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d'aide à la préparation au CAPES - - Psychologie -
Essais de psychanalyse Fiche 1 - Fiche 2 - Fiche 3 - Fiche 4 - Fiche 5 - Fiche 6 - Fiche 7 - Fiche 8 - Fiche 9 - Fiche 10 - Fiche 11 - Fiche 12 - Fiche 13 Site Philagora, tous droits réservés © __________________ Considérations
actuelles sur la guerre et sur la mort
(1915) 1. La désillusion causée par la guerre Au sein de chacune de ces nations avaient été établies, pour l’individu, des normes morales élevées, auxquelles il devait se conformer dans la conduite de sa vie, s’il voulait trouver sa place dans la communauté civilisée. Ces préceptes d’une rigueur souvent excessive exigeaient beaucoup de lui, un grand effort de limitation de soi-même et un large renoncement à la satisfaction pulsionnelle. Il lui était avant tout refusé de se servir des avantages extraordinaires que procure l’usage du mensonge et de la tromperie dans la compétition avec son prochain. (Mais) les peuples civilisés se connaissent et se comprennent si peu que l’un peut se retourner contre l’autre, plein de haine et d’horreur. Les peuples sont plus ou moins représentés par les Etats qu’ils constituent, ces Etats par les gouvernements qui les dirigent. Chaque ressortissant d’une nation peut, dans cette guerre, constater avec effroi que l’Etat a interdit à l’individu l’usage de l’injustice, non parce qu’il veut l’abolir, mais parce qu’il veut en avoir le monopole. Il ne faut pas non plus s’étonner que le relâchement de tous les rapports moraux entre les grandes individualités collectives de l’humanité ait eu une répercussion sur la moralité de l’individu, car notre conscience morale n’est pas le juge inflexible pour lequel la font passer les moralistes, elle est à l’origine angoisse sociale et rien d’autre. Là où la communauté abolit le blâme, cesse également la répression des appétits mauvais, et les hommes commettent des actes de cruauté, de perfidie, de trahison et de barbarie, dont on aurait tenu la possibilité pour inconciliable avec leur niveau de civilisation. Les illusions se recommandent à nous par le fait qu’elles nous épargnent des sentiments de déplaisir et nous font éprouver à leur place la satisfaction. En vérité, il n’y a aucune extermination du mal. La recherche psychanalytique montre tout au contraire que l’essence la plus profonde de l’homme consiste en motions pulsionnelles qui sont de nature élémentaire, qui sont identiques chez tous les hommes et tendent à la satisfaction de certains besoins originels. Ces motions pulsionnelles ne sont en soi ni bonnes ni mauvaises. Nous les classons comme telles, elles et leurs manifestations, en fonction de leur rapport avec les besoins et les exigences de la communauté humaine. Ces motions primitives suivent le cours d’un long développement, jusqu’à ce que leur activité manifeste soit permise chez l’adulte. Elles sont inhibées, dirigées vers d’autres buts et d’autres domaines, elles fusionnent les unes avec les autres, changent d’objets, se retournent en partie contre la personne propre.
Le remaniement des pulsions mauvaises est l’œuvre de deux facteurs agissant dans le même sens, l’un interne l’autre externe. L’influence exercée sur les pulsions mauvaises – disons égoïstes – par l’érotisme, besoin d’amour de l’homme pris dans son sens le plus large, constitue le facteur interne. Du fait de l’adjonction de composantes érotiques, les pulsions égoïstes se changent en pulsions sociales. Le facteur externe est la contrainte imposée par l’éducation qui représente les exigences de la civilisation ambiante et qui est relayée par l’intervention directe d’un milieu civilisé. Au cours de la vie d’un individu s’opère une constante transposition de la contrainte externe en contrainte interne. Les motions pulsionnelles d’un autre homme échappent évidemment à notre perception. Nous les déduisons de ses actions et de son comportement, que nous rapportons à des motifs, issus de la vie pulsionnelle. Éducation et environnement n’ont pas seulement à offrir des primes d’amour, mais oeuvrent aussi à l’aide de primes d’une autre sorte, récompense et punition. La société civilisée qui exige qu’on agisse bien, sans se soucier du fondement pulsionnel de l’action, a ainsi fait qu’un grand nombre d’hommes obéissent à la civilisation sans suivre en cela leur nature. Ceux-ci sont maintenant contraints à une constante répression pulsionnelle et la tension qui en résulte se traduit par les phénomènes de réaction et de compensation les plus remarquables. Que les grandes individualités humaines, les peuples et les Etats, aient laissé tomber, les uns à l’égard des autres, les restrictions d’ordre moral, c’est ce qui les a incités de façon bien compréhensible à se soustraire pour un temps à la pression exercée par la civilisation et à accorder une satisfaction transitoire à leurs pulsions réfrénées. La seule façon de décrire cet état de choses à nul autre pareil, c’est d’affirmer que tout stade antérieur de développement subsiste à côté du stade ultérieur né de lui ; la succession implique une coexistence, bien que toute la série des transformations découle des mêmes matériaux. L’essence de la maladie mentale, c’est le retour à des états antérieurs de la vie affective et de la fonction. Sans aucun doute, les influences exercées par la guerre sont au nombre des forces capables de produire un tel retour en arrière et c’est pourquoi nous n’avons pas à considérer comme inaptes à la civilisation tous ceux qui actuellement ne se comportent pas en hommes civilisés et il nous est permis d’espérer qu’en des temps plus tranquilles l’ennoblissement de leurs pulsions se rétablira. Peut-être ces peuples répètent-ils le développement des individus et se présentent-ils à nous, aujourd’hui encore à des stades très primitifs sur la voie de l’organisation, de la formation d’unités supérieures. Vers 2. Notre relation à la mort ° Rubrique Philo: Capes-Agreg |