"Supposons
que quelqu'un affirme, en parlant de son penchant au plaisir,
qu'il lui est tout à fait impossible d'y résister quand se présente
l'objet aimé et l'occasion: si, devant la maison où il rencontre
cette occasion, une potence était dressée pour l'y attacher
aussitôt qu'il aurait satisfait sa passion, ne triompherait-il
pas alors de son penchant? On ne doit pas chercher longtemps ce
qu'il répondrait. Mais demandez-lui
si, dans le cas où son prince lui ordonnerait, en le menaçant
d'une mort immédiate, de porter un faux témoignage contre un
honnête homme qu'il voudrait perdre sous un prétexte plausible,
il tiendrait comme possible de vaincre son amour pour la vie, si
grand qu'il puisse être. Il n'osera peut-être assurer qu'il le
ferait ou qu'il ne le ferait pas, mais il accordera sans hésiter
que cela lui est possible. Il juge
donc qu'il peut faire une chose, parce qu'il a conscience qu'il
doit la faire et il reconnaît ainsi en lui la liberté qui, sans
la loi morale, lui serait restée inconnue."
Kant.
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= Lisons
le texte ensemble: (suite)
devant
la maison: entre lui et
la maison dans laquelle se trouve l'objet de son amour et une
chambre discrète.
potence:
instrument pour pendre en forme d'équerre.
dressée:
donc bien en vue, rien ne la dissimule.
attacher:
il sera suspendu, pendu.
aussitôt:
au moment même où il viendra de terminer ...
satisfait:
de contenter.
sa
passion: sa passion
amoureuse, son désir qui l'a emporté.
triompherait-il:
question de Kant. Ne résisterait-il pas à son désir, ne le
vaincrait-il pas complètement?
ne
pas chercher longtemps: car
la réponse est immédiate, il n'y a pas une hésitation comme
dans l'exemple suivant. La contrainte et l'urgence excluent
la délibération: s'il en est ainsi que dans l'exemple qui
précède, il n'y a pas de risque de succomber au penchant.
=> Ainsi le
même qui affirmait se contredit par ses actes. Son action
n'est pas vertueuse mais elle est déterminée par sa
sensibilité: il a peur de souffrir.
Mais qu'en est-il s'il s'agissait de commettre une mauvaise
action.
mais:
introduit une autre possibilité.
prince:
le souverain, celui qui représente Dieu qui a le droit de vie et
de mort.
ordonnerait:
commanderait comme une loi commande.
en
le menaçant: d'une punition
s'il n'obéit pas.
faux
témoignage: de prétendre
avoir assisté à une scène qui n'a pas existé.
il:
le prince.
prétexte
plausible: une raison
appuyée par le faux témoignage qui est demandé.
contre:
pour perdre
un
honnête homme: quelqu'un de
digne qui n'a pas commis ce dont on l'accuse.
il
tiendrait: il considèrerait
comme possible, comme pouvant se réaliser.
vaincre:
être plus fort, par sa volonté, que son amour pour la vie. Ainsi
il n'exclut pas un acte libre, préférer la mort à
l'accomplissement d'un mal, obéir à la loi morale qu'il porte en
lui.
n'osera:
il n'osera répondre car il peut toujours, au dernier moment faire
passer sa vie avant son devoir.
il
accordera: il sera d'accord
pour admettre qu'il le peut s'il le veut:
faire passer la raison avant la passion, faire le bien quoi que
cela puisse lui coûter. Or en accordant cela, il "juge"
c'est à dire qu'il affirme.
qu'il
peut faire: il peut accomplir
une chose, une action.
a
conscience: ici sa conscience
lui dit.
reconnaît:
il tient pour vrai et incontestable sa liberté: il est libre par
rapport aux penchants naturels.
sans
la loi morale: si l'homme
doit être respecté c'est qu'il porte en lui la loi morale. Par
elle il découvre qu'il est libre, il découvre sa dignité:
pouvoir obéir à la loi morale, au meilleur qui est en lui.
Bonne
continuation
Joseph Llapasset
©
page
1 et page 2
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