L'atmosphère de la
Terre primitive constitua peut-être un réacteur chimique propice
à la synthèse des molécules organiques nécessaires à l'émergence
de la vie. Cette hypothèse, proposée dès 1923 par le biochimiste
russe Alexandre Oparin, fut confortée en 1953 par l'expérience
remarquable du chimiste américain Stanley Miller. Ce dernier
remplit un ballon d'un mélange gazeux réducteur de méthane,
d'ammoniac, d'hydrogène et de vapeur d'eau et soumit ce mélange à
l'action d'un arc électrique simulant les orages de la Terre
primitive. Parmi les composés formés, il identifia l'acide
cyanhydrique (HCN) et le formaldéhyde (H2CO). Il isola également
la glycine et trois autres acides aminés qui figurent parmi les éléments
constitutifs des protéines. Il est intéressant de noter que
Stanley Miller fut le premier à réaliser la synthèse d'acides
aminés à partir d'un mélange de gaz et de décharges électriques
avec la volonté délibérée de mimer l'origine de la vie. En fait,
Walther Lôb décrivit dès 1913 la synthèse de glycine en
soumettant un mélange de dioxyde de carbone, d'ammoniac et de
vapeur d'eau à des décharges électriques dans un article intitulé
" Uber das Verhalten der Formamids unter der Wirkung des
stillen Entladung ein Beitrag zur Frage der Stickstoff-Assimilation"
publié dans la revue allemande Berichte. Walter Lôb ne se préoccupait
pas de l'origine de la vie mais cherchait à comprendre
l'assimilation de l'azote atmosphérique par les plantes. Cet
article passa quasiment inaperçu et reste encore largement méconnu
aujourd'hui.
Depuis l'expérience
de Stanley Miller, 17 des 20 acides aminés utilisés aujourd'hui
par les protéines Ont été isolés ainsi que certains éléments
constitutifs des acides nucléiques. Cependant, les géochimistes
privilégient une atmosphère primitive terrestre riche en dioxyde
de carbone à l'instar de celles de Vénus et de Mars. Dans de tels
mélanges gazeux, la fabrication des acides aminés est très
faible. On cherche donc d'autres milieux réactionnels riches en méthane
ou en hydrogène capables de réduire les oxydes de carbone.
Les molécules
organiques ont pu se former au fond des océans dans les sources
chaudes sous-marines. Les évents hydrothermaux représentent, en
effet, un environnement favorable aux synthèses prébiotiques car
les gaz qui s'en échappent sont chargés en dioxyde de carbone mais
aussi en hydrogène, azote, oxyde de carbone, méthane, anhydride
sulfureux, hydrogène sulfuré. L'énergie thermique est fournie en
continu au système par le magma.
Des traces d'acides
aminés ont été obtenues en laboratoire à partir d'un mélange de
méthane et d'azote en simulant les conditions des évents
sous-marins. Pour l'Allemand Gùnter Wàchtershàuser, les molécules
organiques primordiales se seraient formées au niveau de ces
sources hydrothermales par réduction des oxydes de carbone grâce
à la réaction de l'hydrogène sulfuré (H2S) sur le sulfure de fer
(FeS). En laboratoire, le sulfure de fer, l'hydrogène sulfuré et
le dioxyde de carbone réagissent en milieu anaérobie pour donner
de l'hydrogène et une variété de mercaptans dont le méthanethiol
(CH3-SH). Dans certaines conditions, il se forme des thioesters, qui
ont peut-être constitué, selon le biologiste belge Christian De
Duve, le principal moteur métabolique d'un monde vivant primitif de
thioesters.
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