Le
texte
"Puisque
le libre jugement des hommes est extrêmement divers, que
chacun pense être seul à tout savoir et qu'il est impossible
que tous donnent la même opinion et parlent d'une seule
bouche, ils ne pourraient vivre en paix si l'individu n'avait
renoncé à son droit d'agir suivant le seul décret de sa
pensée. C'est
donc seulement au droit d'agir par son propre décret qu'il a
renoncé, non au droit de raisonner et de juger ; par suite
nul à la vérité ne peut, sans danger pour le droit du
souverain(1), agir contre son décret, mais il peut avec une
entière liberté donner son opinion et juger et en
conséquence aussi parler, pourvu qu'il
n'aille pas au-delà de la simple parole ou de l'enseignement,
et qu'il défende son opinion par la Raison seule, non par la
ruse, la colère ou la haine, ni dans l'intention de changer
quoi que ce soit dans l'Etat de l'autorité de son propre
décret." Spinoza
(1) : souverain : autorité Individuelle ou collective à qui
seule "il appartient de faire des lois" (selon
Spinoza)
Questions:
1. Dégagez la thèse de l'auteur et précisez les étapes de
son raisonnement.
2. Expliquez :
a. "il peut avec une entière liberté donner son opinion
et juger et en conséquence aussi parler."
b. "ni dans l'intention de changer quoi que ce soit dans
l'Etat de l'autorité de son propre décret."
3. La liberté d'expression doit-elle être illimitée ?
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1. Dégagez la thèse de l'auteur et précisez les
étapes de son raisonnement.
=> On
vous demande de formuler en peu de mots ce que l'auteur pose (thèse),
ce qu'il affirme, son message essentiel, si vous préférez. Puis de
faire apparaître précisément le plan du texte, chaque partie
correspondant à une étape de son raisonnement. Vous devez être
attentifs aux enchaînements: Puisque .... C'est donc ... Pourvu
qu'il
-
La thèse de l'auteur:
La liberté de penser et de parler par soi même ne saurait
être limitée parce que dans le contrat social implicite qui s'impose
l'individu ne renonce qu' à son droit d'agir en fonction de ses
opinions et de ses jugements.
-
Première étape. L'auteur part d'un fait peu contestable: la diversité
des opinions exclut que chacun garde le droit d'agir en fonction de son
opinion car ce serait la guerre de tous contre tous et cela menacerait
l'autorité du souverain.
-
Deuxième étape. De ce qui précède, l'auteur déduit des
conséquences...
-
Troisième étape. Spinoza marque avec précision les limites de al
liberté d'expression: il faut qu'elle soit réduite à ce que la raison
et le jugement ont produit.
La
deuxième question: Expliquez :
a) "il peut avec une entière liberté donner son opinion et
juger et en conséquence aussi parler."
- S'il
(l'individu) a une entière liberté de donner son opinion et de juger,
il a la liberté d'expression: entière c'est à dire, sans limite à
condition qu'elle soit réduite à elle même, pure pour ainsi dire sans
intention de manipulation, de propagation de la violence ou de la haine.
Expliquez :
b) "ni dans l'intention de changer quoi que ce soit dans l'Etat de
l'autorité de son propre décret."
- La seule
difficulté tient aux derniers mots et à la difficulté de traduire le
latin. De l'autorité de son propre décret, doit être pris
ensemble. Comprendre par l'autorité, par un prétendu droit de
commander attaché à sa propre décision ou plus simplement par un
pouvoir attaché à sa propre décision. S'il y a une intention de
transformer l'Etat c'est à dire d'agir, la parole devient un instrument
et non plus une expression. Dès lors la liberté d'expression n'est
plus dans sa pureté qui consiste à permettre de penser par soi même
devant tous ceux qui pensent.
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