=>
Tout d'abord, une petite révision:
La
vérité et la croyance et en particulier
ce qui concerne l'opinion (dernière partie de la page), pour bien
distinguer la crédulité, l'opinion, la foi.
Croire
et savoir
=>
Le terme a une origine latine, le verbe 'credere' qui signifie: avoir
confiance en quelqu'un ou quelque chose, en conséquence, on
confie ou on prête quelque chose parce qu'on a confiance et enfin croire
c'est à dire: donner son assentiment à ce qui nous semble une
vérité certaine qui cependant manque de preuve et qui exige donc la
participation de la volonté(l'évidence intellectuelle n'y étant
pas): ce qui fait dépendre la croyance plus
du courage que d'une lumière intellectuelle indiscutable. Nous avons
donc dans la croyance la position d'une vérité par la volonté, ce
qui implique comme le dit magnifiquement Rabier dans Psychologie
que "Toute volonté de croire est inévitablement une
raison de douter." (On peut se reporter dans une grande
bibliothèque à la huitième édition, page 270). Une première piste
de lecture.
Victor
Brochard, de l'erreur, sera me semble-t-il,
consulté avec profit pour déterminer les problèmes que le thème de
l'année va soulever (pages 104 à 151):
"Il ne suffit pas de
vouloir pour croire, mais on ne croit que parce que l'on veut."
Il faut donc bien réfléchir sur le
rapport entre la croyance et la
volonté, entre la croyance et
le doute dans cette seconde perspective
de lecture.
Pour
ce qui est du besoin de croire
qui, selon
Russel est "un des
pires fléaux de notre époque" , on peut se demander pourquoi
la croyance ressurgit sans cesse c'est à dire dans quoi
elle s'enracine. Couper
une tête de la croyance n'est-ce pas en faire surgir mille autres, et
notre siècle d'incroyance, n'est-il pas le siècle de toutes les
superstitions et de tous les fanatismes. Dans l'incroyance même, n'y
a t-il pas une forme de croyance qui se mesure , pour peu q'un croyant
discute avec un incroyant. Il faut donc que la croyance soit attachée
à l'homme et ne le quitte pas. Platon
dans la ligne et la caverne rattache
la croyance au corps, à la sensibilité. Troisième
perspective de lecture, incontournable: Platon, La République, fin du
chapitre VI, début du chapitre VII. A cette lecture, il faut ajouter
immédiatement, La
lettre à Ménécée d'Epicure: la croyance prolifère dès que la
pensée ne s'exerce plus, voilà pourquoi il faut philosopher à tous les
âges! Cela
vous amène à poser le problème de la croyance et de la raison:
grande difficulté, car ce sur quoi on pense compter pour échapper à la croyance ou tout au moins pour la tenir en
respect, la Raison se trouve engendrer des croyances quand elle s'élève
au dessus, au delà de la physique! On s'attendrait à ce que la science
échappe à la croyance mais sa propre marche (asymptotique) vers la
vérité s'appuie de croyance en croyance ou si on préfère sur une
succession d'erreurs rectifiées, chacune de ces erreurs étant
successivement prise pour une vérité en un certain sens et donc relevant
provisoirement de la croyance. On ne peut donc faire
de physique sans faire de métaphysique! =>
N'oublions pas le français en culture générale... Vous pourriez lire de Paul Bourget, Le disciple, en vous
attardant sur des formules bien frappées comme "Nous savons bien
que nous mourrons mais nous ne le croyons pas..."
Vauvenargues, Réflexions et maximes, pages 318
= Autre piste bien intéressante: Chercher l'incroyant ... il vous parlera
à sa manière de la croyance: Roger Martin Du Gard, Les Thibault, derniers volumes ...
Le problème de la croyance est posé avec beaucoup de maîtrise par Molière
tant dans L'école des femmes que dans Tartuffe.
Enfin, vous aurez à coeur de partir de définitions. Rien ne vaut: Alain, Définitions,
72 qui vous donnera tous les degrés du croire, selon lui...
La collection "Ce que je crois" devrait permettre un bonne
"accroche" pour votre thème. Lisez d'abord de J. Rostand, Ce
que je crois: "On ne peut jamais que croire ... toute la
différence est entre les téméraires qui croient qu'ils savent et les
sages qui savent qu'ils croient". Pour le problème: peut-on
échapper à la croyance autrement qu'en croyant!
Enfin, un texte magnifique: Gabriel Marcel, Du refus à la
vocation, en particulier page 220. Ces
quelques indications que vous m'avez demandées n'ont pas la prétention
d'être une bibliographie officielle: vous la trouverez, le plus souvent, au secrétariat de
votre lycée prépas. C'est simplement quelques chemins dont certains
mènent peut-être quelque part pour ceux qui savent lire et ruminer,
dirait Nietzsche.
Que vos lectures soient des chemins de liberté: la meilleure façon de se
préparer c'est l'aventure et la gratuité. C'est bien le sens de
"culture générale". Ce qui vous semblera le plus inutile se
révèlera le plus souvent le plus utile. Une
petite anecdote bien significative: la crédence était une table
destinée à donner confiance aux "grands" romains qui s'apprêtaient
à déguster des plats préparés par des esclaves ....: on mettait les
dits plats sur cette crédence et, pour donner confiance aux maîtres, des
esclaves les goûtaient... Une sorte d'auxiliaire de la croyance pour
ainsi dire.
La croyance: un
joker: une lecture incontournable pour bien se préparer: Gorgias de
Platon, traduction Monique Cant, Garnier Flammarion, n°465. Bien suivre
les distinctions de Platon entre croire et savoir en lisant de très près
ce dialogue et en particulier de 449 b à 462, pages 126 à 156 dans
l'édition Garnier Flammarion. Pour accompagner la lecture de ce passage
utilisez cette sur Philagora : Socrate
/ Gorgias
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