"La
conscience n’est qu’un réseau de communications entre les
hommes; c’est en cette seule qualité qu’elle a été forcée
de se développer: l’homme qui vivait solitaire, en bête de
proie, aurait pu s'en passer. Si nos
actions, pensées, sentiments et mouvements parviennent — du
moins en partie — à la surface de notre conscience, c’est le
résultat d’une terrible nécessité qui a longtemps dominé
l’homme, le plus menacé des animaux: il avait besoin de secours
et de protection, il avait besoin de son semblable, il était
obligé de savoir dire ce besoin, de savoir se rendre
intelligible; et pour tout cela, en premier lieu, il fallait
qu’il eût une "conscience", qu’il "sût"
lui-même ce qui lui manquait, qu’il "sût" ce qu’il
sentait, qu’il "sût" ce qu’il pensait. Car comme
toute créature vivante, l’homme pense constamment, mais il
l’ignore. La pensée qui devient
consciente ne représente que la partie la plus infime, disons la
plus superficielle, la plus mauvaise, de tout ce qu’il pense :
car il n’y a que cette pensée qui s’exprime en paroles,
c’est-à-dire en signes d’échanges, ce qui révèle
l’origine même de la conscience."
Nietzsche Le Gai savoir.
Paragraphe 354
=======================
= Lisons
le texte ensemble: (suite)
actions,
pensées, sentiments et mouvements: Nietzsche
énumère tout ce qui apparaît à la conscience.
parviennent:
apparaissent à notre conscience.
à
la surface: terme important:
cela implique qu'il y a une profondeur une force tranquille de
l'inconscient.
du
moins en partie: nous avons
conscience mais il y a des zones d'ombres. j'ai conscience de ce
que je fais, mais je ne sais pas toujours pourquoi je le fais.
résultat:
le développement de la conscience est un résultat.
nécessité:
ce qui pèse sur l'homme comme un destin auquel, parce qu'il
était faible,il ne pouvait échapper par lui même. Ce qui le
contraignait à se faire aider par les autres et donc à
communiquer.
le
plus menacé: en
conséquence, il était vital pour lui de se regrouper et de
créer des sociétés d'entraide, dans lesquelles les faibles
regroupés devenaient forts.
besoin:
c'était une nécessité pour celui qui voulait survivre, comme la
nécessité de manger, de boire ....
semblables:
faibles comme lui, menacés.
obligé:
ici désigne encore la nécessité: le faible ne peut faire
autrement que de chercher une protection.
savoir
dire: pouvoir exprimer,
rendre intelligible ce dont il avait conscience.
ce
besoin: cet état de
détresse perpétuelle.
pour
tout ceci: tout implique la conscience.
sût...:
le savoir est donné par la conscience: je sais que je suis
menacé...
lui
même: par lui même.
lui
manquait: lui faisait
défaut.
ce
qu'il sentait: ce qu'il éprouvait et en particulier le
sentiment de détresse.
car:
pour savoir ce qu'il pensait, il lui fallait la conscience. Ce qui
signifierait que sans la conscience il pensait. Si le corps pense,
l'homme pense toujours.
la
pensée: celle qui est
consciente n'est que la partie émergée d'un iceberg.
la
plus infime: au dernier
degré de la hiérarchie.
la
plus superficielle: la plus
à la surface, celle qui manque de profondeur.
la
plus mauvaise: la plus
imparfaite. Elle n'a que peu de valeur car elle n'apparaît que
par des paroles.
signes
d'échanges: les paroles ne sont que des signes pour donner
et recevoir des informations pratiques, pour communiquer: elles
sont intéressées, vulgaires.
l'origine:
ce d'où est sorti la conscience, ce qui l'a produite, ce qui l'a
faite telle qu'elle est.
Page
1 et page 2
Bonne
continuation
Joseph Llapasset
|