° Rubrique Droit et Justice DROIT et JUSTICE par Jean Jacques SARFATI jean-jacques.sarfati@wanadoo.frTentative critique et interprétative de la vision de la peine et du Droit pénal chez M. Foucault Pages: 1 - 2 - 3 - 4 - 5 - 6 - 7 (Notes)Philagora tous droits réservés __________________
II) Tenter d'exposer le contenu du travail et des thèses de Michel Foucault. (suite) 2) Un juge examinateur au pouvoir "dénaturé" Pour
Foucault, la magistrature n'est pas seulement une caution du système,
elle est plus que cela : elle a
abandonné la mission qui était sienne ou qu'elle prétendait vouloir
faire sienne. Les
juges ne sont pas seulement des alibis. En effet, lorsque
l'on pénètre plus à fond leurs pratiques actuelles, Foucault nous fait remarquer
qu'en réalité ceux-ci ne jugent plus, ils ont « honte » de juger. Lorsque
l'on prend connaissance du nouveau rituel pénal, nous
ne pouvons que nous rendre à l'évidence
du fait que les magistrats ont peu à peu abandonné leurs pouvoirs entre les mains de la médecine; ils
font montre de ce que Foucault
appellera leur « immense
appétit de médecine » (17). Comme
il le dira plus tard, l'examen plus approfondi des pratiques pénales
contemporaines nous révèle que « nous
avons une justice qui
s'innocente de punir en prétendant traiter le criminel » (18). Et
Foucault de considérer dans ce mécanisme
de médicalisation à outrance
la preuve que le pouvoir exercé par les magistrats est «
dénaturé » (19). D'où
provient cette médicalisation, cette justice qui ne juge plus et qui
traite les délinquants en malades ? De
la confusion des rôles sans doute, de la volonté de s'innocenter peut-être,
du passage d'une justice accusatoire à une justice «
examinatoire
»
(vision prophétique s'il en est car notre droit lui-même
n'a-t-il pas abandonné le terme d'inculpé pour celui de « mis en
examen» pour identifier le citoyen obligé de s'expliquer devant un
juge d'instruction ?)
. De
cette société disciplinaire et de la transformation du rôle de juge en
celui d'alibi ou de caution, mais ce n'est pas tout. En
effet, désormais ce qui importe dans le système pénal en son ensemble,
ce n'est plus le jugement, les tribunaux mais avant tout la prison
et l'ensemble du processus à l'intérieur duquel elle s'insère :
la
société disciplinaire, panopticale qui surveille et contrôle tout d'abord,
et ensuite pour certains le système carcéral qui « prépare » littéralement
le délinquant. Ce
délinquant dont le corps sera rendu plus docile, l'âme travaillée par
la prison, ce centre qui évolue tranquillement à l'abri de tous regards
indiscrets et à l'abri évidemment de ce juge, une fois de plus dessaisi
de l'exécution de la peine elle-même (20). La
procédure judiciaire ne présente donc plus de réelle utilité intrinsèque
si ce n'est cette fonction d'alibi évoquée plus avant. Le
juge n'est donc plus qu'un relais, après avoir été un alibi. Il ne faut
donc pas s'étonner de son dessaisissement. De plus - et c'est l'autre remarque de Foucault sur ce point - comme le jugement, la surveillance est renforcée ; elle est partout, irriguant toute la société.
.... (à suivre) ( Notes en lien ouverture nouvelle fenêtre) ° Rubrique Droit et Justice |