"Dans Ménon
(comme dans le Cratyle et dans le Philèbe) il y a une
"mise en demeure de Socrate"
On veut
l'enfermer dans une alternative: la vertu s'enseigne ou non. Tout
le dialogue consiste à refuser cette position du problème; à le
penser en d'autres termes. Le problème n'a de sens que si on
comprend qu'il y a une hypothèse ontologique médiatrice: décision
sur la nature des choses concernées." M. Dixsaut
"Récapitulons
maintenant la structure du Ménon:
Image:
Trois hypothèses dont la réfutation amène la Première Aporie.
Définition:
Critère:
La Vertu est un bien
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-
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Alternative:
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Le
Bien est-il science ou peut-il être séparé de la
science.
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Détermination
et Notion: la vertu est doute
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Le
bien est science
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Essence
et Aporie finale
Épreuve par les conséquences:
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Ne
peut être considéré comme science qu'une discipline
qui s'enseigne et qui s'apprend effectivement. Or la
vertu n'a ni maîtres ni élèves.
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Aporie
seconde
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-
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Épreuve
par hypothèse supérieure:
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Le
Bien (l'Utile) peut également être opinion vraie.
La Vertu qui est un bien, n'étant pas une science, doit
être une opinion vraie.
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Faute
d'avoir suivi la bonne méthode, l'enquête se termine par
l'aporie finale."
V.
Goldschmidt, Les dialogues de Platon page 121.
Comment
comprendre cela?
En
effet il est vain de s'interroger sur une qualité (= enseignement
possible ou non) de ce dont on ignore l'essence (= ce que cela
est).
Socrate: "Quand je ne sais pas ce qu'est une chose,
comment saurais-je quelles en sont les qualités? " 71
b. Socrate pose la bonne question.
Plus loin, Socrate mêle indignation et ironie: "Ainsi
nous avons à caractériser une choses dont nous ne savons pas
encore ce que c'est?" 86 d.
-
B. Le
dialogue dérape et tombe dans l'aporie en raison de
l'obstination de Ménon qui ne suit pas, qui n'est pas à la
hauteur: son pragmatisme, son désir de pouvoir l'oriente vers
la question initiale: il cherche moins à savoir qu'à
pouvoir. Impatient, il refuse le détour, pourtant nécessaire,
de la définition; il refuse l'enquête parce qu'il cherche le
plaisir, la satisfaction d'un intérêt, plutôt que le savoir
que lui donnerait une définition bien ajustée à l'objet.
Socrate
ne cède à la pression de Ménon ("il n'y a rien d'autre
à faire") que parce que, dans la maïeutique, lorsque
l'élève refuse une démarche celle -ci s'arrête puisque c'est
l'élève qui est l'auteur de la démarche (Essence de la maïeutique
= c'est toi qui le diras). Au contraire Ménon confond
l'enseignement avec la simple circulation d'une information, un
peu comme dans des vases communicants dont l'un est plus rempli
que l'autre. C'est une constante de Platon de refuser le mécanisme
matérialiste.
les
conséquences déduites, quelle que soit la rigueur de la déduction,
auront la probabilité du point de départ, ce qui explique
l'Aporie finale du Ménon. Mais cela n'explique pas que Socrate
accepte de s'engager dans cette voie. Il a peut-être une bonne
raison de le faire.
Voici trois
écrits incontournables (= nécessaires au sens que Lévinas donne
à ce terme)
A.
Valensin. Dans Regards sur Platon, Editions
Montaigne, Aubier - Lire le chapitre sur le Ménon.
V.
Goldschmidt, Les dialogues de Platon, Ménon
(p. 117 à 128).
J.
Chaix-Ruy, La pensée de Platon (p. 112 à
117).
Vous
trouverez le texte Platon, oeuvres complètes,
Pléiade tome1. (p.513 à 555: les notes sur le Ménon
se trouvent p. 1317 à 1325 - Traduction et notes de
Robin-Moreau).
Dans
Profil philosophie (Hatier), il y a une intéressante
introduction de J-P Fraisse et le texte intégral
(traduction de Victor Cousin revue).
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- Ces lectures doivent susciter
une lecture répétée et de plus ne plus attentive du texte de
Platon C'est toi qui le diras...
Par J. Llapasset |