° Rubrique Philo: Capes-Agreg

Aide à la préparation au CAPES -

Rubrique proposée et animée par  François Palacio

Dissertations de philosophie

Le présent   (6 heures)

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Il convient, par conséquent, de distinguer deux présents. L’un constituant et l’autre constitué. Le second est le présent construit et abstrait. C’est un présent mathématique. Le premier est celui de l’action de synthèse où s’élabore le phénomène et est la condition de possibilité du présent constitué. De ce premier présent, nous pouvons dire qu’il ne peut être saisi car pour se le représenter, il faut justement passer par la représentation dont il est le fondement et qui ne permet donc que de concevoir le présent mathématique. Ainsi ce présent constituant peut-il être dit métaphysique car au-delà de la nature qui s’étend dans le temps et qu’il concourre à fonder. Mais un nouveau problème se pose à nous du fait de cette distinction qui semble introduire un chôrismos infranchissable au sein de l’être. En quelle mesure devons-nous donc distinguer le présent qui est, au sens du présent constituant, et l’être qui est présent, au sens constitué ? Faut-il distinguer le présent et ce qui est présent ? Et en ce cas, comment ce qui est présent est-il s’il n’est pas ce qui est réellement, le présent ?


Il nous faut, par conséquent, poser la question de la différence ontologique entre l’être présent au sens nominal et l’être présent en son sens verbal.


Aussi commençons par nous poser la question de l’être de ce qui devient. Comment la chose persiste-t-elle dans l’être ? Ne pouvons-nous pas concevoir le rapport entre l’être, le présent véritable, et ce qui devient comme un rapport de parfait à imparfait, de ce qui est achevé en soi à ce qui n’est toujours qu’en voie d’achèvement ? La question qui nous occupe est en fait de savoir comment nous pouvons atteindre à l’intuition, et par là même à la connaissance, de ce présent véritable. Ainsi, ce qui est réellement est le présent de l’être qui est mais, en tant que notre représentation suppose une construction qui ne s’achève que par la constitution du temps et que la synthèse temporelle est elle-même indéfinie, ne nous faut-il pas quitter la représentation, la nature naturée, pour atteindre la nature naturante ? Est-ce qu’un saut hors du temps ne nous permettrait pas de rejoindre l’être présent ? Cette conception ne nous est pas étrangère, elle nous vient de Platon. Il définit lui-même le temps dans le Timée, « l’image mobile de l’éternité ». Ainsi les choses sont, non en elles-mêmes, mais en tant qu’images fluctuantes de l’Etre. Le mouvement et le devenir étant inhérent à notre constitution sensible, ce n’est qu’en nous arrachant au corps périssable que notre âme pourra atteindre à ce qui toujours demeure dans l’immuable. Le mélethè thanatou, l’exercice de mort, tel qu’on le découvre dans le Phédon, doit nous initier à cette immortalité. Platon conçoit donc une séparation ontologique entre l’Etre présent et les choses qui deviennent. Or, là encore, ne sommes-nous pas face à une abstraction qui nous conduit à construire l’idée de l’être présent comme être immuable à partir d’une négation de l’être même des choses qui sont en tant qu’elles deviennent ? Ne glisse-t-on pas tout simplement de la présence à la persistance ?

Ainsi comprendre le présent, ce n’est pas faire abstraction du devenir, mais, au contraire, saisir la manière dont le devenir s’offre réellement. Le présent réel n’est dès lors pas la persistance d’un étant qui demeure mais la présence perpétuelle dans le pur jaillissement. Tâchons de nous représenter la nature, non comme l’être objectivement représenté, telle qu’elle se présente à l’époque moderne, mais tentons de retrouver en elle son sens originel de phusis, telle que les Grecs la nommaient. De ce point de vue, la phusis est la chose qui croît en même temps que la force qui préside à sa croissance. Or cette force elle-même ne se montre jamais qu’à travers ce qui advient. Ce qui advient est un étant qui s’annonce dans la présence et y persiste parce qu’on le retient en prise dans le regard. Il est phénomène, ce qui s’avance dans la lumière où il devient visible. Quant à l’être de cet étant, il est son jaillissement même dans la présence. Or, selon Heidegger, qui reprend à Boèce cette distinction de l’être et de l’étant, la métaphysique a consisté justement a effacé la présence de l’être au seul profit du présent de l’étant.

 

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