Le
malade et sa guérison !
Conséquences
Si on entre bien portant chez le médecin et on en sort malade ce n'est
bien entendu, la plupart du temps, pas par la faute du médecin: c'est que des analyses ont
révélé un dérèglement qui pourrait, à terme, menacer le patient.
L'opinion, moins on voit de médecin moins on est malade , comme toute
opinion,a une part de vérité:
L'opinion provient en effet d'une survalorisation des témoignages de la
conscience et d'un besoin,transformé en connaissance; un peu comme celui
qui dirait, conduisant en état d'ivresse, je suis libre car j'ai
conscience d'être libre de faire tout ce que je veux. On a longtemps cru
que celui qui avait conscience d'être malade était malade. Celui qui
n'avait pas conscience de l'être n'était pas malade. On disait que la
santé c'était oublier son corps. Or les anomalies les plus graves ne
sont pas conscientes !
La maladie n'est plus ce dont vient témoigner un malade, ce dont il se
plaint (j'ai des palpitations = je suis cardiaque). Mais c'est le plus
souvent ce que l'on découvre à la grande surprise de l'intéressé. Cela
revient à dire que le diagnostic "je suis malade" ne relève
plus de la subjectivité du malade mais de l'objectivité obtenue par un
dépistage incontestable de signes anormaux mesurables, anatomiques,
biochimiques ou physiologiques. Comprenons la déception du malade, c'est
une véritable blessure qui le met en question en faisant porter le doute
sur le témoignage de sa conscience, de ce qu'il a de plus précieux. A
son médecin qui lui demande: comment allez-vous? Il n'ose plus répondre
je vais très bien et, lui présentant une feuille d'analyse énigmatique,
il ne peut que répondre: comment vont mes analyses?
Le patient dans son individualité a disparu, il risque bien de croire
qu'il n'est plus qu'une mécanique qui doit être sans cesse réglée et
donc qu'il ne guérira jamais! D'autant plus que l'oeuvre de Molière est
toujours vivante et que, tel ou tel médecin, prenant un regard lointain
et mystérieux, peut garder un silence inquiétant.
En échange
(quelle aubaine!) la société peut alors demander au médecin expert de
la renseigner sur la capacité de travail d'un individu en fonction d'une
maladie objectivement définie. Puisque, une mesure ne se discute pas. Au
médecin expert, la redoutable tâche de déduire de la maladie
objectivement définie la capacité de "rendement" actuelle
(quand on ne lui demande pas la capacité à venir !) d'un malade en
arrêt de travail, au risque de confondre la maladie et le malade.
Du point de vue de la maladie et de la guérison, un écart se produit
entre ce que le médecin veut apporter et ce que le malade attend de lui
d'où un fréquent malentendu, semblable à celui qui se produit pour les
même raisons entre des élèves et leur professeur qui se traitent de
fous.
- Le médecin apporte devant un cliché précis des performances
mesurables propres aux fonctions biologiques essentielles et de quoi agir
pour régler la mécanique.
- Le malade attend qu'on lui apprenne à vivre avec sa maladie, avec ses
douleurs et ses souffrances, et à affronter l'incertitude de l'avenir. Ce
qu'on lui propose, d'être suivi comme un moteur, ne lui convient pas. Il
regrette le temps heureux où il pouvait se passer du médecin et voudrait
donc retrouver son autonomie, surtout si le médecin ne le laisse pas
choisir. Il lui semble parfois qu'il y va de bien plus que de sa
vie,de sa liberté!
De son côté le médecin qui ne peut pas ou ne veut pas le guérir
définitivement s'exaspère d'une telle demande.
Entre ce que le
médecin apporte et ce que le malade attend, il y a souvent un tel écart
que l'amertume éclate au coeur du médecin comme au coeur du malade.
C'est un profond malentendu.
La solution c'est donc la diffusion de la psychologie médicale. Cette
diffusion va rencontrer des résistances chez le médecin comme chez le
malade. Seule une bonne définition de la maladie pourrait les mettre
d'accord.
Joseph
Llapasset ©
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