Rappelons
que nous vous proposons des pistes: vous avez à
choisir, à reprendre tel ou tel aspect, en pensant par vous même,
sous le regard de tous, en vous détournant de l'opinion
particulière pour vous tourner vers une pensée universelle que
vous aurez produite. L'opinion est de l'ordre du contingent, du
devenir, la pensée est de l'ordre du nécessaire, ou du moins
de l'universel qu'elle vise.
Rendez
à César ce qui est à César.
Sujet difficile car il est difficile de séparer cet extrait de sa
suite immédiate: rendez à Dieu ce qui est à Dieu.
On vous dira que vous avez à vous centrer sur le sujet donné et
rien que sur lui.
Certes, mais vous allez découvrir que le pouvoir temporel de César
n'est pas indépendant, loin de là du pouvoir spirituel.
Que s'est-il passé?
- On raconte que des juifs auraient voulu faire tomber Jésus dans
un piège en lui demandant s'il fallait payer l'impôt à César
, le détenteur de la puissance matérielle: si Jésus répondait,
de ne pas payer l'impôt on le dénoncerait aux occupants
romains, si Jésus répondait de payer l'impôt on le dénoncerait
aux religieux pour qui toute puissance vient de Dieu. En
demandant à voir une pièce et en montrant l'effigie de César
qu'elle porte, Jésus peut répondre logiquement : rendait à César
ce qui est à César. Mais au grand désappointement de ceux qui
veulent le faire tomber dans un piège il ajoute: rendez à Dieu
ce qui est à Dieu. Ainsi, il délimite deux domaines, le domaine
de l'État et le domaine de la foi, de la vie privée.
Vous commencez peut être à voir le problème: ces deux
domaines sont-ils vraiment distincts?
Déterminons les deux sortes de pouvoirs auxquels c'est un devoir
d'obéir:
-
le pouvoir spirituel désigne celui d'un personnage qui prétend
l'exercer parce qu'il lui vient de Dieu: il commande donc au
nom de Dieu.
- Le pouvoir temporel désigne la possibilité pour quelqu'un
d'utiliser la force matérielle dans le but de contraindre.
L'histoire abonde d'exemples de luttes sans merci entre ces deux
pouvoirs. Rousseau par exemple met en garde contre les ingérences
d'un souverain, il s'agit du Pape.
Mais ces deux pouvoirs ne sont pas affermis définitivement par
une force matérielle ou une force spirituelle: en fait c'est
une lutte pour le pouvoir et le pouvoir ne se partage pas.
Or
pour que la formule soit applicable, ne faudrait-il pas que les
deux domaines ne se rencontrent pas, puissent être, pour
ainsi dire, simplement juxtaposés.
D'où
votre problème: l'échec de la formule tient-il à la mauvaise
volonté des hommes ou à l'impossibilité de l'appliquer car
elle se heurte à une "mêlée" et elle ne peut pas
prendre ce qui, comme chien et chat se fuient tout en étant
toujours
mélangés.
=>
Il est en effet toujours possible que l'homme de foi dise que Dieu
étant le créateur de tout, tout lui appartient, même
l'autorité de César, que toute autorité venant de Dieu, il
serait souhaitable que l'église commande l'Etat.
=> La formule qui semble en théorie
imparable ne dit pas comment distinguer le pouvoir temporel du
pouvoir spirituel: cela reviendrait à distinguer l'âme et
le corps: ne sont-ils pas tellement imbriqués: comment un pouvoir
temporel ne s'enracinerait-il dans un pouvoir spirituel, ou
ne se présenterait-il pas comme appuyé par le pouvoir spirituel?
Comment un pouvoir spirituel ne se présenterait-il pas
comme ayant pour domaine le pouvoir temporel, pour la réalisation
de la volonté de Dieu.
Bonne
continuation
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