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Prenons l'auteur de Quitter la ville au mot et accordons lui tout ce qu'elle revendique comme personne, sujet moral et sujet de droits: au demeurant, elle a raison: c'est l'œuvre qu'il faut considérer; abandonnons cette détestable méthode, fort prisée dans nos provinces, d'expliquer l'œuvre par la vie de l'auteur comme si Phèdre n'était que la projection des aventures hasardeuses de Racine. Nous dirons donc l'auteur de Quitter la ville et l'héroïne. L'héroïne est présentée à la fois comme une aliénée des temps modernes suspendue aux ventes de son précédent livre et comme une figure d'Antigone qui brave les avatars de la cité. Elle est libre, elle suit l'impulsion du moment, ou se clôt dans des attitudes de refus, mêlant ainsi le oui et le non, enfermant les autres dans le cercle de la double contrainte qui l'étreint. C'est bien là un aspect d'Antigone au service de la tribu contre la cité. Le premier magistrat de la ville ne s'y trompe pas et loue cette liberté. (page 15). Cependant cette Antigone n'est-elle pas en réalité Électre, cette fille de la vérité, qui amène le malheur dans une ville en faisant apparaître le mal, en le découvrant, à la lettre, en enlevant la couverture. Cette femme à histoires refuse la lâcheté des hommes qui l'entourent et fait trembler cette Maison bien verrouillée qui voulait lui offrir "aux frais de la princesse" un voyage exotique à trois. Mais la noblesse de l'héroïsme lui permet de revendiquer le titre de princesse. Va-t-elle exorciser le mal par la lumière? Il me semble qu'on n'a rien compris au parcours de l'auteur si on n'a pas prêté attention au style qui purifie tout au grand feu de la vérité et d'une simplicité d'un nouveau classicisme. Quitter la ville, oui. Mais ce n'est pas quitter les médiocres qui ne font rien avec beaucoup et qui s'offusqueront toujours des créateurs qui font beaucoup à partir de rien. Quitter la ville, ne débarrassera pas la ville de l'auteur car Christine Angot laisse son oeuvre, en particulier, chez Fanette, rue des Étuves. Le lecteur de
Quitter la ville, passe un très bon moment à lire cette
prose à la fois précise, sensible, qui a le génie des formules,
ce qui oriente peut-être l'auteur vers le théâtre où elle
excellera. Joseph Llapasset
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