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Rubrique proposée et animée par  François Palacio

Dissertations de philosophie

Le langage est-il un instrument de communication?   (6 heures)

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Les théories de l’information, issues de la cybernétique, permettent d’envisager toute communication entre un émetteur et un récepteur en termes d’échanges d’information. Ce modèle a, en ce sens, l’avantage de pouvoir décrire n’importe quelle interaction en terme de flux transmis et traduits dans un échange codifié, qu’il s’agisse d’une interaction entre différents éléments physiques se communiquant un travail sous forme de chaleur, d’une régulation chimique ou biologique ou bien encore de la diffusion d’un message verbalisé visant la communication entre deux acteurs doués de paroles. De ce point de vue le langage articulé ne recèle point de caractères originaux permettant de l’envisager autrement que comme une simple communication de signes qui, traduits par le récepteur, conduisent à la compréhension du message transmis par l’émetteur. Dès lors le langage ne doit pas se limiter à la simple profération vocale, c’est à dire à la parole qui s’exprime dans une langue particulière. Toute communication, conçue en terme de message émis, diffusé et traduit, peut être conçue comme langage. Celui qui détient la clé de codage du message observé ou entendu peut sans peine déchiffrer sa visée communicative. Ainsi le langage se découvre comme un instrument de communication, c’est à dire comme le moyen d’une mise en commun d’informations.
 
Or, par là même, la question de la fin du langage devient celle de son être-moyen. Autrement dit, si le langage n’est qu’un instrument de la communication, la question qui nous doit nous retenir est celle-ci : que communique le langage et comment le communique-t-il ? Si la fin du langage est d’être moyen de la communication, son utilisation correspond à un usage technique et renvoie donc au juste maniement de normes d’utilisations. Mais quelle est l’origine de ces règles ? Sont-elles élaborées en vue de la communication ? En ce cas elles supposent que le sujet du discours soit en position d’une maîtrise potentielle de son propre langage. Ou bien la communication n’est-elle que l’utilisation partagée de ses règles ? Dès lors, ce que le langage met en commun n’est autre que lui-même, la communication n’étant pas la condition mais la conséquence du langage. Aussi se demander, ce qui est mis en commun dans et par le langage, c’est s’interroger sur la fin de la communication : est-elle immanente ou transcendante à l’utilisation du langage ?

Afin de déterminer la fin du langage, c’est à dire dans le but de savoir s’il est moyen transparent de la communication, il convient de l’interroger dans son rôle d’instrument. Mais parce que l’usage de l’instrument suppose l’emploi de règles, il nous faut aussi interroger les normes qui articulent la pratique langagière. Le langage peut-il devenir une technique dont nous serions en droit les maîtres ?  Et s’il s’avérait que cette utilisation nous est contraignante et non pas volontaire, que communiquerait le langage ?

 

La première question qui doit nous arrêter est donc celle du rôle et de la nature du langage en tant qu’instrument de la communication. Cette interrogation doit nous permettre de poser la question de ce qui se communique par le langage.

Or, avant toutes choses, il convient de nous demander si le langage est un instrument naturel. Parler du langage comme d’un instrument, c’est en effet sous-entendre qu’en tant qu’il se soutient d’un substrat organique, la phonation, le langage pourrait être conçu comme la main ou les jambes, c’est à dire comme permettant une utilisation consciente et déterminée d’un appareillage naturel et non séparable du corps qui le porte. De ce point de vue, si le langage est naturel, il devrait pouvoir servir à la visée de fins dictées par l’inscription de l’organisme dans un environnement naturel. Or qu’est-ce qu’un tel langage naturel pourrait signifier ? Commençons par nous souvenir que le langage n’est pas simplement entendu de la parole. Il y a langage partout où il y a échange d’information et analyse de cette information en vue d’une réaction attendue. Ainsi, au sein d’une espèce animale, certains codes sont émis à partir du substrat biologique ; ces codes sont identifiés par un autre représentant de l’espèce et appellent une réponse définie. On pourrait prendre l’exemple de l’émission, chez certains insectes sociaux, de phéromones permettant d’alerter, par voies chimiques, le groupe d’un danger potentiel. C’est aussi le cas dans les parades amoureuses où le message chimique, visuelle ou sonore, permet la communication d’une possible rencontre en vue de la reproduction. Nous voyons donc que dans le cas de la communication animale, le langage ne précède pas la communication. En effet, celle-ci en tant que déterminée par l’existence de l’espèce comme universel crée la possibilité d’un échange d’information dont la fin ne dépasse pas ce qu’exige l’existence de l’animal en tant que genre. Dès lors, le message émis ponctuellement ne témoigne que d’une adaptation à la situation et de l’actualisation d’une possibilité communicative déjà présente dans le tout de l'espèce. Ce qui importe dans l’émission du message par un représentant de l’espèce n’est pas tant que cet être précis l’est émis mais plutôt que le groupe soit informé dans son ensemble. L’émetteur du message, interchangeable avec n’importe quel autre, voit sa singularité immédiatement absorbée par l’universalité générique de son espèce naturelle.

 

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