° Rubrique Philo: Capes-Agreg

- Fiches d'aide à la préparation au CAPES -
Rubrique proposée et animée par  François Palacio

- Épistémologie

Comte. Discours sur l’esprit positif 

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§12- De tels exercices préparatoires ayant spontanément constaté l’inanité radicale des explications vagues et arbitraires propres à la philosophie initiale, soit théologique, soit métaphysique, l’esprit humain renonce désormais aux recherches absolues qui ne convenaient qu’à son enfance, et circonscrit ses efforts dans le domaine, dès lors rapidement progressif, de la véritable observation, seule base possible des connaissances vraiment accessibles, sagement adaptées à nos besoins réels.

 En un mot, la révolution fondamentale qui caractérise la virilité de notre intelligence consiste essentiellement à substituer partout, à l’inaccessible détermination des causes proprement dites, la simple recherche des lois, c’est à dire des relations constantes qui existent entre des phénomènes observés.

§13- Non seulement nos recherches positives doivent essentiellement se réduire, en tous genres, à l’appréciation systématique de ce qui est, en renonçant à en découvrir la première origine et la destination finale ; mais il importe, en outre, de sentir que cette étude des phénomènes au lieu de pouvoir devenir aucunement absolue, doit toujours rester relative à notre organisation et à notre situation.

§14- Pour caractériser suffisamment cette nature nécessairement relative de toutes nos connaissances réelles, il importe de sentir, en outre, du point de vue philosophique, que, si nos conceptions quelconques doivent être considérées elles-mêmes comme autant de phénomènes humains, de tels phénomènes ne sont pas simplement individuels, mais aussi et surtout sociaux, puisqu’ils résultent, en effet, d’une évolution collective et continue, dont tous les éléments et toutes les phases sont essentiellement connexes.

§15- En considérant la destination constante de ces lois, on peut dire, sans aucune exagération, que la véritable science, bien loin d’être formée de simples observations, tend toujours à dispenser, autant que possible, de l’exploration directe, en y substituant cette prévision rationnelle, qui constitue, à tous égards, le principal caractère de l’esprit positif.

§17- Après avoir considéré l’esprit positif relativement aux objets extérieurs de nos spéculations, il faut achever de le caractériser en appréciant aussi sa destination intérieure, pour la satisfaction continue de nos propres besoins, soit qu’ils concernent la vie contemplative, ou la vie active.

§18- Ces exigences intellectuelles, relatives, comme toutes les autres, à l’exercice régulier des fonctions correspondantes, réclament toujours une heureuse combinaison de stabilité et d’activité, d’où résultent les besoins simultanés d’ordre et de progrès, ou de liaison et d’extension.

Envers chaque ordre d’événements, les lois doivent être distinguées en deux sortes, selon qu’elles lient par similitude ceux qui coexistent ou par filiation ceux qui se succèdent. Cette indispensable distinction correspond essentiellement, pour le monde extérieur, à celle qu’il nous offre toujours spontanément entre les deux états corrélatifs d’existence et de mouvement ; d’où résulte, dans toute science réelle, une différence fondamentale entre l’appréciation statistique et l’appréciation dynamique d’un sujet quelconque.

Tous nos vrais besoins logiques convergent essentiellement vers cette commune destination : consolider, autant que possible, par nos spéculations systématiques, l’unité spontanée de notre entendement, en constituant la continuité et l’homogénéité de nos diverses conceptions, de manière à satisfaire également aux exigences simultanées de l’ordre et du progrès, en nous faisant retrouver la constance au milieu de la variété.

§20- Considérée quant à la destination extérieure de nos théories, comme exacte représentation du monde réel, notre science n’est certainement pas susceptible d’une pleine systématisation, par suite d’une inévitable diversité entre les phénomènes fondamentaux.

  Il en est tout autrement quant à la source intérieure des théories humaines, envisagées comme des résultats naturels de notre évolution mentale, à la fois individuelle et collective, destinés à la satisfaction normale de nos propres besoins quelconques. Ainsi rapportées, non à l’univers, mais à l’homme, ou plutôt à l’humanité, nos connaissances réelles tendent, au contraire, avec une évidente spontanéité, vers une entière systématisation, aussi bien scientifique, que logique.

  On ne doit plus alors concevoir, au fond, qu’une seule science, la science humaine, ou plus exactement sociale, dont notre existence constitue à la fois le principe et le but, et dans laquelle vient naturellement se fondre l’étude rationnelle du monde extérieur, au double titre d’élément nécessaire et de préambule fondamental, également indispensable quant à la méthode et quant à la doctrine.

§21- Si le privilège de la cohérence logique a désormais passé à l’esprit positif, il faut reconnaître aussi en lui l’unique principe effectif de cette grande communion intellectuelle qui devient la base nécessaire de toute véritable association humaine, quand elle est convenablement liée aux deux autres conditions fondamentales, une suffisante conformité de sentiments, et une certaine convergence d’intérêts.

  La philosophie positive peut seule réaliser graduellement ce noble projet d’association universelle que le catholicisme avait au Moyen-Âge prématurément ébauché, mais qui était incompatible avec la nature théologique de sa philosophie, laquelle instituait une trop faible cohérence logique pour comporter une telle efficacité sociale.

 

 vers: Fiche 3

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