectifier lorsque nous en prenons conscience.
La troisième partie cherchera à dépasser les thèses contradictoires.
"Toutes nos erreurs sont des jugements téméraires et toutes nos vérités, sans exception, sont des erreurs redressées." Alain, Vigiles de l'esprit, page 35.

=> Voilà quelques citations comme autant de pistes de lectures:
Descartes, Méditations métaphysiques, IV: 
"D'où est-ce donc que naissent mes erreurs? C'est à savoir de cela seul que, la volonté étant beaucoup ample et plus étendue que l'entendement, je ne la contiens pas dans les mêmes limites, mais que je l'étends aussi aux choses que je n'entends pas."
Victor Brochard, De l'erreur, page 213: 
"Il n'est rien qui soit plus véritablement à nous que nos erreurs."
Kant, Logique, Tissot, page 75:
"La cause fondamentale de toute erreur est donc unique, et ne doit être cherchée que dans l'influence occulte de la sensibilité sur l'entendement, ou pour parler plus exactement sur le jugement ... ce qui rend l'erreur possible c'est donc l'apparence suivant laquelle le simple subjectif est pris pour l'objectif."
Logique de Port Royal, III, Introduction:
"La plupart des erreurs des hommes viennent bien plus de ce qu'ils raisonnent sur de faux principes, que non pas de ce qu'ils raisonnent mal sur leurs principes."

Piste de lecture:
L'incontournable Spinoza:
- Éthique, quatrième partie, proposition 1, Scolie
- Traité de la réforme de l'entendement, paragraphe 66

Bonne continuation