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Rubrique lettres
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parcours initiatique
Auteurs
Stéphane MALLARMÉ 1842
/ 1898
par Joseph Llapasset
La vie d'un
albatros de 1863 à 1898
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Une
vie, comme un albatros sur le pont d'un navire...
Dialogue entre Hibou et Oui-oui sur la monotonie d'une
biographie!
Hibou: en Mai 1863 Mallarmé vient de
perdre son père. C'est pourtant un fiancé "heureux" qui assure sa vie
professionnelle (il réussira le certificat d'aptitude pour l'enseignement de l'anglais le
17 Septembre) et sa vie affective (il se mariera le 10 Août 1863 avec "une gentille
allemande", Maria-Cristina Gerhard, demoiselle de compagnie qu'il a rencontrée en
Mai 1862).
Le bonheur lui-même serait-il un obstacle? Alors, on
comprendrait que Mallarmé ne pouvait pas être heureux: Les Fenêtres nous
disent son désir d'autre chose que la routine bourgeoise qui va écurer Rimbaud,
quelques années plus tard.
Oui-oui: Encore un qui
n'est jamais content!
Hibou: Disons plutôt qu'il ne se
contente pas d'un objet car il ne se réduit pas à un besoin. En fait Mallarmé est
désir d'une chose inconnue.
Oui-oui: il va passer sa
vie à attendre
Hibou: Bien dit "J'attend une chose
inconnue" dira Hérodiade (Pléiade page 48). Car si c'est une chose inconnue, s'il
la rencontre comment la reconnaîtra-t-il? Toujours est-il que le réel, le quotidien est
dévalorisé par l'idéal, par l'espoir. Dans le bonheur matériel de la vie assurée, il
n'y a que la négation de l'idéal, d'où l'ennui et le sentiment d'impuissance au
cur du poète comme un albatros sur le pont d'un navire qui ne sait plus marcher
parce qu'il aspire à voler.
Oui-oui: Je commence à
comprendre pourquoi tu as choisi Les Fenêtres: le poète dans la vie quotidienne
est semblable à un malade dans un hôpital avec une vitre qui rappelle, au malade qu'il
est, les vols qui n'ont pas fui, et la misère d'un bonheur humain!
Hibou: C'est le thème de l'impuissance
à réaliser dans la réalité un idéal: il faudrait donc mourir au monde pour se
transfigurer en amour c'est à dire en beauté.
Oui-oui: Hé là! C'est
de la mystique?
Hibou: ou plutôt de l'art.
Mais peut-on vraiment renoncer au monde? Le monde n'est-il pas en nous. Si oui nous serons
toujours hantés par lui, alors nous serons condamnés au dégoût qui habite le
"héros" de Camus dans La chute, Clamence.
Dans une lettre du 3 Juin 1863 à son ami Casalis, Mallarmé affirme: "Dire je
suis heureux, c'est dire je suis lâche et plus souvent je suis niais.
Car il faut ne pas voir au-dessus de ce plafond de bonheur le ciel de l'Idéal ou fermer
les yeux exprès. J'ai fait sur ces idées un petit poème Les Fenêtres, je te
l'envoie."
Oui-oui: Tu proposes
donc, puisque Mallarmé se détourne de l'action dont la banalité le désespère, un
sorte de biographie originale de l'âme du poète.
Hibou: exactement, d'autant plus qu'on
trouvera une chronologie très détaillée au début des uvres complètes dans la
Pléiade, ce qui devrait satisfaire les chercheurs et qui est d'ailleurs recopiée ici et
là.
L'idéal: l'âme du poète
avec, |
La réalité: les
nécessités du quotidien avec, |
1862: "Renouveau"
|
l'amitié, les premiers écrits, un voyage à Londres:
vie commune avec Maria Gerhard mais séparation
|
1863: "Les Fenêtres"
"Apparition" |
des lectures (dont Th. Gauthier), un voyage à Londres
par Anvers, mariage le 10 Août avec Maria, succès le 17 Septembre au Certificat
d'Aptitude à l'enseignement de l'anglais, mais 1er poste en Ardèche...
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1865: "Brise marine"
|
un bébé est arrivé (Geneviève), Mallarmé s'ennuie:
il profite des vacances pour voyager (Versailles, Avignon, Cannes)
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1866: "Soupir"
|
vacances de Pâques à Cannes. Publication du Parnasse
contemporain avec 10 poèmes de Mallarmé. Relations avec Aubanel d'Avignon. En
Octobre, il est nommé au lycée de Besançon, correspondance avec Verlaine.
|
1875: "Le Tombeau d'Edgar Poe"
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installation au 87, rue de Rome à Paris (il y recevra,
le mardi ses amis dont Paul Valéry). Cérémonie du Mémorial
d'E. Poe à Baltimore le 16 Novembre.
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1884: "Autre Éventail"
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nomination au lycée Jeanson le Sailly
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1885: "Le vierge, le vivace..."
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le 16 Mai, un congé jusqu'au 30 Juin. En Octobre il est
prof. au Collège Rollin
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1887: "Une dentelle"
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il reçoit tous les mardis. Conflit avec l'éditeur
Léon Vanier
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1895: "Petit air"
ou
Le bain
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le 2 Février toast à la saint Charlemagne au collège
Rollin
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1898: "Ma native illumination"
|
le 9 Septembre 1898 en présence de Marie son épouse,
de Geneviève sa fille, de son médecin, Mallarmé meurt brusquement...
|
Ainsi Mallarmé peut écrire dans Autobiographie (Pléiade page 664)
"Voilà toute ma vie dénuée d'anecdotes... je scrute et ne vois rien
d'autre, les ennuis quotidiens, les joies, les deuils d'intérieur exceptés"
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