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MARE NOSTRUM

Phéniciens et Grecs en Méditerranée et sur le littoral provençal.

Jean Bernardi, professeur de Lettres Classiques à la Sorbonne.

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Les Phéniciens.

Sous le terme générique de Phéniciens, les Grecs rangeaient sans faire de distinction des peuples qui habitaient grosso modo le littoral du Liban et de la Syrie du nord actuels. Ces peuples formaient de petits Etats maritimes indépendants les uns des autres. Les cités souveraines les plus importantes, les seules connues des historiens pendant longtemps, étaient Tyr et Sidon. Depuis une soixantaine d'années on a exhumé, sur un site appelé aujourd'hui Ras Shamra, près de Lattaquié en Syrie du nord, les vestiges d'une cité importante qui s'appelait Ougarit On y a trouvé des palais et des monuments divers. En particulier, il y avait une bibliothèque fournie. J'ajoute que deux des douze tribus israélites, Nephtali et Zabulon, étaient voisines de Tyr et se livraient comme elle à l'exploration et au commerce maritime. La Bible nous apprend que Salomon s'était fourni auprès du roi de Tyr des matériaux nécessaires à la construction du Temple de Jérusalem. 
   Tous ces peuples parlaient des langues très voisines les unes des autres, très différentes du groupe des langues indo-européennes dont font partie, entre beaucoup d'autres, grec, latin ou français, sans oublier la plupart des langues européennes ainsi que le sanscrit.
Outre le phénicien proprement dit, la famille des langues sémitiques inclut l'hébreu et l'araméen, ainsi que l'arabe, sans parler de l'ougaritique, du moabite, de l'édomite ou du punique, le dialecte propre à Carthage. Toutes ces langues étaient, je le répète, extrêmement voisines les unes des autres. Ce sont des mots sémitiques que l'on retrouve parfois en Méditerranée sous des noms de lieux anciens ou modernes. Là où les Grecs parlaient de Phéniciens, on préfère aujourd'hui parler de sémites de l'ouest, un groupe ethnique distinct de ceux qui habitaient l'est de la Mésopotamie, autrement dit l'Irak.

Ce sont ces marins et ces commerçants "phéniciens" qui ont enseigné l'écriture aux Grecs et qui leur ont légué leur alphabet. Ils leur ont appris bien d'autres choses. Tout ce qui concerne, par exemple, les techniques commerciales, l'usage de la monnaie, les notions de capital et d'intérêt. Ou encore les noms qui désignaient les marchandises qu'ils exportaient en Grèce. Un bon exemple de ces emprunts de vocabulaire est celui de l'amande, dont le nom grec, amugdalè, que nous l'avons décalqué plus exactement sous sa forme savante "amygdale", dérive du sémitique amugdalah.

Amande ou amygdale n'offrent aucune signification claire. Le mot grec n'en avait pas davantage. Le terme sémitique d'origine amugdalah parlait au contraire à l'imagination, puisqu'il veut dire "la fortifiée".

En remontant le cours des temps, on trouve donc en Méditerranée des Phéniciens d'une civilisation nettement plus avancée que celle des Grecs. Ces derniers vont se mettre à leur école. Les choses vont progressivement changer parce que les marins grecs vont entrer en concurrence avec les flottes phéniciennes qu'ils finiront par éliminer. Ils le feront d'autant plus aisément que les cités Phéniciennes tombent sous la domination des rois qui règnent sur la Mésopotamie, Babyloniens d'abord puis Perses. Les Phéniciens de Phénicie n'interviennent plus en Méditerranée occidentale après le VIe siècle. Ce qui ne veut pas dire que les Grecs y sont débarrassés de la concurrence des sémites, bien au contraire.

Carthage.

   Parmi tous les comptoirs fondés par Tyr, il y en a un qui va prospérer bien au delà de sa métropole. J'ai nommé Carthage, fondée vers 814. Le nom de Carthage (qarth hadashat) signifiait simplement La ville neuve. Retenez ce mot de qarth qui signifie "ville" : nous en aurons besoin bientôt. 

   Assez vite, les Carthaginois ont entrepris de s'emparer de la Sicile, qui d'ailleurs leur doit son nom. Leur expansion y sera bloquée par les grandes colonies grecques comme Syracuse. Il appartiendra aux Romains de les en expulser plus tard. C'est aussi en Espagne que les Carthaginois ont entrepris de s'étendre sous l'impulsion de la famille des Barca, dont Barcelone porte encore le nom. C'est en Espagne qu'ils se heurteront aux colonies grecques de Marseille. Marseille, alliée de Rome, attirera l'attention du Sénat romain sur les dangers de l'expansion de Carthage en Espagne. Rome avait déjà expulsé les Carthaginois de Sicile au cours de la première des trois guerres puniques, Hannibal (un Barca) perdra l'Espagne en 202, au terme de la seconde, après avoir été à deux doigts d'abattre Rome. La 3e guerre verra la destruction totale de Carthage en 146.

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